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fonds documentaire mrc
2015-12-15
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[ "michel rouger" ]
LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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# LE DROIT, LE JUGE et LES FRONTIERES *La France traverse une période troublée, faite de profonde émotion, à la suite de l'agression sanguinaire dont Paris a été victime, et de grand désarroi, face au déclassement social d'une partie de son peuple qui se sent de plus en plus abandonné depuis 40 ans.* *Elle renvoie à début 2017, le débat sur les solutions.* Depuis 40 ans, 1977, dernière année budgétaire positive avant l'entrée de l'Etat dans 4 décennies de déficits parfois abyssaux et paralysants, les Princes charmants de nos palais des bords de la Seine, de l'Elysée à Bercy, qui ont entrepris de réveiller la belle endormie n'y ont pas réussi. Pour la majorité des Français cette plaie d'argent n'est pas mortelle, du moins tant que les intérêts payés aux créanciers sont au plancher. Pour eux la solution rêvée est ailleurs. Depuis 40 ans la France a perdu ses frontières. Dans son tréfonds elle ne l'admet pas, tout en étant convaincue qu'elle ne peut pas y échapper. Il faut le comprendre au pays des châteaux forts, des bocages, des murs et des murets, des querelles de parcelles et de bornage, de l'impôt sur les portes et sur les fenêtres, de la ligne Maginot, de la ligne de démarcation, du mur de l'Atlantique, des barrages et des barricades. Les Celto-Gaulois, définition des Français par leurs amis Anglais, ont un besoin impérieux de se diviser furieusement pour mieux s'enfermer au village d'Astérix et d'Obélix. Depuis des siècles, le territoire sur lequel « nos ancêtres les Gaulois » sont installés, est un open space qui attire les migrants du nord vers le sud, de l'est vers l'ouest, et plus récemment, du sud vers le nord.
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[ "michel rouger" ]
LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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L'actuelle bouffée de colère, récurrente et passéiste, qui fait rêver au bon vieux temps de la zone libre de Vichy, n'a d'autre but que faire des lois pour que l'avenir ne remplace pas le passé. La France adore les révolutions - restaurations qui remplacent les institutions défaillantes. En attendant 2017, il faudra que les hommes et les femmes responsables expliquent, à la place des politiques inaudibles, ce qu'est le « Sans frontières » dans le monde transformé par les innovations technologiques que les peuples ont intégrées dans le changement de leurs comportements. Ce petit texte destiné aux femmes et aux hommes de loi et de justice y est consacré.
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LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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## Le DROIT et la JUSTICE sans FRONTIERES Les réflexions publiées dans cet article sont extraites d\'un ouvrage d'analyse, entrepris il y a 18 mois, pour éclairer les prochaines évolutions de l\'institution judiciaire française, une fois passée l'étape de haute montagne de 2017. Ces extraits sont articulés en trois chapitres résumés. Ils traitent de l'abolition des frontières, de ce qu'elle imposera aux gens de robe, juges et juristes d'aujourd'hui, comme jadis l'abolition des privilèges à leurs ancêtres des parlements. Revenons en 1977, Alain Peyrefitte, le visionnaire, est Ministre de la Justice. Il vient de publier le « Mal Français », qui n'a toujours pas quitté l'hexagone, avec ou sans frontières. L'organisation de la Justice, telle que gravée dans le marbre de la constitution de 1958, simple autorité divisée entre ses deux ordres, l'administratif et le judiciaire, respecte le triptyque républicain. La Nation rassemble le Peuple à l'intérieur de ses frontières, le Peuple fait la Loi par ses représentants, L'Etat la fait appliquer par ses services extérieurs que sont les cours et les tribunaux, au sein desquels opèrent les fonctionnaires à statut spécial du corps des magistrats formés à l'Ecole de l'Etat. Les juges régulent les échanges économiques, financiers et culturels. Après le prononcé de ce très banal rappel, on serait tenté de dire «
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LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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fermez le ban » comme à la fin de la sonnerie aux défunts, car c'est bien de cela qu'il s'agit. Que s'est il donc passé en 40 ans qui aboutit à des bouleversements que la société ressent fortement, au point d'exprimer le malaise sociétal et politique actuel ? Pour répondre il faut extraire de ces 300 pages de réflexions, non encore publiées, celles consacrées aux domaines les plus sensibles dans lesquels la Nation a perdu ses frontières. L'abolition des frontières dans la production industrielle, la consommation marchande, et dans les relations individuelles et intimes. La décennie 80 a débuté par la décision de reprendre au marché toutes ses grandes entreprises industrielles, commerciales et financières pour les confier à l'Etat, devenu administrateur du patrimoine productif d'un pays fermé, protégé par sa langue. La décennie 90 a tout rendu au marché à domination anglophone. La décennie 2000 a mis l'Etat, sur endetté, sous la dépendance des mêmes marchés opérant, au profit des plus forts, dans un espace mondialisé, sans protection des plus faibles. Ces têtes à queue ont envoyé l'industrie française au fossé, avant de la mettre à la casse. Ce marché, dorénavant globalisé, agité jusqu'à l'hystérie financière de 2008, par les gigantesques puissances commerciales des marketeurs nord-américains a attiré, sans espoir de retour, les consommateurs envoutés par les technologies séduisantes, confortables, créatrices de la révolution numérique et de ses « petites poucettes ». Les marketeurs commencent à se rendre compte qu'il faut accepter, en tous domaines, la renaissance du Droit, seule garantie pour assurer le vivre ensemble.
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LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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Enfin, la culture basique du peuple a trouvé son bonheur dans la relation au sein des réseaux planétaires, temps, distances et valeurs abolies, symboles d'appartenance à un modèle de liberté, d'égalité et de fraternité dont le virtuel fait oublier le factice, cachant la réalité d'une révolution numérique, celle d'une économie sans croissance périlleuse pour les finances publiques françaises . Qu'ont fait le Droit et la justice, maîtres des lieux à l'intérieur des frontières abolies, dans cette situation caricaturée par la célèbre formule de la vulgate marxiste du « renard libre dans le poulailler libre » ? Pas grand-chose qu'on puisse leur reprocher. Ni les juristes, ni les juges, en France, n'ont compris un seul instant quels seraient les effets de la suppression des frontières sur leurs professions et sur leurs offices, dans un pays installé dans une incurie politique, enfin reconnue par ceux qui en sont les auteurs. Le temps est venu de cette renaissance du Droit qui appartient aux juristes.
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LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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## L'abolition des frontières dans la création de la Loi, de la jurisprudence et de la doctrine La France, pays de grands juristes, a toujours su ce que représentaient ces trois éléments du droit positif, piliers de l'Etat de droit. Or, doucettement, l'origine et la forme de la loi ont évolué. La Loi est devenue plurielle, divisible, métissée, au sein d'une République qui se veut une et indivisible, et qui a, de plein gré, accepté de faire vivre le contrat républicain passé avec le citoyen selon une succession d'avenants communautaires qu'il suffisait de transposer à défaut de les avoir proposés. La transposition des textes européens, mode législatif transfrontière, majoritaire au sein des lois Françaises, se fait par ordonnances du gouvernement, ratifiées par le Parlement sans débat conclusif. Le contrôle, récent, des budgets des Etats soumis au pacte de stabilité ajoutera à l'interrogation du citoyen, qui sera invité à donner sa contribution à la recette collective comme une taxe répartie par des contrôleurs extérieurs. Pour bien comprendre le coté cocasse de l'histoire il faut revenir 60 ans en arrière. En 1955, la révolte poujadiste qui conduira plus de 50 députés à l'Assemblée élue en 1956, est née d'une taxation autoritaire de contrôleurs fiscaux, sur les recettes supposées de boulangers pâtissiers réputés fraudeurs. On sait jusqu'où cette révolte, aggravée par les convulsions de la guerre d'Algérie, a mené la France. Au bord de la guerre civile évitée de justesse par la mort de la 4ème République.
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LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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Revenons à nos lois. La longue tradition parlementaire française a pu vérifier que le processus de maturation des lois durables et appliquées appartient au long terme. Cette observation, légitimée par les aspirations des citoyens, s'oppose aux pratiques nées de la substitution de lois prêtes à voter, issues des travaux communautaires, aux lois votées après maturation d'un long débat national. Tout cela entraine une absence de synchronisation entre le pouvoir normatif du décideur européen et le pouvoir exécutif des gouvernements nationaux. Ce phénomène doit être mis en perspective en ce qu'il brouille le rôle du juge. L'instabilité législative affecte son travail, le rend opaque, incompréhensible aux yeux du justiciable duquel on ne peut pas exiger qu'il soit édifié sur les tenants et aboutissants des traités communautaires et de leurs conséquences sur son affaire. Au surplus, le juge national, ancienne « Bouche de la loi » de la constitution de 1958 est confronté aux difficultés d'interprétation de la loi déformée par une double perte de repères. A l'extérieur, ce sont ceux disparus avec la superposition des décisions de constitutionnalité nationale et de conventionnalité européenne. C'est compliqué mais en retenant sa décision, au risque d'agacer les plaideurs, le juge sait faire. L'abolition d'une frontière intérieure, celle qui séparait la loi existante de sa validité originelle, par la question prioritaire de constitutionnalité ajoute une incertitude dans la valeur des lois, dans la nature et la portée du contrôle. En pareil cas le juge devrait trouver secours auprès de la doctrine pour conforter sa jurisprudence. Hélas, qu'elle soit nationale ou européenne, la doctrine, qui a besoin du long temps de la réflexion documentée est plus troublée que toute autre par les abolitions de frontières qui se sont conjuguées depuis le début du 21ème siècle.
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LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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L\'abolition des frontières et le rôle des cours et des tribunaux de l\'ordre judiciaire. Le choix fait de résumer plusieurs chapitres de l\'ouvrage d\'analyse, duquel sont tirés ces extraits, en entraine un, arbitraire, de les classer selon les règles usuelles, chez les juristes, de la compétence, le lieu, la matière, la personne. Les lieux de formation des engagements et de traitement des litiges qu'ils entrainent. Dans le secteur de la consommation de masse, une grande partie de la population, spécialement les moins de 50 ans, ont pris l\'habitude des échanges transfrontières réalisés sur internet, les sites et applications qui y foisonnent, accessibles par les moteurs de recherches américains, selon des modèles juridiques qui leurs sont propres. Les engagements qui y sont souscrits laissent le minimum de traces sur la succession des opérations et l'accumulation des opérateurs mis en œuvre. Revenons à 1977 lorsque l'acquéreur d'un beau livre de collection pour un cadeau de Noel allait l'acheter chez son libraire favori. S'il se posait par la suite un problème de brochage qui se transformait en litige, il était facile de le plaider. La même acquisition chez Amazon, aujourd'hui, affectée du même problème, sera plus compliquée à traiter si le vendeur ne résout pas le litige à l'amiable. Autant à raison du coût pour le demandeur, que de la complexité et des incertitudes contractuelles. Les actions de groupe, leurs objectifs de transaction, forme judiciaire de la consommation de masse, peu familières de la culture juridique Française, contournent le juge. Dans les secteurs industriels et commerciaux de l'économie marchande globalisée la domination des méthodes et de la langue des Anglo saxons, ont généralisé la pratique des conflits transigés ou arbitrés selon des attributions de lieux et de droit pré souscrites qui écartent le juge national.
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Dans le secteur des opérations financières, la domination de la monnaie américaine, ajoutée aux méthodes et à la langue ont simplifiés les débats. Leurs tribunaux se sont approprié les litiges en s'attribuant une compétence de lieu, pour toutes opérations libellées en dollars, quel que soit le lieu de sa réalisation. Le juge national est out.
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LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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## La matière des conflits soumis au juge national. Personne ne peut nier que les plus importantes dispositions d'\'abolition des frontières ont été mises en œuvre, par l\'État, après l\'échec du référendum de 2005. Elles ont transformé les rapports de l\'économie de marché avec les tribunaux de l'ordre judiciaire. Lorsque l\'économie était administrée par l'Etat, les juges n'y mettaient pas le nez. La loi de tout le monde ne s'appliquait pas à l'Etat. Lorsqu'au milieu des années 80 a été préparé le retrait de l'Etat par les dénationalisations et le « big bang » de Bercy, l'administration a voulu garder la main sur l'économie restituée aux marchés, par la mise en place d'un système de Régulation. Il l'a fait en multipliant les autorités administratives indépendantes qui se sont attribué des compétences étendues sur les matières confiées aux juges. Comme un malheur n\'arrive jamais seul, l\'orientation naturelle des opérateurs de marché vers les pratiques du monde anglosaxon dominant, le traitement, par les juges, de la sanction, en toutes matières, civiles et commerciales, a cédé la place aux solutions de médiation, de conciliation et d\'arbitrage, préférées à celle du jugement. Enfin le développement d'opérations de très haute technologie, effectuées par des algorithmes et des automates, ont rendu certaines opérations suffisamment inaccessibles au cerveau humain, pour que la matière de leurs conséquences, échappe aux juges. Cette transformation de la matière civile dans la compétence des tribunaux de l\'ordre judiciaire, peu sensible parce que progressive, a orienté leurs rôles vers le domaine pénal, matière qui enferme le juge dans un triangle de contraintes insupportables, l'émotion populaire, les empiètements des médias, la manipulation de l'institution soit par l'une, soit par les autres.
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LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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## La personne du justiciable Dans un pays fermé au sein duquel chacun est identifiable, l\'abolition des frontières a tout bouleversé. Pour faire simple, cet extrait n'évoquera que 3 sujets. La naissance d\'une population de sans-papiers, aux papiers, volés, faux ou usurpés qui fait quotidiennement la une des médias, d'autant plus qu'ils nourrissent, à défaut d'être nourris eux-mêmes, les chroniques judiciaires, administratives et politiciennes. La naissance, au sommet de la pyramide sociale mondiale, de grands responsables de l'économie de la finance ou des ONG, de personnes titulaires de plusieurs nationalités, des passeports qui vont avec, et des lieux de résidences déconnectés de ce qu'ils sont et de ce qu'ils font. Avec le privilège de mettre leur patrimoine à l'abri des juges nationaux, et leurs actes à l'abri de leurs regards s'ils représentent des structures ou organismes non identifiables. L'affirmation d'un concept de Droits de l'homme, importé par l'abolition des frontières, qui se superpose aux dispositions du droit national en obligeant les magistrats des deux ordres, à accumuler les précautions pour ne pas s\'exposer, par des décisions maladroites, à la censure exigée par des défenseurs dont l\'essentiel des moyens sont fournis par des organismes transfrontières. La conjugaison de ces évolutions ont conduit les Etats à se défier de leurs systèmes judiciaires et à s'orienter, par le renseignement, vers le traitement administratif de certaines formes de criminalité.
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[ "michel rouger" ]
LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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## CONCLUSION Au terme de ce triptyque Economie, Droit, Justice quelles conclusions tirer ? Il est exact que le peuple français a un problème avec l\'abolition des frontières de son Hexagone. On peut admettre que les oppositions au modèle ouvert, antérieures à la révolution numérique et à l'arrivée de plusieurs milliards d'ordinateurs personnels à connexion planétaires, depuis 2007, ont fait rêver au retour au bon vieux temps. Il faut l'aider à comprendre que ces rêves sentent le cauchemar. On ne voit pas comment les petites poucettes d\'aujourd\'hui, qui ne peuvent pas vivre sans le lien permanent avec l'humanité numérisée accepteraient de ne plus regarder leur écran pour revenir vivre à l'abri du clocher de la force tranquille qui s\'est installée au pouvoir sans vision du lendemain. On ne voit pas plus comment ignorer les dégâts de l'abolition des frontières sur trois populations. Celle, jeune, que l'ouverture faite, à leurs parents, au temps des 30 glorieuses, pour rejoindre un pays attractif, dont la communauté nationale n'était pas prête aux efforts de leur intégration. Celle des 2 générations, parents et enfants, ravagés par le brutal déclassement de l'industrie française gérée en dépit du bon sens par l'Etat bureaucratique des années 80. Celle des ruraux, âgés, des villages et des cantons, les grands parents oubliés par les Bobos parisiens de la cour du Roi en 2000.
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[ "michel rouger" ]
LE DROIT, LE JUGE ET LES FRONTIERES
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Il semble que la classe politique découvre, lentement, que le chômage n'est qu'une seule partie des 3 problèmes, qui affecte chacune des 3 populations, depuis plus de 30 ans, avec l'excuse, typiquement française, résumée, il a plus de 20 ans par la célèbre formule « le chômage, on a tout essayé ». C'est faux ! La formation des jeunes et des adolescents, comme l'aménagement du territoire ont été négligés, pour ne pas nuire au clientélisme politique et à la distribution des prébendes. C'est pourtant par la que passe la solution qui permettra de faire vivre ensemble le mondialiste et le patriote autrement qu'en se délectant de caricatures et se gargarisant de mots qui annoncent tant de maux. Pour terminer, un texte - référence \* est disponible sur le site de PRESAJE www. presaje.com Il a dressé, en plein milieu de la crise financière récente, avant la présidentielle de 2012, les perspectives de sortie de crise pour les professions du droit et de la justice. 4 ans plus tard il se vérifie que le chemin défriché était le bon. Il faut continuer à le parcourir.
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fonds documentaire mrc
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[ "la maison des avocats" ]
INTERVIEW DE MICHEL ROUGER
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# INTERVIEW DE MICHEL ROUGER - LMDA Votre livre « Le récit de 40 voyages au temps du monde ouvert » (1974-2012) nous transporte, joyeusement, il faut le dire, tout autour de la terre : pour vous voyager c\'est vivre, découvrir, conquérir ? - Michel ROUGER En fait j\'ai toujours voyagé. Mes parents et mes grands-parents transporteurs m'emmenaient avec eux. Mon activité de tour opérating est née du fait que j'ai dû créer une agence de voyages pour satisfaire les clients de la Banque SOFINCO. Ces 40 voyages sont nés de la rencontre entre ce fait professionnel et l\'appréciation que je portais sur l\'évolution de notre pays après les événements de 1968. Le changement de génération correspondait à celui du comportement des dirigeants mondiaux après la visite de Nixon à Mao en 1972. La découverte d\'une population, de ses modes de vie, et de ce qui, dans ces autres pays, pouvait développer d\'autres comportements géopolitiques, y compris en France, ont nourri mes réflexions. - LMDA Le récit du voyage dans « La Californie reganienne » m'a particulièrement amusée puisque mon mari et moi y avons participé et je ris encore en pensant aux ciels de lit en miroir du Caesar's Palace... L \'Amérique de l\'Ouest vous est-elle aussi apparue comme un véritable nouveau monde ?
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[ "la maison des avocats" ]
INTERVIEW DE MICHEL ROUGER
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- Michel ROUGER La réponse est oui. Après retour à Paris, l\'option d\'une migration en Californie s\'est posée. L'évolution professionnelle était favorable, mais les études des enfants, en bonnes voies, n'étaient pas compatibles avec une migration dans un pays dont personne ne possédait la langue. Quoi qu\'il en fût, les perspectives de ce monde californien telles que nous les avons senties étaient pertinentes. Il s\'agissait bien d\'un Nouveau Monde. J'ai pu le vérifier 20 ans plus tard, en allant y travailler durant trois ans, sans migration. - LMDA A cette époque du voyage dans cet Ouest d'une autre civilisation, vous n'étiez pas Juge consulaire, même s'ils étaient majoritaires dans ce déplacement. Est-ce la fréquentation des membres du voyage de 1977 qui vous a amené à vous présenter aux élections consulaires. Parlez-nous de votre vie antérieure et de votre motivation d\'alors ?\ \
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[ "la maison des avocats" ]
INTERVIEW DE MICHEL ROUGER
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- Michel ROUGER La Californie 1977 a été un élément déclencheur de ma candidature aux fonctions de Juge consulaire. J\'ai retiré de ce voyage une relation fidèle et très amicale avec le président Fred. Juge respecté. De son côté le président de SOFINCO, juge lui-même, lointain neveu d\'un ancien président du tribunal des années 1830, a décidé de s\'en aller. Il m'a encouragé à devenir juge. Ce que j'ai fait en 1980. La candidature à la présidence ce fut une autre aventure. J'ai franchi le pas par goût du challenge. Depuis la fin de la guerre de 39 -45 l\'élection du président du tribunal se faisait de façon très classique par le choix binaire entre un commerçant fortuné et un financier juriste, aux compétences reconnues. Lors de l\'élection de 1991 deux de mes amis étaient candidats avec chacun la certitude d\'être élu. Il est évident que la seule chance que j\'avais d\'être élu, était d'apporter une double originalité. D\'abord dans la campagne électorale qui, au tribunal de Paris, voulait que les candidats traitent les électeurs en les recevant dans des locaux ou dans des réceptions, où ils montraient soit leur munificence soit leur compétence, voire les deux. J'ai choisi de visiter chaque électeur chez lui, ce qui n\'a pas manqué d\'étonner et qui a produit un effet manifeste dans la victoire obtenue. Ensuite, j\'avais pu étudier pendant les deux années précédentes quelles étaient les évolutions prévisibles de cette crise des années 90 qui s\'annonçait, à laquelle personne ne semblait attacher d\'importance alors qu\'elle mettrait le tribunal face à des décisions lourdes et compliquées. Ces choix ont été déterminants pour m\'assurer une victoire à laquelle je tenais, qui fut inattendue pour la plupart des collègues habitués au classicisme des décennies précédentes.
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2019-09-01
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[ "la maison des avocats" ]
INTERVIEW DE MICHEL ROUGER
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- LMDA Vous êtes élu Président du Tribunal de Commerce de Paris en 1991 : quels ont été les faits marquants de votre rôle de Président consulaire ? - Michel ROUGER Ils ont été très nombreux. De janvier 1992 jusqu'à janvier 1998, car j'ai ajouté à ma présidence consulaire, interrompue en juillet 1995, celle de la défaisance créée par le plan de sauvetage qui a évité la faillite du Crédit Lyonnais. Ce furent six années de grands troubles liés à la crise économique et financière que pronostiquée. L'économie collectivisée en 1982, baptisée Economie administrée, a entrainé un véritable effondrement du modèle économique français. J\'observe au passage que c\'est cette période qui a provoqué le déclin français contre lequel tout le monde cherche à lutter. Après l'avoir pronostiquée, je vais en produire une analyse détaillée et documentée dans un prochain ouvrage. Au cours de ces six années j\'ai connu six premiers ministres, deux Présidents de la République, une pléiade de ministres de l\'économie et de la justice. Avec des allers-retours politiques successifs qui ont abouti à la disparition du patrimoine de l'Etat, des 70 banques et compagnies d\'assurances qui avaient été nationalisées d\'abord en 45 puis en 82. L'industrie qui avait été très largement soutenue par le système des banques d\'État a dû s\'adapter à cette défaillance brutale. Face à cette situation j'ai choisi de limiter les liquidations judiciaires à celles qui étaient inévitable, l'essentiel étant traité par les moyens devenus d\'utilisation courante du règlement amiable par la pratique très étendue de la conciliation. Il est évident qu\'au cours de ces six années j\'ai rencontré la totalité des personnalités politiques financières et économiques en charge des responsabilités politiques administratives économiques ou financières de la quasi-totalité du système économique français.
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2019-09-01
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[ "la maison des avocats" ]
INTERVIEW DE MICHEL ROUGER
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- LMDA Il y a 10 ans, l'ANASED, composée d'avocats spécialistes du droit de l'entreprise, préconisait la création des Tribunaux de l'Economie en élargissant la compétence des juges consulaires à tous les Tribunaux économiques et ouvrant le rôle de juges consulaires aux agriculteurs, artisans et professionnels libéraux dont les avocats. Le Sénateur Philippe BAS, Président de la Commission des Lois du Sénat, a inclus cette rénovation dans la proposition n° 60 de la Commission d'information sur le redressement de la Justice. Le Sénat a approuvé et transmis cette proposition de loi à l'Assemblée Nationale. Pouvez-vous nous donner votre avis sur cette grande réforme d\'avenir ?
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2019-09-01
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[ "la maison des avocats" ]
INTERVIEW DE MICHEL ROUGER
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- Michel ROUGER Je suis d\'autant plus convaincu du nécessaire redressement de l\'institution judiciaire française que depuis maintenant 25 ans je fais vivre successivement les Entretiens de Saintes et l\'Institut PRESAJE, fusionnés en 2013. Ces organismes d\'études sociétales dont je conserve la responsabilité intellectuelle, ont débuté leurs travaux sur la Justice, le Droit et l'Economie par le Juge et le Paysan, déjà en révolte à cause de la PAC. Ils ont connu le succès avec « Jury or not Jury » travaux qui ont servi de base à la réforme de la Cour d'assises. Le dernier colloque du 25 juin 2019 a traité de l'Intelligence artificielle et de la Justice à la Cour de Cassation. Entre temps 30 colloques ont été tenus, suivis d'actes publiés. 20 ouvrages sur ces sujets Justice, Droit et Economie ont été publiés à Paris chez Dalloz, à Bruxelles chez Larcier. Les contributions de 350 éminentes personnalités des 3 mondes y figurent. En 2007, le colloque sur la Réforme de la Justice a conduit au « Serment de Saintes » auquel ont été associés les 2 ministres nominés pour figurer dans les futurs gouvernements des 2 candidats ! Je ne doute pas que, pour ses travaux, le sénat ait eu recours à cette documentation considérable. - LMDA Quels conseils donneriez-vous à un jeune avocat souhaitant se spécialiser dans le droit économique de l\'entreprise et des de ses difficultés ?
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fonds documentaire mrc
2019-09-01
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[ "la maison des avocats" ]
INTERVIEW DE MICHEL ROUGER
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- Michel ROUGER J'ai déjà donné la réponse au congrès de la FNUJA à Biarritz en 1994 en présence de J. Toubon, Ministre de la Justice devant lequel expliqué l'évolution de l'économie mondiale. L'économie régionale qui a besoin de cabinets qui formeront les jeunes au traitement des transactions commerciales dans un champ territorial réduit, soumis à un Droit et à une juridiction de types nationaux. L'économie communautaire au sein de laquelle opéreront des juristes multi-compétents partagés entre les juristes internes aux entreprises clientes, et les avocats des firmes intracommunautaires. Je les ai fréquentés les uns et les autres quand j'ai été président 2000-2002 de l'Union Européenne des Magistrats commerciaux. L'économie globalisée dont les activités juridiques et judiciaires sont entre les mains de grandes firmes d'avocats, le plus souvent d'origine Anglo-saxonne. Je les ai beaucoup fréquentées dans les affaires du de la défaisance du Crédit lyonnais qui avait semé des contentieux originaux dans 49 pays. L'objectif pour un jeune ambitieux sera de passer d'une économie à l'autre en réussissant sa promotion professionnelle par l'amélioration de ses compétences. L'avenir de ce métier sera aussi ouvert en 2030 qu'il l'était en 1990. Pas par le même chemin.
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école de paris
2009-01-26
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[ "michel rouger" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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# QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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école de paris
2009-01-26
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[ "michel rouger" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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## Introduction Pour juguler la crise financière qui a suivi la faillite de Lehman Brothers, le gouvernement français a lancé un vaste plan de soutien aux banques. L'intention n'était pas seulement de sauver le système bancaire, mais aussi de relancer le crédit, dont l'assèchement menace l'économie. René Ricol est nommé médiateur pour « fluidifier les relations entre les entreprises et les banques » et les préfets sont mobilisés. Les élus seront certainement sollicités par les entreprises en mal de crédits, et tentés de faire pression. Mais on sait que, quand le politique interagit de façon trop étroite avec le monde bancaire, on risque un périlleux mélange des genres, à l'origine par exemple de la débâcle du Crédit Lyonnais. Or, les banques françaises sont fragiles et les inciter à aller trop loin peut engendrer la catastrophe dans quelques années. Comment donc les stimuler pour qu'elles contribuent à la relance de l'économie sans les pousser au naufrage ? Que peut-on attendre raisonnablement des banques ? L'idée de cette soirée est née de l'ouvrage Rendre des comptes, nouvelle exigence sociétale, dirigé par Hervé Dumez et coédité par l'Institut PRESAJE (Prospective, recherches, études sociétales appliquées à la justice et à l'économie) et par Dalloz en octobre 2008\. Ce livre évoque l'impératif de rendre des comptes auquel sont désormais soumis juges, médecins, chercheurs, hommes politiques, gestionnaires... En pleine période de crise des subprimes, devenue une crise bancaire mondiale, il paraissait intéressant de se poser la même question à propos des banques, d'autant que différents gouvernements ont volé à leur secours en mobilisant pour elles des milliards d'euros. Comment vont-elles rendre compte de l'emploi de cet argent, et à qui ? Les banques ont déjà affaire à de nombreuses instances de régulation, qui fonctionnent plus ou moins bien. Les gouvernements sont-ils légitimes à leur imposer leurs propres exigences ?
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[ "michel rouger" ]
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Michel Rouger m'a communiqué un texte datant de 1802, dans lequel le troisième président des États-Unis, Thomas Jefferson, confie à son secrétaire au Trésor : « Je pense que les institutions bancaires sont plus dangereuses pour nos libertés que des armées entières prêtes au combat. Si le peuple américain permet un jour que des banques privées contrôlent sa monnaie, les banques et toutes les institutions qui fleuriront autour d'elles priveront les gens de toute possession, d'abord par l'inflation, ensuite par la récession, jusqu'au jour où leurs enfants se réveilleront sans toit sur la terre que leurs parents ont conquise. » Cette attaque en règle contre les banques ne s'applique pas forcément dans le contexte actuel, car les pouvoirs publics ont certainement une part non négligeable de responsabilité dans cette situation. En France, il y a quelques années, le Crédit Lyonnais a été fortement encouragé à accorder des prêts par l'État actionnaire, qui voulait en faire un instrument de sa politique industrielle. Quelques années plus tard, quand la situation s'est dégradée, l'État a laissé les banquiers se débrouiller face à la vindicte publique. Les relations entre banques et pouvoir politique sont complexes, car si les banques prêtent trop peu, la situation économique en pâtit, mais si elles prêtent trop, on peut aboutir à une débâcle doublée d'une crise d'endettement des États, et les politiques ne sont pas forcément les meilleurs appréciateurs de ce genre de risque.
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2009-01-26
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[ "michel rouger" ]
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En ces temps troublés, il est donc opportun de se demander ce que l'on peut légitimement et raisonnablement attendre des banques. Pour répondre à cette question, nous entendrons Michel Rouger, qui a été président du tribunal de commerce de Paris et a dû gérer la crise du Crédit Lyonnais entre 1992 et 1997 ; Patrick Pélata, qui nous parlera de la situation d'une industrie particulièrement exposée actuellement, l'automobile ; et Edmond Alphandéry, qui était ministre de l'Économie en 1993, et actuellement président de CNP Assurances et membre des conseils d'administration de plusieurs banques. ## EXPOSÉ de Michel ROUGER Entre l'été 1992 et l'été 1997, je me suis posé tous les jours, et parfois la nuit, la question qui nous réunit ce soir : « Que peut-on attendre des banques ? » Pour y répondre, il faut distinguer les deux acceptions du verbe attendre : « J'attends de vous » exprime une exigence ; « Je vous attends », une patience. C'est entre ces deux acceptions que sera tendu le fil de mon propos.
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[ "michel rouger" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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### La crise de 1992-1997 Ce que nous avons vécu entre 1992 et 1997 était, comme aujourd'hui, une crise des promesses de revenus. Cette crise avait commencé à la fin des années 1980, aux États-Unis et à Londres, dans l'immobilier de commerces et de bureaux. En France, elle a pris la forme d'une crise des promesses de revenus liée aux échanges de promesses de transactions immobilières quis'étaient mises à circuler en quantités industrielles. Dès son arrivée au ministère des Finances, Edmond Alphandéry a bloqué le système de circulation libre de ces promesses de vente, qui était devenu une sorte de titrisation inavouée et avait pris des proportions effarantes. Personne n'était capable d'évaluer l'étendue exacte des dégâts, mais André Lévy-Lang s'en est sans doute approché en estimant que le montant de cette titrisation s'élevait environ à 450 milliards de francs. Compte tenu du taux de décote important que l'on observe lorsque l'immobilier se retourne, le système bancaire s'avérait totalement incapable d'assumer le coût correspondant. La perspective des élections législatives prévues en mars 1993 et de l'alternance politique qui s'annonçait ne facilitait guère la gestion de la crise. Le tribunal de commerce s'est retrouvé en première ligne, car à partir de septembre 1992, plus personne, dans la classe politique, n'était en mesure de prendre les décisions qui s'imposaient. Or, la situation était grave : non seulement les banques, mais les trois principales compagnies d'assurance (l'UAP, le GAN et les AGF) étaient touchées.
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[ "michel rouger" ]
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### La patience Face à cet effondrement économique et politique, nous avons assez vite compris qu'il serait impossible de tout attendre des banques, et qu'il faudrait au contraire savoir les attendre, quelle que soit la pression de l'opinion publique. Or cette pression était très forte : les principales critiques se concentraient sur le Crédit Lyonnais, mais on assistait aussi à des règlements de compte idéologiques entre partisans et adversaires du concept de banque d'État. Nous étions convaincus que si nous pouvions laisser entre les mains des banques, pendant quelques années, l'énorme patrimoine immobilier qu'elles avaient acquis et pour lequel elles ne trouvaient pas d'acheteurs, nous parviendrions à dénouer la crise car la dénationalisation des compagnies d'assurance ferait émerger un nouveau marché immobilier. Nous avons réussi à retarder jusqu'au 30 juin 1995 la première mise en liquidation d'une banque significative, la Pallas Stern. Si cette faillite avait eu lieu deux ans plus tôt, elle aurait sans doute provoqué une vraie crise systémique, comme la faillite de Lehman Brothers en 2008. Mais en 1995, des balises avaient été placées au bon endroit et sa disparition n'a pas eu de conséquences graves. Le marché immobilier était d'ores et déjà en train de renaître de ses cendres. Des sociétés américaines se sont précipitées en France pour acheter des lots très importants, parfois sans se montrer très regardantes sur ce qu'elles acquéraient, immeubles ou simples créances. Le sangfroid et la capacité à attendre s'étaient révélés payants.
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[ "michel rouger" ]
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### L'exigence Dans le même temps, nous avons mis en œuvre le second volet de notre action, qui consistait au contraire à exprimer des attentes très fortes à l'égard des banques, mais dans un domaine très précis : la préservation de deux filières industrielles qu'il nous semblait indispensable de protéger. La première était celle des transports. La seconde, celle de la presse, dont dépendaient la publicité, l'imprimerie et l'industrie de la pâte à papier. Nous nous sommes montrés intransigeants sur ce point et nous avons imposé aux banques d'accorder tous les crédits nécessaires dans ces deux filières. Cela n'a pas été simple et il a fallu, dans certains cas, recourir à la coercition. Nous avons constaté que, dans ce genre de circonstances, les politiques nous laissaient largement la bride sur le cou : ils estimaient manifestement que l'imperium des juges serait plus efficace, face aux banques, que leurs propres pressions. ### La situation actuelle Pour sortir de la crise actuelle, il faudra également savoir utiliser le verbe attendre dans ses deux acceptions. La situation va sans doute évoluer plus rapidement que lors de la crise de 1992-1997 car, à l'époque, les décisions avaient été retardées par deux campagnes électorales successives, celle de 1993, puis celle de 1995. La très grande impatience de l'opinion publique peut cependant pousser les pouvoirs publics à se tromper dans le choix de leurs domaines d'intervention, et à exiger où il faudrait patienter, et patienter où il faudrait exiger. De son côté, le système bancaire, qui est aujourd'hui très éprouvé, ne comprendra peut-être pas toujours ce que l'on attend de lui et ne saura peut-être pas convaincre sur ce qu'il est en droit d'attendre des pouvoirs publics.
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[ "patrick pélata" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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# QU'ATTENDRE DES BANQUES ? Je vais illustrer les propos de mon prédécesseur par l'exemple de l'industrie automobile. Quel impact les aléas de l'économie financière peuvent-ils avoir sur l'économie réelle ou, en d'autres termes, comment Wall Street et Main Street interagissent-ils ? ## Les besoins de financement L'industrie automobile mondiale est durement frappée par la crise actuelle, car ses besoins de financement sont extrêmement importants et les banques ne sont plus en mesure aujourd'hui d'y répondre. Renault, par exemple, a besoin d'environ 4 milliards d'euros par an pour ses investissements et sa R&D. Cette somme est, en temps normal, couverte par l'autofinancement. Mais en période de croissance ou de récession, l'entreprise doit faire appel aux banques pour 25 % de ses besoins et au marché financier pour le reste. Renault a également besoin de ressources pour financer ses ventes. En Europe, nous vendons près de deux voitures sur trois à crédit, et dans un cas sur deux, nous accordons ce crédit nous-mêmes, à travers notre société financière, RCI-Banque. Cette dernière doit générer un flux de 9 milliards d'euros par an, dont 5 correspondent aux remboursements effectués par les clients, et 4 doivent être trouvés auprès des banques ou des marchés financiers.
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2009-01-26
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[ "patrick pélata" ]
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## Les constructeurs dans l'incapacité de se financer Or nous ne parvenons plus à trouver de ressources, ni auprès des banques, ni auprès des marchés financiers. Une agence comme Moody's, qui évalue les risques de non-remboursement des crédits, considère Renault comme une entreprise moyenne : si elle ne fait pas partie des junks, constructeurs auxquels aucune banque n'accepterait de prêter de l'argent, elle ne figure pas non plus en tête de tableau. Mais depuis octobre 2008, c'est l'ensemble des entreprises automobiles, quelle que soit leur cotation, qui ne parviennent plus à obtenir de crédits. Seule une poignée de constructeurs allemands et japonais ont réussi à trouver des fonds pendant quelques mois, puis la source s'est tarie. Ce blocage est lié, entre autres, au taux des Credit Default Swaps (CDS), les contrats financiers d'assurance à cinq ans destinés à garantir les crédits. Pour Renault, au début de 2007, le CDS était à 0,25 % de taux d'intérêt. À l'été 2007, il est passé à 0,50 %, puis à 2 % en mars 2008. Il a atteint 5,5 % en décembre 2008 et il est actuellement redescendu à 3,5 %. Ce taux d'intérêt signifie que le risque de défaillance présenté par Renault à cinq ans est estimé à 3,5 %. En principe, nous pourrions donc emprunter aujourd'hui à ce taux de 3,5 %, qui viendrait s'ajouter au taux interbancaire pour atteindre un niveau de 8 ou 9 %, ce qui représente un coût financier très élevé et permet difficilement de dégager des marges. N'ayant pas le choix, les constructeurs allemands qui ont réussi à emprunter ces derniers mois l'ont fait à des taux compris entre 7 et 9,5 %. Mais même à ces prix-là, nous n'avons pas trouvé de banque acceptant de nous faire crédit.
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2009-01-26
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[ "patrick pélata" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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## Les banques dans l'incapacité de prêter Faut-il pour autant incriminer les banques et les contraindre à investir dans l'industrie automobile, comme certains le demandent ? Cela paraît difficile, car elles sont soumises à des règlements qui leur imposent de réduire leurs prêts lorsque leurs actifs diminuent. Or,l'analyse de leur capitalisation boursière entre mi 2007 et fin 2008 révèle que cette capitalisation s'est effondrée. Il faut cependant souligner qu'en dépit de cette situation, les grandes banques françaises continuent pour l'instant d'honorer les lignes de crédit très importantes que Renault et sa société financière avaient contractées avec elles avant la crise, et ce pour des montants très importants (plus de 4 milliards d'euros pour Renault et plus de 5 milliards pour RCI-Banque). À l'exception de Fortis, pour des raisons que l'on peut comprendre, toutes ont tenu leurs engagements.
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2009-01-26
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[ "patrick pélata" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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## Le risque de l'industrie automobile La difficulté des constructeurs automobiles à trouver des crédits s'explique aussi par la mauvaise image globale de cette industrie. Parmi les entreprises que l'agence Moody's considère comme des junks, on trouve les trois constructeurs américains, General Motors, Chrysler et Ford, mais aussi Mitsubishi et Fiat jusqu'à une date récente. Selon le critère du Credit Default Swap, General Motors atteint en janvier 2009 le taux de 100 %, ce qui signifie que selon le marché, il existe 100 % de risque de défaillance à 5 ans, ce qui rend toute transaction assez improbable... Pour Ford, le taux est de 70 %, et pour Fiat, de 12,5 %. Si Fiat obtenait des prêts bancaires, le coût du crédit s'élèverait à 15 ou 16 % en y ajoutant le taux interbancaire : comment dégager suffisamment de marge brute pour faire face à des taux d'intérêt aussi élevés ? En dépit de quelques "bons élèves" comme Toyota, tout en haut du tableau, suivi par Honda, BMW et Volkswagen, l'image globale de l'industrie automobile est donc celle d'une industrie risquée : peut-on d'ailleurs continuer à parler de "risque" quand l'évaluation du taux de défaillance est de 100 % ? ## L'effondrement du marché De fait, le marché de l'automobile est en train de s'effondrer. Alors qu'il avait atteint 68 millions de voitures par an en 2007, il est tombé à 63 millions en 2008 et les tendances du dernier trimestre 2008 laissaient prévoir des ventes de 55 millions de voitures pour 2009. Tous les chiffres que nous collectons en ce moment nous conduisent à penser que la chute sera plus importante encore. Elle ira largement au-delà de ce que nous avons connu en 1995, en 1993, en 1981 ou en 1973\. La seule crise avec laquelle nous puissions établir des comparaisons pour le moment est celle de 1929.
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2009-01-26
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[ "patrick pélata" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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## Une industrie destructrice de valeur Les pertes considérables liées à la chute du marché sont encore aggravées par l'envolée des remises consenties aux acheteurs, dont l'augmentation a été quasiment linéaire depuis une douzaine d'années, et même pendant les cinq dernières années, où le marché se portait relativement bien. On observe également une part de plus en plus importante des ventes dites "tactiques". Les constructeurs ont toujours tendance à surestimer leurs futures ventes. Ils investissent en conséquence, puis, lorsque les résultats s'avèrent insuffisants, ils se mettent à raisonner en profit marginal et bradent leurs véhicules dans l'espoir de récupérer une partie de l'investissement. Ils abandonnent alors toute exigence de profit et donc de croissance durable. En Europe de l'Ouest, ces ventes tactiques sont passées de 25 % en janvier 2005 à 28 % en octobre 2008. Au total, sachant que les profits moyens des constructeurs automobiles sont de 4 à 5 % de marge opérationnelle et que la demande d'investissement est de 4 %, cette industrie ne réussit pas à produire de valeur ajoutée : elle détruit au contraire de la valeur. De fait, la capitalisation boursière de l'industrie automobile mondiale, qui avait légèrement augmenté pour passer de 440 milliards de dollars en mars 1999 à 500 milliards en décembre 2007, a perdu une centaine de milliards de dollars entre décembre 2007 et juin 2008, et encore entre 100 et 120 milliards depuis.
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2009-01-26
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[ "patrick pélata" ]
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## Les raisons de la crise de l'automobile La crise que traverse cette industrie est indubitablement l'une des conséquences de la crise des subprimes. Dans une situation de crise de confiance, les ménages renoncent en premier lieu aux dépenses significatives qu'ils peuvent reporter sans trop de dommage, et les achats d'automobiles en font partie. On observe d'ailleurs une étroite corrélation entre l'entrée en crise des différents pays et l'impact sur les ventes de voitures : aux États-Unis, cela s'est produit en janvier 2008 ; en Espagne, en février-mars 2008 ; au Royaume-Uni, en mars et avril 2008. Mais le problème a aussi des causes plus structurelles. Aujourd'hui, en Europe, les clients ont le choix entre 300 modèles de voitures, proposés par 39 marques différentes. Le poids des investissements correspondants et le coût des réseaux commerciaux qui distribuent ces marques sont colossaux. L'industrie automobile européenne est manifestement arrivée à un point où elle ne peut plus continuer à faire vivre autant de constructeurs. Il en va de même aux États-Unis. General Motors, qui est en très mauvaise santé depuis 7 ou 8 ans, a accumulé un total de 60 milliards de dollars de dettes et consomme actuellement 2 à 3 milliards de dollars par mois, soit l'équivalent de sa capitalisation boursière. Une telle situation n'est pas tenable. Si l'industrie automobile veut à nouveau avoir accès au crédit et retrouver un mode de fonctionnement normal, il n'y a pas d'autres solutions pour elle que de réduire le risque qu'elle représente aux yeux des banques. La crise actuelle doit servir à "faire le ménage", dans une industrie dont les fondamentaux sont sains (à l'échelle de la planète, seulement un tiers du besoin de mobilité est satisfait) mais qui doit aussi savoir se transformer en profondeur.
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2009-01-26
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[ "patrick pélata" ]
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## Qu'attendre des banques ? Pour expliquer ce que nous attendons des banques, je m'appuierai sur quatre expériences que j'ai vécues de plus ou moins près. En 1999, les banques japonaises ont opposé un refus net et définitif à tout nouvel emprunt de la part de Nissan, et ont obligé ce constructeur à trouver de l'argent auprès d'une autre entreprise mondiale. C'est de ce refus, inhabituel chez les banquiers japonais, et appuyé par le gouvernement japonais de l'époque, qu'est née l'Alliance entre Renault et Nissan. Mon deuxième exemple s'est également déroulé au Japon, au moment où Mitsubishi Motors manquait cruellement de fonds. La Mitsubishi Bank s'était opposée à toute nouvelle avance et nous étions en train d'envisager ensemble une restructuration partielle du groupe. Les négociations se présentaient bien, jusqu'au moment où, à l'issue d'une lutte interne au sein du keiretsu Mitsubishi, la Mitsubishi Bank a dû céder, et ce sans le moindre plan de restructuration. Depuis, Mitsubishi Motors ne fait que survivre avec beaucoup de difficultés. En 2002, les banques italiennes ont obligé Fiat à se restructurer et l'ont aidé à le faire. L'entreprise a réussi à rembourser ses dettes et à retrouver l'équilibre, en tout cas jusqu'au début de la crise actuelle.
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2009-01-26
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[ "patrick pélata" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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Dernier exemple, en 2000, les banques américaines et les marchés financiers ont accepté de prêter 40 milliards de dollars à General Motors, alors que cette entreprise était déjà en piètre état. Depuis, elle n'a fait qu'aggraver ses pertes. Pour avoir conduit des négociations entre Renault et General Motors pendant l'été 2006, j'ai pu constater que dès cette date, il y avait besoin de changements profonds pour sauver l'entreprise, mais qu'ils n'étaient pas engagés.Ce que nous pouvons attendre des banques aujourd'hui au regard de ces quatre exemples, c'est qu'elles reviennent à leur rôle primordial : analyser l'état d'une industrie et l'état d'une entreprise donnée au sein de cette industrie, évaluer avec le plus de discernement possible le risque présenté par cette entreprise et en déduire la possibilité ou non de lui prêter de l'argent à un taux raisonnable. En recourant au système financier, beaucoup plus large et complexe et beaucoup moins régulé que le système bancaire, nous avons perdu une partie des vertus qui reposaient sur un lien étroit entre ceux qui estimaient le risque des entreprises et ceux qui prêtaient l'argent. Aujourd'hui, ce lien est partiellement rompu et les risques ne sont plus correctement évalués. Il faudrait en finir avec les comportements moutonniers qui conduisent à ranger toutes les entreprises d'une industrie donnée "dans le même sac", attitude qui aggrave la crise systémique. Les banques devraient au contraire intervenir avec perspicacité pour pousser cette industrie à entreprendre les transformations, restructurations ou alliances qui lui permettront de sortir de la crise.
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2009-01-26
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[ "edmond alphandéry" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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# QU'ATTENDRE DES BANQUES ? Les banques connaissent actuellement une situation contrastée. Certaines sont en faillite, comme Lehman Brothers, ou en quasi-faillite, comme Royal Bank of Scotland qui, sans l'appui de l'État, serait en liquidation. D'autres sont dans un piètre état comme Fortis, Dexia ou City Group. Mais d'autres sont en bonne santé. Cependant le secteur bancaire est globalement dans un état préoccupant. Les interventions massives des banques centrales et des pouvoirs publics en sa faveur ne réussissent pas à apaiser les inquiétudes sur sa capacité à faire face à ses obligations vis-à-vis de l'économie. D'aucuns estiment même que les banques vont contribuer à plonger l'économie dans une situation aussi grave que celle que nous avons connue pendant la grande crise de l'entre-deux-guerres.
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2009-01-26
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[ "edmond alphandéry" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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## Un problème moral ? Comment en est-on arrivé là ? Il est évident qu'un nombre d'erreurs ont été commises par les banques elles-mêmes, en particulier dans les activités de marché. Beaucoup de banques ont commercialisé des produits de type CDO (Collateralized Debt Obligations, obligations adossées à des dettes) ou CLO (Collateralized Loan Obligations, obligations adossées à des prêts), sans mesurer pleinement les risques qu'elles encouraient, ou faisaient courir à ceux à qui elles vendaient ces produits, en cas de rupture brutale des conditions de marché. La course à la rentabilité les a incitées à tenter d'atteindre par tous les moyens au moins 15 % de taux de rendement des capitaux. De nombreux excès ont été commis en matière de bonus. Le Herald Tribune citait, il y a quelques jours, le cas d'un trader qui avait perçu en 2007 une rémunération fixe de 350 000 euros, et une rémunération variable 100 fois plus importante, soit 35 millions d'euros. Nous sommes confrontés à un problème d'éthique que nous aurions tort de sous-estimer. Ce problème a été soulevé dès le début de la révolution industrielle, par le père de l'économie politique, Adam Smith, auteur de La Richesse des nations mais également de la Théorie des sentiments moraux. Toute l'histoire de la pensée économique est traversée par cette idée que l'échange économique ne peut reposer que sur la confiance et que cette confiance se construit par le respect de certaines règles de comportement. Sans doute faudrait-il enseigner à nouveau ce genre de chose dans nos écoles de management. Cependant, réduire cette crise à un problème moral, qui est réel mais ne date pas d'hier, serait passer à côté de l'essentiel.
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2009-01-26
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[ "edmond alphandéry" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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## Un phénomène systémique Plus fondamentalement, nous assistons à un phénomène cyclique comme le système bancaire en a connus tout au long du XIXe et du XXe siècle, mais d'une telle violence que les forces de rappel classiques ne jouent plus. Nous sommes dans une crise systémique. L'ensemble des médias a tendance à traiter les banques comme des boucs émissaires, mais même si elles ont naturellement joué un rôle dans ce phénomène, on peut penser qu'elles ont été entraînées par une mécanique d'ensemble beaucoup plus qu'elles n'en ont été le moteur. Cette mécanique se caractérise par quatre grands facteurs qui se sont renforcés mutuellement. ### La volatilité de la politique monétaire Le premier est l'extraordinaire volatilité de la politique monétaire américaine depuis une quinzaine d'années. Entre 1998 et 2000, la Banque fédérale de réserve a fait monter les taux d'intérêt à 6,5 %. En 2004, ils étaient redescendus à 1 %. À la fin de 2007, ils étaient remontés à 5,25 %, avant de redescendre aujourd'hui à 0 %. Certes, pendant toute cette période, on n'a pas observé d'inflation : la croissance s'est poursuivie en dépit du choc du Nasdaq, des attentats du 11 septembre ou de la crise asiatique. Mais si l'inflation a été contenue, en particulier par la concurrence internationale et par la pression sur les prix liée à la mondialisation, les taux d'intérêt très bas imposés par la Banque fédérale pendant quatre ans n'en ont pas moins alimenté une formidable bulle spéculative et ont créé une situation artificielle sur le marché immobilier comme sur le marché des actions.
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[ "edmond alphandéry" ]
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### Le déséquilibre de la balance des paiements Le second phénomène, corollaire du premier, est le spectaculaire déséquilibre de la balance des paiements américaine, provoqué par la politique monétaire mais aussi par la reconstitution d'une pseudo-zone dollar à travers le monde, notamment avec les pays asiatiques. Jamais ce déséquilibre n'avait atteint de telles proportions. Il a naturellement gonflé le volume des liquidités dans le monde et a énormément contribué à la déstabilisation de l'économie. ### La titrisation des crédits Cette très grande aisance monétaire a été encore accentuée par les effets de levier mis en place sur les marchés financiers. À l'époque où les taux d'intérêts étaient très bas, il fallait en effet doper les rendements. De leur côté, les banques se sont lancées dans une politique de crédit à taux très bas sur de longues périodes, et ont parallèlement mis d'énormes volumes de crédits sur le marché sous la forme de produits extrêmement complexes et dangereux de type CDO ou CLO, qui ont encore augmenté le volume d'actifs. ### L'insuffisance de la régulation Le quatrième facteur a été l'insuffisance ou même l'absence de régulation du système financier aux États-Unis. Des organismes de crédits hypothécaires ont été incités par les pouvoirs publics à prêter à des ménages à peine solvables, à la grande satisfaction de ces derniers qui voyaient la valeur de leur acquisition augmenter continuellement du fait de la faiblesse des taux d'intérêt. Certains demandaient même le remboursement de leur première hypothèque pour en contracter une seconde sur un montant encore plus important.
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[ "edmond alphandéry" ]
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## La fin de la confiance Cette absence de régulation a conduit à la crise des subprimes, qui a joué le rôle de détonateur d'une crise financière générale : la prise de conscience que de très nombreux crédits avaient été accordés à des ménages insolvables a ébranlé la confiance. Bien avant la faillite de Lehman Brothers en 2008, s'est produit en août 2007 un événement dont la portée devait être énorme et qui a été sous-estimé : les banques ont soudain cessé de s'accorder des prêts les unes aux autres sur le marché interbancaire. Chacune, découvrant la proportion de produits toxiques présents dans son bilan, a compris qu'il en allait probablement de même chez ses concurrentes, et la confiance a disparu ; elle n'est toujours pas complètement revenue à l'heure actuelle. La crise financière a naturellement débouché sur une crise de l'économie réelle : Patrick Pélata nous a présenté un sombre tableau de l'industrie automobile et nous vivons dans la hantise d'une déflation comme celle qui a sévi en 1929. ## Les remèdes à court terme Pour faire face à cette crise, il existe quatre remèdes à court terme ; seul le quatrième concerne directement les banques.
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[ "edmond alphandéry" ]
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### Lutter contre la déflation Il faut tout d'abord alimenter l'économie en liquidités. Compte tenu du risque systémique qu'entraînerait la faillite du système bancaire, les banques centrales doivent alimenter le marché monétaire et abaisser les taux d'intérêt, et les États doivent apporter leur garantie au système. Mais faut-il pour autant abaisser les taux d'intérêt jusqu'à zéro ? Je n'en suis pas convaincu. Le président de la Réserve fédérale des États-Unis, Ben Bernanke, qui est un universitaire et a beaucoup étudié la crise de 1929, a mesuré la responsabilité des autorités monétaires américaines de l'époque dans l'aggravation de cette crise : en refusant d'alimenter suffisamment les banques en liquidités, elles avaient provoqué des faillites en chaîne, ce qui avait comprimé la quantité de monnaie disponible. Ben Bernanke vit dans cette obsession. Il en exposait déjà les risques lors d'un discours qu'il a prononcé en 2004 et qui est resté célèbre ; c'est la raison pour laquelle la Banque fédérale a tant tardé à ramener les taux d'intérêt à des niveaux raisonnables. ### Relancer l'économie Il faut également élaborer des plans de relance budgétaires, tout en restant vigilant sur le risque souverain : si des pays comme la Grèce, l'Irlande ou le Royaume-Uni commencent à avoir du mal à emprunter, nous risquons de nous retrouver dans une impasse vraiment dramatique.
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[ "edmond alphandéry" ]
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### Résister à la tentation protectionniste La troisième réponse est la lutte contre la tentation protectionniste. La crise de 1929 a connu un tournant dramatique lorsque les Américains ont érigé des barrières douanières : les autres pays ont répondu par des mesures de rétorsion, ce qui a contracté le commerce mondial et s'est avéré dévastateur pour la croissance et pour l'emploi. Aujourd'hui, j'observe deux indices inquiétants à cet égard. Dans son communiqué de novembre, le G20 s'était engagé àreprendre le cycle de Doha avant la fin de l'année, ce qu'il n'a pas fait. Par ailleurs, l'aide massive accordée par l'État américain à son industrie est un signal donné aux Européens pour en faire autant, ce qui constitue la première étape du protectionnisme. ### Isoler les actifs toxiques Mais la mesure la plus importante de toutes consiste à contraindre les banques à "nettoyer" leur bilan, seule solution pour rétablir la confiance. Pour y parvenir, ni le plan Paulson, ni le plan de Gordon Brown ne me paraissent pleinement appropriés. Il faudra sans doute revenir aux bonnes vieilles méthodes, que nous avons utilisées par exemple en 1993 : créer des structures de défaisance pour isoler les actifs toxiques des banques les plus touchées. Les banques allemandes ont évalué le volume de leurs actifs toxiques à 800 milliards d'euros, ce qui donne une idée de la gravité du problème et de l'effort à consentir. Les structures de défaisance sont très coûteuses et nécessiteront l'intervention de la puissance publique, qui en retour devrait avoir son mot à dire sur les modalités du redressement des banques. Cette tâche est très impopulaire et c'est la raison pour laquelle tout le monde hésite à l'entreprendre, mais le retour de la confiance est à ce prix.
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[ "edmond alphandéry" ]
QU'ATTENDRE DES BANQUES ?
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## Les chantiers à plus long terme Il existe aussi des réponses à plus long terme, comme la réforme des agences de notation, où l'on a découvert d'inquiétants conflits d'intérêts ; la création d'une instance de supervision, pour les banques qui exercent des activités dans divers pays ; une meilleure régulation des banques avec, par exemple, la création d'un nouveau ratio leur imposant de disposer de fonds propres plus importants. La plupart de ces chantiers sont déjà ouverts, avec des degrés d'avancement inégaux. ## Conclusion La crise que nous connaissons est à la hauteur de la période de très grande et belle croissance que nous avons connue ces dernières années. Les volumes de liquidités dont nous disposons devraient nous permettre de la surmonter assez rapidement : je ne suis pas pessimiste à cet égard, sauf si une montée brutale du protectionnisme devait retarder le processus. Je suis plus inquiet sur la façon dont nous gèrerons la phase d'inflation qui ne manquera pas d'intervenir à la sortie de la crise, au moment où l'on prendra conscience que le volume de liquidités est trop important. Il faudra alors faire remonter les taux d'intérêt, et de nouvelles perturbations, peut-être encore plus graves, seront alors à redouter.
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
DÉBAT
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# DÉBAT ## Le pouvoir de dire non - Un intervenant L'exposé de Patrick Pélata a montré à quel point l'industrie automobile avait besoin du soutien de l'État et des banques, mais les exemples qu'il a cités en finissant valorisaient surtout leur pouvoir de dire non. N'y a-t-il pas là un paradoxe ? - Patrick Pélata Si nous ne trouvons pas auprès des banques ou des marchés financiers l'argent dont nous avons besoin pour faire tourner l'entreprise, il ne nous reste d'autre choix que de cesser notre activité ou de demander de l'aide aux pouvoirs publics, ce que nous sommes en train de faire. Mais si tous les gouvernements apportent leur aide en même temps à tous les constructeurs, la nécessaire transformation de cette industrie risque de ne pas s'opérer. Nous nous trouvons dans une situation un peu particulière où nous devons à la fois obtenir ces financements publics et ne pas reculer devant les changements qui nous permettront de sortir réellement de la crise. Nous estimons que la filière française est relativement bien armée pour effectuer cette transition, car nous avons pris une certaine avance sur la réduction des émissions de CO2 et aussi sur la conception de nouveaux circuits de distribution.
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
DÉBAT
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## Le rôle de l'Europe - Un intervenant L'Europe peut-elle inciter ses membres à résister à la tentation protectionniste ? - Michel Rouger Parmi les principaux pays européens, le Royaume-Uni est au bord de la faillite ; l'Allemagne se tourne de plus en plus vers l'Est car elle songe à ses futurs clients ; et la France ne va pas trop mal mais ne peut pas faire grand-chose seule. - Patrick Pélata Sans l'euro, la catastrophe aurait été multipliée par dix. La livre sterling ayant perdu 30 à 40 % de sa valeur, les industriels britanniques qui enregistraient des profits de 3 à 4 % n'ont plus qu'une chose à faire : cesser toute activité et attendre que les prix remontent. Le fait d'avoir une monnaie commune nous oblige à nous comparer sans cesse et à nous fédérer. Les constructeurs européens sont par exemple en train de se concerter pour demander à leurs gouvernements des mesures communes. De son côté, la Banque européenne d'investissement s'apprête à intervenir sur l'ensemble de la filière automobile européenne, à hauteur de 4 à 5 milliards d'euros, sous la forme de prêts bonifiés à 4,5 % destinés à financer les investissements en faveur de la réduction des émissions de CO2, ce qui permettra de consolider l'avance européenne dans ce domaine. L'Europe est un atout majeur pour traverser cette crise. - Edmond Alphandéry La Banque centrale européenne a joué un rôle très positif dans la réponse à la crise, et l'euro a effectivement démontré sa solidité. Il appartiendra également à l'Europe, qui siège à l'OMC (Organisation mondiale du commerce), de s'opposer à ce que certains pays prennent unilatéralement des mesures protectionnistes.
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
DÉBAT
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## Emprunter ou recapitaliser ? - Un intervenant On ne peut que frémir en entendant Patrick Pélata évoquer des taux d'emprunts à 15 ou 16 %. Pourquoi ne pas recapitaliser les entreprises plutôt que leur accorder des prêts ? Il vaut beaucoup mieux distribuer des dividendes que payer des intérêts. - Patrick Pélata De même que le corps humain meurt d'un arrêt cardiaque, l'entreprise meurt d'un manque de cash. Pour survivre, elle doit donc se procurer des liquidités à n'importe quel prix et sous n'importe quelle forme, emprunts, obligations, etc. Si la situation se prolonge, il faut trouver d'autres solutions. Mais on ne peut pas envisager une augmentation de capital simplement pour payer des dettes : une augmentation de capital ne peut réussir que quand on dispose d'un projet stratégique solide. Nous n'en sommes pas encore là aujourd'hui, et nous devons tenir jusqu'au moment où nous pourrons mettre en place un tel projet. ## La faute des banquiers - Un intervenant Je suis choqué de voir comment l'on prend la défense des banquiers. Ils ont rendu solvables des gens qui ne l'étaient pas et ils ont revendu des dettes au lieu d'assumer les risques qu'ils avaient pris. En d'autres termes, ils ont trahi leur métier, et ils appellent aujourd'hui le contribuable au secours. Il ne s'agit pas de désigner des boucs émissaires, mais d'admettre que ceux qui ont commis des fautes doivent être sanctionnés. - Edmond Alphandéry Je suis d'accord avec vous, et un certain nombre de mesures vont d'ailleurs être prises pour corriger les abus. On estime par exemple que les bonus devraient être calculés non seulement sur les résultats d'une année, mais sur ceux des années suivantes. Cela dit, il serait vain de penser qu'il suffirait de punir les banquiers pour résoudre le problème. Il vaut mieux les aider à mettre en place un système qui fonctionnera convenablement.
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
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- Michel Rouger En 1992, les difficultés rencontrées par le Crédit Lyonnais risquaient de provoquer 40 000 suppressions d'emplois dans des entreprises où cette banque détenait des participations. Pour nous, sacrifier ces 40 000 emplois était totalement exclu, quelle qu'ait été la responsabilité du Crédit Lyonnais. Comme je le disais à l'époque : « Ma mission consiste à sauver des actifs, pas à condamner des fautifs. » La sanction relève de la justice pénale. On cherche des débiteurs solvables - Un intervenant Les banques françaises ne vont pas si mal qu'on le dit, même si Dexia et Natixis ont eu quelques ennuis. Je suis un peu choqué de voir le gouvernement français offrir des fonds aux banques et leur demander d'accorder plus de crédits à leurs clients. Le président Rouger sait comment le tribunal de commerce réagit lorsque les banques accordent des crédits abusifs. Le système bancaire français ne manque pas de fonds propres : il manque de clients solvables. C'est la raison pour laquelle le Crédit Agricole vient de refuser un nouveau prêt que l'État voulait lui accorder.
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
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## La dette américaine - Patrick Pélata Ne peut-on considérer que la cause majeure de la crise est la dérive inouïe de la dette américaine ? Quand on additionne les dettes de l'État fédéral, du système de santé, des collectivités locales, des ménages, des entreprises et des banques, on obtient 8 fois le PNB (Produit national brut) des États-Unis. Ce pays a construit toute sa croissance sur l'argent des autres : comment pourra-t-il rétablir l'équilibre ? Je crains que cette crise ne dure longtemps, car le réservoir des dettes à vider avant que le marché américain puisse recommencer à consommer est énorme. - Michel Rouger Ce chiffre me paraît un peu surévalué ; parler de 3 à 4 années de PNB serait sans doute plus proche de la réalité. - Edmond Alphandéry L'état de l'économie américaine est à l'évidence déterminant pour l'avenir de l'économie mondiale. Je ne suis pas certain que le plan de relance très ambitieux de Barack Obama aille dans le bon sens : il risque d'aggraver encore les déséquilibres qui sont à l'origine des difficultés actuelles. Selon un expert de la Banque des règlements internationaux, il vaudrait mieux que ce soient les pays qui disposent de surplus, comme le Japon, la Chine ou l'Allemagne, qui tentent de relancer l'économie.
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
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## Le rôle des pays émergents - Un intervenant Les besoins de financement des États-Unis sont considérables, sans parler de ceux des autres pays. Qui d'autre que la Chine pourrait faire face à une telle demande ? - Un intervenant Henry Kissinger a récemment déclaré qu'un nouveau Bretton Woods serait souhaitable, avec le dollar pour monnaie de référence, et en donnant la priorité aux relations entre les États-Unis et la Chine afin de permettre de refinancer le système américain. À aucun moment, il n'a évoqué l'Europe, ni l'euro. Comment parer le risque de voir le monde gouverné par un G2 ? - Patrick Pélata Le PIB de la Chine équivaut à celui de la France et représente un dixième du PIB des États-Unis et de l'Europe réunis. De plus, ce PIB correspond essentiellement à des exportations, car la consommation intérieure reste très faible. C'est une illusion de croire que la Chine pourrait nous sortir de nos difficultés actuelles. - Edmond Alphandéry Les pays émergents sont eux aussi emportés par la tourmente actuelle, mais à moyen et long terme, il est évident que ce sont eux qui offriront le plus grand potentiel de développement. Si nous sortons de la crise actuelle, ce sera donc probablement grâce à la Chine, mais aussi à l'Inde, au Brésil et peut-être même à la Russie. ## L'impact sur les finances publiques - Un intervenant À supposer que la Chine ou tout autre pays puisse répondre aux besoins financiers des États-Unis et des autres pays emprunteurs, quel sera l'impact sur leurs finances publiques ?
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
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- Edmond Alphandéry Une phase de forte inflation est sans doute inévitable. Le pays qui épargne le plus actuellement est la Chine ; le Japon épargne un peu moins qu'autrefois, de même que les pays producteurs de pétrole, dont la rente commence à s'épuiser. Ce sont ces pays qui, jusqu'ici, ont financé le déficit américain. Pour sortir de la crise, il faudrait qu'ils se mettent à consommer, mais s'ils le font, leur épargne risque de manquer au moment où nous en aurons le plus besoin. Les plans de relance actuels représentent des engagements énormes, qui vont s'ajouter aux engagements antérieurs, notamment sur les retraites, et accroître de façon démesurée l'emprunt public. L'expérience prouve que le seul moyen connu d'effacer ce genre de dettes est l'inflation. - Un intervenant Pourrait-il se faire qu'un jour, les États-Unis ne trouvent plus à emprunter ? - Edmond Alphandéry Nous serions alors dans la catastrophe absolue. Mais personne n'a intérêt à voir l'économie américaine s'effondrer, car elle constitue le pilier du système capitaliste. D'ailleurs, l'un des paradoxes actuels est que plus l'économie américaine s'endette, plus elle attire des capitaux. Les gens ne savent plus où placer leur argent ; ils se sont détournés de la Bourse et de l'immobilier et se précipitent vers ce qui leur apparaît le plus sûr : les bons du Trésor américain, dont les taux d'intérêt n'ont jamais été aussi bas depuis dix ans, et qui se vendent pourtant comme des petits pains. - Un intervenant L'incendie actuel est très grave et on a raison de déverser des trombes d'eau pour l'éteindre, mais il faudra ensuite éponger, et l'eau provoque parfois autant ou davantage de dégâts que le feu...
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
DÉBAT
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## Les bons élèves - Un intervenant À force de vouloir sauver les mauvais élèves, on risque de fragiliser les bons, car les institutions qui se sont bien comportées ne reçoivent pas les mêmes aides que celles qui ont fauté. Cela ne pose-t-il pas un problème de respect de la concurrence ? - Edmond Alphandéry Il est évident que la garantie généralisée que les États ont décidé d'apporter aux banques pose un grave problème. Actuellement, plus aucune banque ne peut faire faillite ! Il faudra sortir de cette situation au plus vite, car elle est en effet contraire au principe de la concurrence. - Patrick Pélata Nous avons l'espoir que des pays déjà très endettés ne pourront pas soutenir indéfiniment l'ensemble de leur industrie, et qu'une régulation économique va se mettre en place. Ceci nous oblige en retour à nous assurer de faire partie des bons élèves ! Lors de la Grande dépression, on a observé trois grands pics de défaillances d'entreprises. Celles qui n'étaient pas en bonne santé ont chuté dès 1930\. Celles qui ne s'étaient pas préparées à une crise longue n'ont pas survécu à 1932. Mais le pic le plus important s'est produit en 1935, c'est-à-dire au moment de la reprise : certaines sociétés ont manqué de trésorerie, d'autres n'ont pas su s'adapter aux nouveaux besoins des consommateurs. Nous devons garder à l'esprit cette leçon de l'histoire.
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
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## Présentation des orateurs : Edmond Alphandéry : est président de CNP Assurances depuis 1998 ; entre 1993 et 1995, il a été ministre de l'Économie dans le gouvernement d'Édouard Balladur ; il est diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris et agrégé d'économie politique ; il est membre des conseils d'administration de CALYON, GDF SUEZ, ICADE ; il est également président du Centre des professions financières et vice-président de la section française de la Commission Trilatérale. Patrick Pélata : diplômé de l'École polytechnique et de l'École nationale des Ponts et Chaussées, est titulaire d'un doctorat en socioéconomie de l'École des Hautes Études en Sciences Sociales de Paris ; il entre chez Renault en 1984 comme chef d'atelier à l'usine de Flins ; de 1985 à 1998, il occupe différentes positions à la Direction des études ; il devient directeur du développement de l'Ingénierie Véhicule en 1998 et entre au comité de direction Renault ; en 1999, il rejoint Nissan à Tokyo en tant que directeur général adjoint en charge du Plan, du Produit, du Design et des Programmes et membre du comité exécutif et du conseil d'administration de Nissan ; le 1er juillet 2005, il est nommé directeur général adjoint Plan, Produit, Programmes du groupe Renault et membre du comité exécutif Groupe ; le 13 octobre 2008, il est nommé directeur général délégué aux opérations de Renault.
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2009-01-26
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[ "michel rouger", "patrick pélata", "edmond alphandéry" ]
DÉBAT
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Michel Rouger : après une carrière dans le transport, il participe à la création et au développement de la Banque Sofinco (1956-1984), comme directeur de l'exploitation et des risques ; en 1985, il rejoint le groupe Suez ; juge au tribunal de commerce de Paris depuis 1980, il en devient président de 1992 à 1995 ; président du Consortium de réalisation (CDR) de 1995 à 1998, il entre comme conseiller auprès du président de la banque ABN AMRO, et développe ses activités d'arbitre (médiateur et d'administrateur indépendant) ; il est aussi en 1996 président des Entretiens de Saintes (justice et société), en 2002 président de l'Institut PRESAJE, membre du conseil de l'Association internationale de droit économique et en 2006, président du Conseil de modération et de prévention (santé/alcool).
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institut présaje
2002-09-01
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[ "xavier lagarde", "agnès valentin", "florence richard" ]
TRAVAIL ET VIE PROFESSIONNELLE
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# TRAVAIL et VIE PROFESSIONNELLE La maison des avocats a accueilli le premier débat par lequel devaient s'ouvrir, dans l'esprit prospectif propre à la démarche PRESAJE, les perspectives du passage du droit du travail modèle XXème siècle vers le droit de la vie professionnelle modèle XXIème siècle ## Xavier LAGARDE, professeur agrégé de droit Xavier LAGARDE met en évidence l'état d'extrême complexité d'un système normatif qui reste construit sur le taylorisme et la subordination du faible au fort. Il rappelle que la base de ce droit repose sur le concept de temps fourni par le salarié à la subordination qu'il subit et que les innombrables contraintes, dérogations, exonérations, protections imposées par les réalités économiques ont encore plus compliqué le fonctionnement d'une mécanique légale qui connaît avec la loi sur les 35 heures le degré extrême de difficulté. La croissance, le développement des sociétés humaines, l'imagination et l'innovation qu'elles développent, trouvent leurs origines dans des structures économiques simples, souples, transformables, au sein desquelles les rapports professionnels ne reposent plus sur le triptyque salariat, hiérarchie, subordination, mais sur celui de créativité, coopération, rémunération qui pousse à l'éclatement des structures hyper-centralisées.
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institut présaje
2002-09-01
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[ "xavier lagarde", "agnès valentin", "florence richard" ]
TRAVAIL ET VIE PROFESSIONNELLE
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## Agnès VALENTIN, directeur adjoint des ressources, humaines de Sofinco forte de son expérience de terrain, Agnès VALENTIN confirme à quel point il est indispensable de réviser les concepts de notre droit. Elle met en évidence les obligations d'équilibre et d'arbitrages permanents qui pèsent sur la gestion des rapports professionnels. L'entreprise doit, impérativement, conserver son efficacité commerciale, sa rentabilité financière, la productivité de son exploitation. Le maintien de son effectif en dépend. L'entreprise, ses dirigeants et ses cadres doivent comprendre les textes à appliquer, veiller à ce que cette compréhension soit partagée par les représentants du personnel et, surtout, agir en conformité avec ces textes auxquels la nature juridique associe de nombreuses sanctions pénales, ajoutant encore à leur complexité. Les comportements des acteurs dans les rapports professionnels multiformes, à la fois institutionnels et concurrentiels, voire antagonistes, doivent être traités avec un très haut degré de technicité, tant les conséquences de l'incompétence sont préjudiciables.
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institut présaje
2002-09-01
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[ "xavier lagarde", "agnès valentin", "florence richard" ]
TRAVAIL ET VIE PROFESSIONNELLE
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## Florence RICHARD, avocate au barreau de Paris L'adaptation c'est bien, la "révolution" c'est mieux, pense Florence RICHARD. La distinction entre salarié et non salarié s'estompe, surtout si l'on considère le salariat comme une garantie de revenus, la vie durant, dans des statuts protégés, dont il est évident que la communauté non protégée supportera de plus en plus mal le poids. L'aspiration au travail va se déplacer vers le désir d'indépendance dans l'exercice de l'activité et l'acceptation, soit par périodes, soit en permanence, d'une mixité entre la rémunération de type salarial et la rémunération de type "partage" liée à la créativité et à la coopération. Selon elle, trois objectifs devraient être visés dans un proche avenir : 1. retenir la notion de citoyen au travail, en général salarié, pas tout le temps, pas obligatoirement, et accepter que ce citoyen au travail soit libre de son temps de travail, dans la journée, dans la semaine, dans le mois, dans l'année, selon les différentes contraintes économiques des entreprises 2. retenir, pour conséquence évidente de cette évolution, une généralisation du contrat comme relation de base entre les parties intéressées, la loi fixant simplement le cadre de ce qui n'est pas licite au regard du respect des équilibres sociaux. 3. intégrer dans les rapports professionnels de nombreux éléments qui sont venus, dans la pratique, avec l'évolution des moeurs et des comportements en société, ajouter à la vie professionnelle des conditions nouvelles aux droits et devoirs qui ne se limitent pas à ceux du patron à l'égard de son employé, et vice-versa.
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institut présaje
2002-09-01
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[ "xavier lagarde", "agnès valentin", "florence richard" ]
TRAVAIL ET VIE PROFESSIONNELLE
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## conclusion \> ou bien le système normatif existant sera conservé, auquel cas des pans entiers de l'activité économique, émigreront vers des communautés étrangères, laissant sur place un chômage structurel et incompressible avec l'assistanat qu'il imposera. \> ou bien un nouveau système normatif, diversifié en fonction des activités économiques que la communauté nationale voudra conserver, sera mis en place, auquel cas un nouveau droit de la vie professionnelle, plus autonome et plus contractuel, verra le jour.
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institut présaje
2002-09-01
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[ "frank ceddaha", "charles beigbeder", "elisabeth lulin" ]
L' ÉPARGNE ENTRE VIRTUALITÉ ET REALITÉ
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# L' ÉPARGNE ENTRE VIRTUALITÉ et REALITÉ la seconde réunion PRESAJE du 19 juin, toujours à la maison des avocats, s'est intéressée à l'épargne, en visant dans le mille, alors que la tempête allait se lever avec l'ouragan des malversations et les typhons des surendettements. Nous voilà bien entre virtualité et pénible réalité, dans une confusion que nos trois animateurs nous ont aidés à dissiper, en orientant nos futurs travaux. ## Frank CEDDAHA, managing director de Abn Amro Bank Frank CEDDAHA a attiré l'attention sur l'extrême concentration des opérateurs intervenants dans le placement du "papier" qui constitue le support de l'épargne investie : une cinquantaine dans le monde. Cette situation comporte des risques évidents : effets d'imitation, de suivisme, toute puissance de la mode, phénomènes d'emballement, etc., hélas complétés depuis notre réunion par la révélation de pratiques carrément délictueuses, faites de copinage et de falsifications, qui font douter l'épargnant après l'avoir fait trembler. Abordant les pratiques des fonds indiciels ou alternatifs, il a expliqué comment leur gestion dynamique entraînait un accroissement brutal des variations constatées, en positif comme en négatif, variations résultant de comportements exacerbés par la domination d'une cohorte d'analystes aux conclusions parfois expéditives.
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institut présaje
2002-09-01
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[ "frank ceddaha", "charles beigbeder", "elisabeth lulin" ]
L' ÉPARGNE ENTRE VIRTUALITÉ ET REALITÉ
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## Charles BEIGBEDER, fondateur de Self-Trade Créateur avec succès, au grand moment de la bulle spéculative, d'une société opératrice dans les transactions boursières en ligne, Charles BEIGBEDER nous a apporté l'expérience irremplaçable de celui qui a vécu les deux cotés du pic, à la montée et à la descente. En tirant trois leçons des dysfonctionnements constatés : 1. la qualité de l'investissement doit reposer sur une information équilibrée. Or la documentation reste filtrée par les analystes qui sont nécessairement vulnérables face à certaines manipulations de la communication chiffrée. En outre, les opérations des dirigeants sur leur propre capital, domaine opaque, sauf en Allemagne, renforcent cette asymétrie entre la documentation des actionnaires et celle des dirigeants. 2. les défaillances nées du compartimentage des marchés d'actions ont, parfois, gravement affecté les sécurités sur lesquelles les épargnants croyaient pouvoir compter, sans avoir une juste conscience de la différence de niveau de risque entre le premier, le second et le nouveau marché. Les sécurités à l'introduction n'ont pas toujours fonctionné. Tel le cas d'un serveur internet souscrit à l'excès par l'épargnant, en toute confiance en raison de sa cotation au premier marché et dont le retournement catastrophique a ruiné la totalité de son actionnariat. 3. les approximations hasardeuses ou totalement aventureuses des "business plans", totalement irréalistes, sont venus ajouter des pratiques qui conduisaient, comme on l'a déploré trop tard, à valoriser des pertes par des multiples qui n'auraient jamais été appliqués à des bénéfices.
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institut présaje
2002-09-01
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[ "frank ceddaha", "charles beigbeder", "elisabeth lulin" ]
L' ÉPARGNE ENTRE VIRTUALITÉ ET REALITÉ
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## Elisabeth LULIN, Présidente de "Paradigmes" Le point de vue d'Elisabeth LULIN a eu le grand mérite d'ouvrir la perspective, une fois le décor et les acteurs présentés par ses prédécesseurs en reprenant le thème de l'inévitable ruée vers la régulation qui suit, en général, le rush vers la spéculation. Stigmatisant la culture française de la loi et du règlement, elle se réfère à la théorie du marteau selon laquelle tout possesseur de cet outil cherche un clou pour l'enfoncer. De même, tout détenteur de pouvoir rêve de s'en servir. Elle a rappelé à quel point le complexe politico-administratif de type français était lourdement équipé d'objets contondants, et souhaite qu'un effort de réflexion sur une régulation incitative et contractuelle soit engagé dans l'évolution du marché de l'épargne. Opposant le pragmatisme habituel des Anglo-Saxons au dogme de l'État omnipotent, elle a donné l'exemple d'un traitement paradoxal, pour un esprit administratif, celui du permis de conduire : considérant qu'à la fin, c'est le système d'assurance collectif et obligatoire qui supporte les conséquences des risques de la conduite automobile, ne serait-il pas logique que le permis de conduire, le type de garantie et le montant de la prime soient délivrés et fixés par l'opérateur en dernier ressort ? Réflexion naturellement transposable au marché de l'épargne. Ce détour par la gestion des situations paradoxales, qui sont souvent celles des épargnants, a ouvert de très larges perspectives, pour l'étude qui est mise en chantier, sur une activité humaine, l'épargne, qui est en train de connaître un gigantesque sinistre, sauf pour ceux qui avaient tricoté leur "bas de laine" avant la fin du siècle.
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institut présaje
2004-01-01
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[ "michel rouger" ]
AUTORITÉ ET RESPONSABILITÉ
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# Autorité et responsabilité *Il y a juste quarante ans, fin 1963, un ouvrage lançait un grand débat au sein des institutions de l'époque et de la sphère économique française, alors en croissance forte :* "*Pour une réforme de l'entreprise*"*.* *Les réflexions et les propositions avaient été inspirées par la grande "boîte à idées" de l'après guerre, le Club JeanMoulin au sein duquel se retrouvait le "gratin" des serviteurs de l'Etat, des dirigeants d'entreprise et des hommes de réflexion qui avaient la charge de reconstruire la France. François BlochLainé, président de la Caisse des dépôts, tenait la plume. Il en fit la synthèse.* *Une phrase résume la pensée de ces dirigeants qui remirent l'économie d'aplomb :* "*Les gouvernants se reconnaissent à la plénitude de leur responsabilité plus qu'à l'exercice de l'autorité*". *Depuis 1963, le temps de l'ardente obligation de la planification étatique de l'économie, celui où l'on faisait seul la loi chez soi, grâce à une justice soumise, est révolu. L'Etat et son administration ont pratiquement renoncé à leur rôle marchand. La contrainte du marché ouvert a remplacé celle des politiques nationales, la mondialisation financière a parachevé cette "libération" qui a quelquefois flirté avec l'anarchie économique.* *Aujourd'hui, force est de constater que, si la notion d'autorité s'est assez bien accommodée de cette évolution car elle appartient à la nature de l'homme, la notion de responsabilité, en revanche, a beaucoup souffert car elle fait appel à la volonté de l'homme, ce qui est moins évident.*
220
institut présaje
2004-01-01
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[ "michel rouger" ]
AUTORITÉ ET RESPONSABILITÉ
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*L'accumulation des catastrophes financières, les déroutes et les dommages qu'elles entraînent donnent le beau rôle aux sonneurs de tocsin, quitte à laisser enfler les soupçons et à traquer les délinquants, sans souci de la pédagogie à développer.* *Dès ses débuts, PRESAJE a tissé ce fil rouge, en demandant à tous les jeunes futurs dirigeants d'entreprise, magistrats, universitaires et avocats de remettre la responsabilité individuelle au coeur de leurs réflexions prospectives. Car l'esprit de responsabilité ne peut être exigé des seuls opérateurs économiques.* *La société dans son ensemble a gagné en liberté, le prix doit en être payé en responsabilité.*
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institut présaje
2004-01-01
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[ "christian de perthuis" ]
QUEL AVENIR POUR LES MARCHÉS DE PERMIS D'ÉMISSION ?
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# QUEL AVENIR POUR LES MARCHÉS DE PERMIS D'ÉMISSION ? la suite du retrait des Etats-Unis, la mise en oeuvre du protocole de Kyoto destiné à combattre le réchauffement climatique est désormais subordonnée à la ratification de la Russie. Forte de sa position d'arbitre, cette dernière envoie des messages contradictoires. L'un des points les plus novateurs du dispositif de Kyoto est la mise en place d'un système international d'échange de permis d'émission des gaz à effet de serre. Dans le scénario d'un "adieu à Kyoto", va-t-on dès lors renoncer à l'outil du marché des permis d'émission ? Ce nouvel instrument constitue une innovation dont l'intérêt est de concilier fixation d'objectifs environnementaux ambitieux et incitations économiques responsabilisant l'entreprise : pour les industriels, le prix du marché représente le coût marginal de la tonne évitée, ce qui permet aux entreprises les plus à même de réduire leurs émissions de valoriser leurs quotas en excès en les vendant à des firmes moins performantes. Les émissions de gaz à effet de serre ont toutes les chances d'avoir demain un prix fixé par le marché. L'Union européenne projette d'ouvrir le premier marché international des permis d'émission de carbone en janvier 2005, qui aura une couverture nettement plus large que ceux de Londres et de Copenhague. Du côté américain, l'opposition de l'Administration Bush au dispositif de Kyoto s'inscrit dans une hostilité plus large à l'égard du dispositif multilatéral de l'ONU. Reste que, sur le terrain, les Etats-Unis sont également en train d'organiser un marché des permis d'émission de gaz à effet de serre à Chicago, dont les promoteurs prévoient un élargissement ultérieur à l'international.
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institut présaje
2004-01-01
1
[ "christian de perthuis" ]
QUEL AVENIR POUR LES MARCHÉS DE PERMIS D'ÉMISSION ?
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Cette marche dispersée risque cependant de ne pas intégrer correctement les pays du Sud. Du fait de leur croissance accélérée, les économies émergentes pèsent de plus en plus dans les nouvelles émissions de gaz à effet de serre. Il y a donc urgence à trouver des incitations économiques pour freiner ces émissions. Par ailleurs, le dispositif des permis d'émission, à condition d'être correctement paramétré, permettrait de drainer des ressources supplémentaires vers les pays moins avancés. Cette "invention" du permis d'émission n'est-elle pas un bel exemple de judicieuse combinaison entre régulation et jeu du marché ? (1) *(1) pour plus de détails, cf. Ch. de Perthuis "La génération future a-t-elle un avenir ? ", aux Editions Belin.*
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institut présaje
2004-01-01
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[ "egizio valceschini", "sandrine blanchemanche" ]
LES MARCHÉS DES PRODUITS ALIMENTAIRES EN QUESTION
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388
# LES MARCHÉS DES PRODUITS ALIMENTAIRES EN QUESTION 'obésité est désormais bien installée en Europe. En retour, la "maladie de la vache folle" vient d'atteindre les Etats-Unis. De la dramatique affaire de l'huile frelatée en Espagne il y a quelques années à la controverse autour de la viande d'une chaîne de restaurants, l'alimentation et ses marchés soulèvent sans cesse de nouvelles questions. Le saumon offre les dernières en date. Risques et suspicions Les innovations agro-alimentaires entraînent la montée des suspicions. Au niveau de la production agricole, la sélection génétique et les techniques intensives de culture ou d\'élevage modifient la notion de produit naturel. Tout au long de la transformation, du conditionnement, de l\'emballage, des transports et de la distribution, s\'établit une distance, à la fois physique et symbolique, entre le "mangeur" et l\'origine des aliments. Le risque alimentaire est périodiquement rappelé à l\'opinion publique. Les "affaires" du "veau aux hormones", les alertes aux salmonelloses ou aux listérioses, en passant par l\'épidémie des " vaches folles", en témoignent. Elles confortent les consommateurs dans l\'idée que, si la probabilité du risque est faible, ses effets, eux, ne le sont pas. La méfiance des consommateurs ne porte pas uniquement sur le produit, elle concerne aussi les procédés de production. Le cas des organismes génétiquement modifiés (OGM) est ici exemplaire ; ils demandent plus d'information et de garantie de sécurité.
222
institut présaje
2004-01-01
2
[ "egizio valceschini", "sandrine blanchemanche" ]
LES MARCHÉS DES PRODUITS ALIMENTAIRES EN QUESTION
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Les préoccupations nutritionnistes transforment la notion de sécurité*.* Les maladies de civilisation (maladies cardio-vasculaires et cancers, obésité) rendent les consommateurs plus sensibles aux rapports entre santé et nutrition, entre forme physique et régime alimentaire. Les interrogations ne portent donc plus uniquement sur les risques de toxi-infections soudaines et rapides, mais également sur les effets nocifs à long terme. ## L'intervention publique : jusqu'où ? Les marchés alimentaires doivent satisfaire à deux impératifs. Le premier, lié à la fonction d\'alimentation, est la protection du "mangeur" ; l'exigence fondamentale en est la préservation de la santé. Le second renvoie à la fonction d\'échange et à l\'information ; l\'objectif en est la loyauté des transactions et le choix en toute connaissance de cause. Dans tous les cas, les individus doivent recourir à des garanties et à des repères. En effet, leurs sens ou leur capacité d'expertise sont insuffisants pour leur permettre de juger seuls, sans danger pour leur santé et sans risque d\'être trompé. Les autorités publiques ont alors un rôle majeur. La légitimité de l'intervention. Historiquement, les pouvoirs publics ont pris en charge la protection de la santé. Dans le domaine de l\'hygiène et de la sécurité, dans tous les pays industrialisés, leur rôle est aujourd\'hui considéré comme relevant légitimement de leur activité réglementaire et répressive. Le rôle de l'Etat consiste aussi à défendre les consommateurs contre les tromperies ou les fraudes éventuelles, et à les informer. L'objectif est la loyauté des transactions ; l'intervention publique s\'immisce alors davantage dans le domaine des échanges et de la concurrence.
222
institut présaje
2004-01-01
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[ "egizio valceschini", "sandrine blanchemanche" ]
LES MARCHÉS DES PRODUITS ALIMENTAIRES EN QUESTION
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L'intervention de l'Etat a rencontré depuis une vingtaine d'années d'importantes limites. La méthode d'élaboration des réglementations a été mise en difficulté. Elle procède habituellement en détaillant in extenso les caractéristiques du produit, ses composants, les procédés de fabrication, les technologies\... jusqu\'aux méthodes d\'analyse et de contrôle. Avec la complexité croissante des problèmes de sécurité et l'élargissement du champ de la santé, jusqu\'où l\'État doit-il réglementer et contrôler, pour sauvegarder la santé publique et garantir à l\'acheteur la véracité des allégations commerciales et publicitaires ? Le principe de l'intervention lui-même a été contesté au nom du libre-échange et du démantèlement des barrières non-tarifaires, d'abord dans le cadre de la construction du marché unique européen puis des négociations internationales au sein de l'OMC ou du Codex Alimentarius. Parmi les principales barrières non-tarifaires figurent en effet les réglementations techniques et les réglementations de vente, ou encore les réglementations restrictives sous couvert de santé, de qualité, d'information, d'environnement et d'éthique.
222
institut présaje
2004-01-01
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[ "egizio valceschini", "sandrine blanchemanche" ]
LES MARCHÉS DES PRODUITS ALIMENTAIRES EN QUESTION
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## Plus de partenariat, moins de police La normalisation, substitut de la réglementation ? Les instances européennes marquent un recul par rapport au rôle classique de l\'État pour favoriser la confiance basée sur le professionnalisme technique. Elles renvoient aux professionnels la résolution de problèmes jusque-là assumés par les pouvoirs publics. L'idée est que leur potentiel technologique, leur proximité avec les consommateurs et leur capacité d\'auto-organisation devraient permettre, plus efficacement que l\'intervention publique, de définir certaines règles communes, y compris au niveau international. Les entreprises sont incitées à accroître leur crédibilité et à engager leur responsabilité juridique. La norme a ceci de particulier qu\'elle produit de la confiance, non pas à partir d\'une procédure coercitive, mais à partir d\'une concertation entre acteurs économiques. Pour acquérir leur légitimité, les normes doivent avoir une validité garantie par un organisme indépendant ; les organismes de certification sont censés remplir ce rôle. Aux fonctions traditionnelles d\'inspection et de répression de l'Etat s'ajoute désormais un rôle de conseil, d\'évaluation et de validation des divers référentiels élaborés par les professionnels eux-mêmes. Une telle démarche ne conduit pas nécessairement les pouvoirs publics à renoncer à l\'exercice de leur responsabilité. Plus de partenariat, moins de police : tel pourrait être l'objectif. Encore faut-il que l'impératif de responsabilité ne soit pas dilué. Tel doit-être le fil conducteur de la réflexion entamée par le groupe de travail que vient de lancer Présaje.
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institut présaje
2004-01-01
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[ "jean-luc girot" ]
DU COURRIEL AU "POURRIEL"
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420
# DU COURRIEL AU "POURRIEL" Chaque jour, nous nous échangeons à travers le monde trente milliards de courriels. Mais depuis quelque temps déjà, notre nouveau média de communication s'est trouvé très fortement perturbé à cause du "courrier électronique non sollicité" ou SPAM. Les messages non sollicités sont, en général, envoyés par des entreprises peu scrupuleuses à leurs correspondants à des fins commerciales. Pour atteindre cet objectif, les "spammeurs" se procurent les adresses par tous les moyens. Au cours de l'année 2003, les messages de ce type ont représenté environ 25% des messages. C'est déjà près de 15% de plus qu'en 2002, et plusieurs éditeurs de solutions anti-spam s'accordent à dire que nous atteindrons 50% très rapidement, avec, de surcroît, une majorité de messages à caractère pornographique ! Si le volume de "pourriel" venait à dépasser celui du courrier légitime, l'usage des messageries électroniques deviendrait tout simplement impossible. Faut-il développer des filtres anti-spam ? Ces mécanismes, qui s'adaptent sur les boîtes à lettres électroniques ou sur les serveurs de messageries, analysent la provenance des messages et tentent de filtrer les messages non sollicités, grâce à des listes d'émetteurs ou à des mots-clefs. Mais les émetteurs de messages usent de techniques toujours plus sophistiquées afin de les contourner. Autre solution : légiférer et poursuivre les contrevenants. Le projet de loi sur la "confiance dans l'économie numérique", récemment adopté par l'Assemblée Nationale, annonce-t-il une remise en ordre ? Il faut savoir que les "spammeurs" sont souvent étrangers et donc, de ce fait, très difficiles à poursuivre et à condamner.
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institut présaje
2004-01-01
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[ "jean-luc girot" ]
DU COURRIEL AU "POURRIEL"
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Voilà une problèmatique où la justice doit s'allier à la technologie pour construire une barrière efficace à la prolifération d'une pratique irrégulière, qui pourrait bien transformer l'une des plus belles inventions du XXème siècle en nuisance insupportable. Nous n'avons pas à nous colleter avec un problème relevant seulement du droit ou seulement de l'économie ; il relève des deux à la fois. C'est un sujet typiquement "présajien".
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institut présaje
2003-10-01
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[ "michel rouger" ]
DÉLOCALISATIONS
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# Délocalisations *Il y a vingt ans, les choses étaient claires.* *Toutes les décisions gouvernementales concernant l'économie étaient prises à Paris, dans le triangle géographique du pouvoir exécutif, rue St Honoré (l'Elysée), rue de Varenne (Matignon), rue de Rivoli (les finances).* *Toutes les décisions concernant le Droit étaient prises dans le triangle du pouvoir législatif et réglementaire, le Palais Royal (Conseil d'Etat et Conseil constitutionnel), la rue de l'Université (Assemblée nationale), la rue de Vaugirard (le Sénat).* *Toutes les décisions construisant la jurisprudence étaient prises dans le coeur de l'Ile de la cité (Cour de cassation). En langage courant, le Français, comme le charbonnier, était maître chez lui.* *Aujourd'hui, les choses sont aussi claires, mais plus difficiles à admettre car les décisions sont très largement délocalisées. On le découvre un peu tard.* *En matière financière, les décisions sont mondiales, éclatées, dispersées, mais largement interdépendantes, dans une figure géométrique aux lignes floues, qui passent par Tokyo, Londres, Berlin, Pékin, Ryad, avec un seul point fixe, New York.* *Les décisions concernant le Droit et le règlement sont continentales, surtout depuis que l'Union européenne s'est développée en intégrant vingt cinq pays, et résultent d'équilibres complexes qui font craindre que ce qui est consensuel n'est pas toujours sensé.* *Les décisions judiciaires, de loin les plus difficiles, surtout quand elles doivent résoudre le casse-tête des faillites ou des plans sociaux, restent très isolément nationales.*
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institut présaje
2003-10-01
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[ "michel rouger" ]
DÉLOCALISATIONS
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*Le mois de septembre nous a apporté, avec Alstom, l'illustration des conséquences de l'éclatement, de la délocalisation, des éléments structurant les décisions à prendre.* *Le système de poids et mesures uniques a vécu, et chaque cas litigieux fait l'objet d'une analyse ad hoc, fondée sur un cocktail de critères plus ou moins rigoureux.* *Plus que jamais, il faut que ceux qui ont la vocation de servir l'Economie, le Droit et la Justice apprennent à se comprendre, à réfléchir ensemble sur l'avenir. L'idée d'une marche arrière est évidemment sans issue. Ce qu'il faut aujourd'hui, après avoir ouvert les frontières, c'est ouvrir les esprits.*
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institut présaje
2003-10-01
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[ "thomas cassuto" ]
LA LOI, LE JUGE ET LE MÉDECIN
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438
# LA LOI, LE JUGE ET LE MÉDECIN Longtemps, l'univers du droit et celui de la médecine ont eu des rapports limités, la médecine constituant néanmoins un auxiliaire indispensable de la justice. Peu à peu, les techniques ont évolué, le public est mieux formé et plus attentif, plus exigeant : les cadres de la responsabilité médicale se sont considérablement élargis. Progressivement, l'obligation de moyens énoncée en 1936 par la Cour de Cassation s'est transformée en obligation de sécurité de résultats. Les exigences qui l'accompagnent, reflets de l'évolution d'une société et des progrès qui l'animent, constituent des contraintes supplémentaires pour les activités de recherche. Beaucoup de scientifiques et de praticiens considérant cette charge comme "exorbitante", on a admis, dans certains cas, de la reporter sur la solidarité nationale. Mais dans une société où l'économie de la santé publique est perturbée dans ses grands équilibres, le choix du recours à la solidarité nationale constitue un défi majeur pour la pérennité du système. Tout repose sur le pari que l'on fait de l'augmentation de l'efficience de ces soins et de la mise en oeuvre d'une responsabilité professionnelle. En regard, le recours au droit offre plus de sécurité s'il sait offrir un cadre fort, lisible et protecteur des différents acteurs (usagers, praticiens, assureurs, collectivité, etc.) dans la perspective éventuelle d'une résolution judiciaire des conflits. Comme médiateur du règlement des conflits par l'interprétation de la loi et l'énoncé du droit, le juge doit respecter les grands équilibres qui lui servent de base afin de prévenir les maux modernes qui guettent les activités de santé: les excès de juridicisation, de judiciarisation et de pénalisation, sans pour autant ignorer les enjeux casuels.
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institut présaje
2003-10-01
1
[ "thomas cassuto" ]
LA LOI, LE JUGE ET LE MÉDECIN
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## Le fil de la vie Dans l'exercice périlleux de la préservation du fil de la vie, la mise à l'écart de toute erreur, qu'elle se manifeste par un défaut de vigilance dans l'action ou par l'ignorance injustifiable, constitue une priorité. Un dilemme survient lorsqu'on constate que nombre d'erreurs commises, constatées et analysées sont à l'origine de spectaculaires avancées scientifiques. Là, c'est l'éthique de la démarche qui fonde juridiquement la sanction des résultats. L'évolution des mécanismes de réparation dans le domaine de la santé n'est pas singulière. Bien au contraire, symbole d'une recherche permanente de cohérence par le droit, elle semble suivre les grandes étapes : sanction pénale, puis civile au travers de l'approche contractuelle ou quasi délictuelle des rapports entre les parties. Aujourd'hui émerge un large accord sur l'idée d'un principe légalisé d'indemnisation qui tend à présumer une responsabilité sans pour autant la désigner. L'assurance joue alors le rôle de filtre et de régulateur. Mais les enjeux humains et économiques sont tels que le fossé entre la médecine et la justice reste difficile à combler. L'intervention du législateur par la loi du 10 juillet 2000 modifiant le régime de la responsabilité pénale non intentionnelle, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, et la loi du 30 décembre 2002 relative à la responsabilité civile médicale illustrent les zones de tension et les difficultés à établir un mode équilibré de règlement des difficultés. Cette rupture entre deux activités qui partagent pourtant une culture humaniste appelle des remèdes fondés principalement sur un meilleur partage du savoir entre les institutions. Il est à craindre que la réactivité et l'émiettement législatifs finissent par entamer la cohérence et la sagesse d'un corpus juridique.
225
institut présaje
2003-10-01
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[ "thomas cassuto" ]
LA LOI, LE JUGE ET LE MÉDECIN
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La confiance dans le juge doit également s'exprimer au travers de l'acceptation de la capacité de faire progresser une société par le biais de l'évolution de la jurisprudence. Ces risques ont un coût pour la collectivité. Nul doute qu'un excès de judiciarisation des activités médicales est de nature à affecter l'accessibilité et l'efficience des soins. Nul doute également que le corps social tolère de moins en moins le défaut de prise en compte de la souffrance de chacun. L'apaisement dont notre société aurait besoin nécessite un effort commun. Ainsi que le soulignait le procureur général près la Cour de Cassation le 10 mars 2003 : "La justice n'est pas là pour entraver les initiatives curatives du médecin. Pour peu que celui-ci sache communiquer à son patient le sens de ses décisions et de ses actes, \[\...\] une part importante du contentieux médical disparaîtrait et avec lui le climat de méfiance créé, au sein de la profession, par des décisions judiciaires où l'esprit de compassion l'emporte sur l'éthique de responsabilité". La réponse juridique et économique aux "défis du vivant" ne peut se contenter d'une lecture purement arithmétique.
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institut présaje
2003-10-01
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[ "thomas paris" ]
LA CRISE DE L'INDUSTRIE DU DISQUE
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# LA CRISE DE L'INDUSTRIE DU DISQUE L'économie de la musique connaît la plus grave crise de son histoire. Les ventes de CD ont baissé de 30 % en trois ans aux Etats-Unis et l'on évalue à 500 millions le nombre de fichiers musicaux téléchargés "illégalement" chaque mois dans le monde. L'industrie du disque est en train de ployer sous les coups répétés de la piraterie, c'est-à-dire de la consommation, de la diffusion et de l'échange de musique par internet. Problème judiciaire, car il s'agirait de faire respecter les règles en vigueur ? Problème juridique, dans la mesure où se pose la question de la qualification des actes incriminés, et de la responsabilité des différents intervenants ? Ou problème économique, puisque c'est toute l'économie de la musique qui serait mise à mal ? Les trois à la fois ! La crise que l'on observe aujourd'hui est un processus de reconstruction entre les technologies, les usages, les règles de droit et les stratégies des acteurs économiques.
226
institut présaje
2003-10-01
2
[ "thomas paris" ]
LA CRISE DE L'INDUSTRIE DU DISQUE
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L'imbrication de ces quatre dimensions dans cette crise est un fait essentiel, souvent ignoré. D'un côté, dans le camp des consommateurs, de nombreuses voix s'élèvent pour défendre le "libre" en arguant que les maisons de disques n'ont pas su anticiper les effets du développement de l'internet mais qu'elles finiront par s'adapter à la gratuité, comme l'ont fait avant elles les majors du cinéma face à l'explosion de la vidéo. De l'autre, le camp de la propriété intellectuelle, emmené par les fournisseurs de contenus, défend le système en place en recourant à des parades techniques et en cherchant à obtenir des jurisprudences favorables. Quotidiennement, le combat se joue devant les tribunaux. Un jour, ils donnent raison aux maisons de disques, le lendemain, ils se rangent derrière les arguments des consommateurs ou des concepteurs de systèmes de "peer-to-peer". La compréhension, dans toutes ses dimensions, du phénomène en train de se jouer n'est pas si facile. Des technologies nouvelles sont apparues. Ce n'est pas la première fois ! Mais aujourd'hui, le cocktail est explosif : numérisation + compression + logiciels d'échange. La numérisation permet une reproduction à l'identique, ce que ne faisait pas le magnétoscope. La compression et les logiciels de partage permettent l'échange à grande échelle des fichiers reproduits. Les technologies d'aujourd'hui ne sont donc nullement comparables à toutes celles qui les ont précédées, de l'imprimerie au magnétoscope en passant par la radiodiffusion.
226
institut présaje
2003-10-01
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[ "thomas paris" ]
LA CRISE DE L'INDUSTRIE DU DISQUE
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## Consommateurs hors-la-loi Aussi bien, la prise en compte des usages est importante. Avec le magnétoscope, on pouvait voir un film dans son salon. Cela définissait un nouvel usage et des nouvelles catégories de consommateurs, cela entraînait éventuellement des transferts de consommateurs d'un usage (le film en salle) à un autre (le film à la maison), mais au final cela ne remettait pas en cause le premier usage qui conservait ses spécificités (écran géant, sortie...). Pour la musique, l'usage est identique : une fois téléchargée et/ou gravée, on écoute sa musique de la même façon que si l'on avait acheté un CD. Le "peer-to-peer" ne définit pas un usage complémentaire du CD, mais un usage identique, accessible gratuitement. Or la facilité de l'usage gratuit, et la difficulté de contrôle par les titulaires de droits, est l'autre trait important de l'évolution des usages. Quand des dizaines de millions de personnes sont hors-la-loi, n'est-ce pas la loi qui n'est pas adaptée ?
226
institut présaje
2003-10-01
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[ "thomas paris" ]
LA CRISE DE L'INDUSTRIE DU DISQUE
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La propriété intellectuelle est d'abord une réponse à un problème économique, le problème d'incitation à la production de biens collectifs. Aujourd'hui, la musique devenant immatérielle et le coût de sa reproduction nul, le problème est reposé. Pour qu'il y ait création, il faut qu'elle puisse être rémunérée. Dans cette perspective, les majors envisagent ou testent différentes stratégies de mouvements capitalistiques (alliances avec des opérateurs de diffusion pour valoriser leurs catalogues), de marketing (baisse des prix ou enrichissement du produit CD), de développement de nouveaux services (musique en ligne). Aujourd'hui, il ne s'agit pas de prendre le parti de la loi contre les technologies ou des usages contre les acteurs économiques, mais bien de faire dialoguer étroitement le monde juridique avec le monde économique, en y incluant les consommateurs, pour redéfinir une économie viable qui tienne compte des nouvelles technologies et des nouveaux usages.
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institut présaje
2003-10-01
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[ "xavier lagarde" ]
LE TRAVAIL, AUTREMENT
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# LE TRAVAIL, AUTREMENT Les années 1990 ont été l'occasion de gloses savantes et souvent séduisantes sur la fin du travail. Aujourd'hui, l'heure est à la réhabilitation de la "valeur travail". Sa reconnaissance est un facteur de paix civile. L'observation des "quartiers difficiles", où les taux de l'inactivité sont nettement plus élevés qu'ailleurs, oblige à admettre que l'oisiveté suscite le repli religieux, une éthique guerrière, et in fine un surcroît de violence. Sa reconnaissance est aussi un facteur d'équité. Le seul moyen de préserver la liberté tout en atténuant la tension que crée la perpétuelle aspiration à l'égalité suppose de définir un modus de fabrication des inégalités légitimes. Ce ne peut être ni la naissance, ni l'appartenance ; ce ne peut donc être que le travail. En même temps, de sa traversée du désert, la "valeur travail" n'est certainement pas sortie indemne. Elle a vraisemblablement perdu sa nature d' "impératif catégorique" pour devenir, sous la forme d'un oxymore, une "valeur individualisée". D'une certaine manière, nous acceptions que la vie professionnelle absorbe l'individu ; désormais, c'est l'individu qui absorbe la vie professionnelle. Il n'accepte les termes de cette dernière qu'à la condition qu'elle participe de son développement personnel.
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institut présaje
2003-10-01
3
[ "xavier lagarde" ]
LE TRAVAIL, AUTREMENT
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D'aucuns percevront cette évolution comme l'expression d'une dérive individualiste et pointeront dès lors ses effets pervers : déclin des valeurs, perte du sens du collectif et des solidarités, judiciarisation des rapports sociaux... autant de manifestations d'une irresponsabilité généralisée. A tout prendre, mieux vaut considérer que l'individualisation du travail, si elle n'est pas sans dangers, est aussi une chance. Il faut alors identifier le modus d'une saine articulation entre les attentes individuelles et les exigences de ces deux collectifs que sont l'entreprise et l'organisation d'une protection sociale. En bonne logique, ce doit être le contrat (individuel) ; parce qu'il fait naître des droits et obligations à la charge des deux parties qui le concluent, il associe de fait liberté et contrainte mieux qu'aucun autre instrument ne saurait le faire. C'est à cette tentative de compréhension prospective que se livre le rapport du groupe "travail et vie professionnelle" (à paraître prochainement).
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institut présaje
2003-07-01
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[ "michel rouger" ]
TROIS TEMPS, TROIS MOUVEMENTS
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# Trois temps, trois mouvements *Dans un point de vue récent (Les Echos du 27 mai 2003), notre nouveau Commissaire au plan, Alain Etchegoyen, a exprimé avec justesse et concision son regret d'avoir à constater la mort du temps, étranglé, étouffé, écrasé sous le poids de l'immédiat.* *La création de PRESAJE, en 2001, procédait de la même réflexion et de la volonté des fondateurs de contribuer au sauvetage de ce moribond en lui apportant leur propre souffle ; et surtout celui des jeunes, nombreux, qui font vivre nos projets.* *Encore faut-il intervenir méthodiquement, afin que chaque sauveteur soit à sa place et ne gêne pas les autres bénévoles désireux de partager cette bonne action. A cet effet, la vision de PRESAJE est claire. Comme tout malade polytraumatisé, il faut commencer par l'étendre, ce qui, traduit en temps, impose, pour pouvoir l'allonger, de lui faire une perfusion de prospective plutôt que la classique injection anesthésiante. Puis il faut traiter chaque membre brisé.* *C'est ce que nous avons entrepris, en associant à nos travaux de jeunes talents, spécialistes des membres fracturés du temps que sont l'Economie, la Justice et le Droit. Pour l'Economie productive, ce qui compte c'est le long terme ; chacun sait qu'il a été écrasé par le temps de l'économie financière, axée sur l'immédiat.* *La Justice, régulatrice des pulsions ou des maladies de la société, s'intéresse aux court et moyen termes, mais c'est trop souvent "le temps qui n'en finit pas", dès lors que le pénal a envahi le système judiciaire au point de le rendre quasi impotent.* *Reste le temps du Droit, lequel, comme la valse, se découpe en trois.
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institut présaje
2003-07-01
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[ "michel rouger" ]
TROIS TEMPS, TROIS MOUVEMENTS
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Le temps de la Loi, qui est celui du long terme. Le temps du Règlement, dont la souplesse et la plasticité animent le cadre rigide de la Loi. Le temps de la Jurisprudence, par laquelle le jugement trouve, dans le passé, les corrections que méritent la Loi et le Règlement.* *Aujourd'hui, ces trois temps ne sont plus "articulés". La Loi et la Jurisprudence se disputent la création des normes, au point d'avoir vu apparaître la notion de "loi jetable", puis celle de lois correctrices de la jurisprudence, le tout dans une insécurité juridique aggravée par la présence des normes européennes.* *A ce petit jeu, il était inévitable que le Règlement accapare le Droit, comme l'a démontré l'arrêt récent du Conseil d'Etat, annulant la décision du comité des établissements de crédit qui avait agi sans base légale, donc en dehors du droit.* *C'est pourquoi toute étude entreprise par PRESAJE, sur les grands sujets de vie qui nous concernent tous, est conduite en regroupant l'Economie, la Justice et le Droit.*
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institut présaje
2003-07-01
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[ "guillaume desgens-pasanau" ]
FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LA PHILOSOPHIE DU REGULATEUR (CNIL)
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285
# FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LA PHILOSOPHIE DU REGULATEUR (CNIL) En abordant ce sujet, nous retrouvons le fil conducteur des thèmes traités par l'institut PRESAJE : comment concilier les impératifs de la vie économique (sauf à entamer la compétitivité de nos entreprises) et, en même temps, veiller au respect des normes juridiques et éthiques ? ## Sur la convergence des démarches économique et juridique La loi du 6 janvier 1978 entend prémunir les libertés publiques et la vie privée des individus contre les dérives engendrées par la mise en oeuvre de fichiers informatiques. Mais la directive européenne d'octobre 1995 modifie totalement la problématique : la protection de la vie privée devient une simple condition à la libéralisation des flux de données au sein de l'Union Européenne. En France, la loi "Informatique et Libertés" n'est pas figée. Par exemple, dans le cadre de la transposition de la Directive Européenne, on prévoit des changements concernant les fichiers du secteur privé, avec un allégement des formalités préalables et un renforcement du rôle de conseil de la CNIL.
229
institut présaje
2003-07-01
1
[ "guillaume desgens-pasanau" ]
FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LA PHILOSOPHIE DU REGULATEUR (CNIL)
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## Sur l'harmonisation de l'économique et du juridique On assiste à un fort développement de systèmes experts permettant de sélectionner la clientèle. La sélection est positive lorsqu'il s'agit de "trier" la clientèle afin d'effectuer auprès d'elle de la prospection commerciale ; la sélection est négative lorsqu'il s'agit d'exclure certains individus du bénéfice d'un contrat (credit scoring) ou de se prémunir contre la fraude (listes noires). Plus graves sont les détournements de finalité ; par exemple, l'utilisation frauduleuse des données communiquées par les consommateurs dans le cadre de la prestation d'un bien ou d'un service. Autre exemple : la réutilisation des données clients à des fins de marketing ou de lutte contre la fraude. Il faut donc tenir bon sur les principes. Ainsi, le projet de loi "Informatique et Libertés" prévoit la mise en oeuvre d'un régime d'autorisation pour les fichiers permettant d'exclure une personne physique du bénéfice d'un droit ou d'un contrat, ainsi que le renforcement des pouvoirs de contrôle et de sanction de la CNIL à l'encontre des responsables de traitements automatisés de données. Reste une question : quid de l'application de la loi française pour les bases de données internationales ?
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institut présaje
2003-07-01
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[ "éric freyssinet" ]
FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LES PREOCCUPATIONS DE LA POLICE ET DE LA JUSTICE
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# FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LES PREOCCUPATIONS DE LA POLICE ET DE LA JUSTICE Deux questions dominent le débat : - la répression éventuelle du détournement des fichiers - la nécessité, pour le bon exercice de la justice, d\'accéder à des données qui sont souvent le seul lien vers un suspect potentiel. ## L\'application de la loi "Informatique et Libertés" De façon générale, le volet répressif de cette loi est très peu utilisé. Il peut y avoir des abus dans l\'utilisation qui est faite par les entreprises des données personnelles : le cas de certaines banques a pu être cité, mais il ne faut pas oublier les sectes !\... Un aspect de cette loi, moins souvent soulevé, est celui de l\'obligation de sécurité en matière de traitement automatisé de données personnelles. La difficulté sera, pour le juge et, éventuellement, l\'expert qu\'il aura commis, de déterminer si l\'entreprise a mis en oeuvre un niveau de sécurité suffisant. ## L\'accès aux fichiers des entreprises Un certain nombre de domaines sont expressément couverts par un secret particulier, celui des médecins, avocats et journalistes, voire le secret d\'une autre enquête. Ainsi, quotidiennement, les enquêteurs sont amenés à recouper des informations détenues légalement par les acteurs économiques (banques, opérateurs de télécommunications, employeurs). Internet suscite des difficultés nouvelles : une infraction peut être entièrement virtuelle ou numérique. Pour qu\'une enquête soit possible, il est donc nécessaire de faire le lien depuis l\'ordinateur visé vers l\'ordinateur à l\'origine de l\'attaque ; encore faut-il pour cela que des traces subsistent.
230
institut présaje
2003-07-01
2
[ "éric freyssinet" ]
FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LES PREOCCUPATIONS DE LA POLICE ET DE LA JUSTICE
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## Quelques pistes de réflexion : - Au-delà des législations internationales parfois discordantes, quelle est la position d\'équilibre à trouver pour le monde de l\'entreprise dans le traitement des données personnelles ? - Comment sensibiliser les entreprises à la nécessité de sécuriser les traitements de données personnelles ? - Comment intégrer les nouvelles technologies dans le traitement des réquisitions judiciaires ? - Quel rôle actif peuvent jouer les entreprises en matière de prévention des crimes et délits, mais aussi dans quelle mesure peuvent-elles contribuer à protéger leurs intérêts patrimoniaux ?
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institut présaje
2003-07-01
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[ "jean-luc girot" ]
FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LA STRATEGIE DES ENTREPRISES
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# FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LA STRATEGIE DES ENTREPRISES Les Banques, les Compagnies d'assurances, les Sociétés financières spécialisées, les Vépécistes, les Compagnies aériennes, etc. possèdent et entretiennent des bases de données de plus en plus complètes : - des données familiales (situation de famille) - des éléments patrimoniaux (valeurs mobilières et immobilières) ou de revenus, et donc de train de vie et d'équipement en général - des données liées aux modes de consommation des personnes (canaux d'interaction favoris, heures de disponibilité sur tel ou tel canal), utilisées notamment par les plates-formes téléphoniques - des données liées aux habitudes et aux goûts (presse lue, préférences musicales, centres d'intérêts, régime alimentaire\...) - des données prospectives (projet immobilier, achat de voiture, etc.). ## Comment les données sont-elles utilisées ? L'entreprise utilise ces données à plusieurs fins : - la rétention des Clients - l'estimation de la valeur du Client (l'intérêt des Clients aux yeux de l'entreprise) : elle se calcule grâce à des éléments factuels liés à l'individu, comme l'âge, l'équipement, les revenus, et des éléments factuels liés à l'entreprise - l'estimation des valeurs du Client (l'intérêt de l'entreprise aux yeux des Clients) : il s'agit ici de comprendre puis de gérer ce qui attache le client à l'entreprise - la gestion des Clients : gestion des réclamations, recréation de l'esprit de marque et de fidélité d'appartenance - le marketing interne de transformation : une fois le client acquis, il faut lui vendre un second produit puis un troisième pour le rendre rentable ; le premier produit est en effet souvent un produit d'appel destiné à le capter - le marketing sur prospects.
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institut présaje
2003-07-01
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[ "jean-luc girot" ]
FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LA STRATEGIE DES ENTREPRISES
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## La limite entre l'acceptable et l'inacceptable Il ne faut pas confondre l'information déduite par l'entreprise (ou capturée) et celle donnée de plein gré. Que penser du droit d'accès et de modification des données nominatives par l'individu ? Est-il applicable en l'état ? Correspond-il à un réel besoin ? Les entreprises jouent-elles le jeu ?
232
institut présaje
2003-07-01
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[ "michel guénaire" ]
FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LA PROTECTION DE LA PERSONNE
2
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# FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LA PROTECTION DE LA PERSONNE ## L'initiative européenne sur la protection de la vie privée L'Union Européenne s'est dotée d'un cadre juridique harmonisé concernant la protection de la vie privée. Titre de ce texte : "Directive concernant la protection des données à caractère personnel et de la vie privée et la libre circulation de ces données". En adoptant des principes de protection communs, les Etats membres de l'Union Européenne ont permis le libre échange, au sein du marché intérieur, des données personnelles. Dans le même temps, cette directive stipulait que l'exportation de données personnelles hors de l'Union Européenne n'était autorisée que si le destinataire de ces données résidait dans un pays offrant un niveau de protection de la vie privée comparable à celui existant en Europe. Les Etats-Unis ont négocié durant trois ans, avec la Commission Européenne, l'adoption aux Etats-Unis d'un socle de principes, les "principes du Safe Harbor", destinés à satisfaire l'exigence européenne. Une idée simple, mais forte : des données protégées par la législation européenne ne peuvent quitter l'espace juridique européen qu'à la condition d'être protégées ailleurs comme elles le sont en Europe. ## L'initiative américaine d'une sécurité internationale Surgissent les attentats du 11 septembre 2001 : une loi américaine a alors imposé, à toute compagnie aérienne, de transmettre aux autorités américaines le dossier de réservation (nom, prénom, habitudes alimentaires\...) sous peine de ne pouvoir faire atterrir leurs avions aux Etats-Unis. L'Administration Bush avait omis d'informer les Etats membres de l'Union de l'utilisation qui serait faite des données ainsi transférées. Des informations ont finalement été fournies par l'administration américaine et la Commission a entériné en mars 2003.
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institut présaje
2003-07-01
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[ "michel guénaire" ]
FICHIERS PLANETAIRES ET LIBERTE INDIVIDUELLE, LA PROTECTION DE LA PERSONNE
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## De quels droits fondamentaux parle-t-on ? Il s'agit de savoir si une personne peut être réduite à l'avatar que constitue son comportement informatisé - réel ou supposé-- et si des décisions peuvent être prises sur le fondement de ce que l'ordinateur a mémorisé. Si la réponse est oui : - avec quel contrôle effectif permettant d'éviter des dérives ? - avec quel "droit à l'oubli" ? Ces deux questions en suscitent mille autres pour l'avocat, gardien des libertés.
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institut présaje
2011-01-01
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[ "michel rouger" ]
700 MILLIONS DE CHINOIS, ET MOI ET MOI
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# 700 millions de Chinois, et moi et moi *1966, année de la révolution culturelle chinoise et de la chanson de Jacques Dutronc. J'en reprends le titre, 45 ans plus tard, en doublant le nombre de Chinois. Avec le souvenir d'un périple de 15 jours, début 1979, l'an 01 de la Chine d'aujourd'hui. Le pays était tombé au fond de l'arriération et du sous-développement après 30 ans de Maoïsme. Les jeunes guides, ex-gardes rouges, qui nous encadraient avaient jeté le petit livre rouge à la corbeille, au sens propre et au sens figuré du capitalisme boursier.* *Ils avaient une vision crédible de leur futur, exposée en français courant, avec une bonne pédagogie. Ils voulaient sortir la Chine de son marasme et de son isolement, le plus vite possible, en adoptant si besoin le modèle d'économie de marché qui faisait le succès de l'Occident américain. Sans la démocratie, qui ne s'appelait pas Droits de l'homme, modèle inadapté à un peuple aussi nombreux et turbulent. Ils choisissaient la puissance de la Chine, avant le bonheur des Chinois, qui en bénéficieraient plus tard. Ce modèle - capitalisme sans droits -- s'est installé solidement. Il menace celui des EtatsUnis et de l'Occident : capitalisme et Droits de l'Homme.*
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institut présaje
2011-01-01
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[ "michel rouger" ]
700 MILLIONS DE CHINOIS, ET MOI ET MOI
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*Et moi et moi, Français, en 2011 ? J'observe que mes compatriotes dévorent le tout petit livre de l'inventeur du moteur à indignation qui entrainera la future révolution vers un troisième modèle,* typical French*, les Droits sans le capitalisme. Sans comprendre comment la Chine de Deng Xaoping avait pris, en trente ans d'économies, le chemin du vrai capitalisme, celui qui accumule le capital comme instrument de la conquête des marchés industriels, commerciaux et financiers et des richesses. Pas du faux, le nôtre, celui de l'accumulation des dettes causées par trente ans de déficits, comme instrument de soumission aux marchés financiers.* *Il faudra beaucoup de vision et de pédagogie pour expliquer aux jeunes Français inquiets pourquoi ils auront besoin de l'économie libre et compétitive, qui produira les capitaux indispensables pour payer les dettes de l'héritage. Au moment où il leur faudra assumer les conséquences des mutations sociétales à venir, ajoutées à celles de la liquidation du passé. A défaut, ils connaitront la faillite, la dépendance et l'exil.*
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institut présaje
2011-01-01
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[ "michel rouger" ]
LE VISIONNAIRE ET LE PEDAGOGUE
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# LE VISIONNAIRE ET LE PEDAGOGUE Le monde médical connait le *French paradox*, qui relève que les comportements alimentaires des Français n'entrainent pas les pathologies observées chez les autres populations. Un second paradoxe intéresse la psychopathologie. Les phénomènes de dépression collective des Français n'entrainent pas de pathologies individuelles à la mesure de celles constatées au niveau de la collectivité. Les Français conservent leur bonheur de vivre, la famille, les amis, les loisirs. La jeunesse affirme sa confiance dans sa capacité de construire son avenir. Une énorme défiance accable la société française, la nation, l'Etat, et concerne l'incapacité de nos dirigeants à inspirer la confiance au peuple. Ces deux paradoxes s'inscrivent dans un troisième. Jamais l'individu n'avait disposé, à portée de main, sur son portable, des outils de vision et de pédagogie qui lui permettent aujourd'hui de se repérer sur le globe et de se documenter sur le monde, du GPS illustré à tous les WIKIS pédagogues. Comment se fait-il que le collectif, la société, l'Etat, soient aveuglés et submergés par l'émotion de l'immédiat, qu'ils négligent leur devoir de vision de l'avenir ? Comment traiter les angoisses nées du manque de repères, d'explications claires ? Cette analyse, ressassée dans toutes les publications, colloques, débats, interpelle PRESAJE, dont il faut rappeler que les objectifs fondateurs sont inscrits dans le nom : Prospective, Recherches, Etudes Sociétales. Certes, ces objectifs ont, en premier, été appliqués à la Justice et L'Economie. C'était l'urgence, elle reste d'actualité. Mais une autre urgence est née, telle que décrite ci-dessus.
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institut présaje
2011-01-01
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[ "michel rouger" ]
LE VISIONNAIRE ET LE PEDAGOGUE
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Voilà le pourquoi : il faut s'engager et expliquer comment PRESAJE peut prendre sa place dans le débat public en y apportant sa part de vision et de pédagogie, en y travaillant, parmi d'autres, avec des moyens renforcés et des objectifs ambitieux. Sans s'éloigner du couple Droit-Economie qui occupe une telle place dans les sociétés modernes, et qui entre de plus en plus en conflit sous la pression sociale. Ces mutations, aux origines multiples, que la société française va connaitre, exigent un élargissement du champ d'action à l'ensemble de la société, pas seulement aux spécialistes des professions du Droit et de l'Economie. Une nouvelle équipe, aux compétences élargies, reconnues, sera mise en oeuvre au printemps, au sein des Amis de PRESAJE. Elle y rejoindra ceux qui ont déjà publié avec nous. Elle portera ce nouveau projet plus global, le fera prospérer en y associant tous ceux qui voudront y participer parmi ceux qui sont fidèles à nos travaux.
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institut présaje
2011-01-01
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[ "michel rouger" ]
LE VISIONNAIRE ET LE PEDAGOGUE
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## La vision sociétale Le concept exprimé par le mot sociétal est né presqu'en même temps que les premiers symptômes de la dépression psychique de la société française lorsqu'elle a pris conscience des archaïsmes et des blocages qui la pénalisaient. Il y a moins de vingt ans. Le Littré et le Larousse ignorent le mot qui n'apparait que dans les années 80 dans le Robert sous une très courte définition : se rapporte à la société. Ce manque de vision et de pédagogie sur le concept sont déjà marquants. Il faut donc lui donner du contenu, de la consistance. A la lumière de ce que signifie ce mot de contenu dans le monde de la communication devenu numérique. Ainsi, la société serait le contenant du sociétal : les individus, leurs vies et leurs comportements. Cette prise en compte du sociétal sera retenue, au-delà de la Société, entité abstraite, champ de bataille des combats d'idées politiques ou religieuses, étrangers à la vocation de PRESAJE. Ce sera l'objectif des travaux engagés qui devront donner de la vision et de la pédagogie sur les évolutions dans leur vie quotidienne que subiront, parfois avec peine, des Français collectivement déprimés. En traitant tous ces sujets par la microéconomie, trop souvent absente des débats réservés à la macro.
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institut présaje
2011-01-01
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[ "michel rouger" ]
LE VISIONNAIRE ET LE PEDAGOGUE
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## La pédagogie Il est évident que toute pédagogie utile à éclairer le public implique que la réalisation des travaux lui soit accessible. A cet effet, il faudra qu'ils trouvent leur place dans des moyens de diffusion numérique importants. La participation à un site WEB à la mesure des besoins sera recherchée en partenariat. Les auteurs continueront à disposer, pour leurs livres, du contrat de coédition papier avec DALLOZ. Les articles et les cahiers numériques dédiés à l'étude des mutations sous la marque PREMICES seront présents sur le site, lequel permettra en outre de participer à un forum d'auteurs, ouvert aux échanges avec leur lectorat, pour démultiplier la diffusion, donc la notoriété et la qualité des travaux. A très bientôt.
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institut présaje
2011-01-01
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[ "xavier lagarde" ]
SUPPRIMER LA DUREE LEGALE DU TRAVAIL : RUPTURE OU PAS RUPTURE ?
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# SUPPRIMER LA DUREE LEGALE DU TRAVAIL : RUPTURE OU PAS RUPTURE ? La question du temps de travail est de nouveau sur la sellette. Elle constitue depuis les origines du droit social une question centrale. C\'est le Dr Villermé qui, dès 1841, dresse un constat alarmant de l\'état sanitaire des travailleurs en usine contraints à des journées de labeur qui peuvent atteindre 15 heures par jour. Les premières réactions législatives portent ainsi sur la durée du travail, celle des enfants puis ensuite celle des adultes. Par la suite, le mouvement a été à sens unique, ou presque, et rendu possible - on l'oublie trop souvent - par la hausse spectaculaire de la productivité. L\'objectif a été, peu ou prou, de préserver la dignité des salariés en évitant que leur existence se réduise à l\'activité qu\'ils déploient au bénéfice de leur entreprise. Dès lors, la remise en cause de la durée légale peut apparaître comme une rupture et, de fait, comme une régression. En même temps, il ne faut pas se tromper de contexte. Les discussions actuelles n\'auraient sans doute pas vu le jour s\'il n\'y avait eu les 35 heures. Il s\'agissait à l\'origine d\'une politique d\'inspiration malthusienne, destinée à traiter le problème spécifiquement français de la persistance d\'un chômage massif. C\'est avec le retour de la croissance, observée pendant le gouvernement Jospin et qui rendait moins pertinent le choix de cette politique, que la réduction de la durée du travail à 35 heures a été présentée comme un progrès social. Mais cette idée n\'a jamais parfaitement convaincu. Aussi bien, la volonté de mettre un terme à une définition légale de la durée du travail peut être aussi comprise comme une tentative de refermer la parenthèse des 35 heures. Ce serait alors une rupture de court terme plus que de long terme.
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institut présaje
2011-01-01
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[ "xavier lagarde" ]
SUPPRIMER LA DUREE LEGALE DU TRAVAIL : RUPTURE OU PAS RUPTURE ?
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Qui plus est, il ne faut pas confondre durée légale et durée maximum. La première marque le seuil de déclenchement des heures supplémentaires. La seconde est celle qui ne peut être dépassée quel que soit le prix que l\'employeur serait prêt à payer. La durée légale constitue ainsi une référence qui permet de fixer le prix du travail tandis que la durée maximum est un outil de protection de la personne du salarié. De ce point de vue, la réduction de la première est assez neutre. Ce qui compte, c'est la seconde, précision étant faite qu'une directive européenne la fixe en principe à 48 heures. D'ailleurs, la fixation de la durée légale a une incidence assez modeste sur la durée effective du temps de travail. Les Français sont les seuls à bénéficier des 35 heures. En moyenne, ils travaillent cependant 41 heures par semaine, soit presque autant que la moyenne des européens (41,5 heures). Dès lors que la notion de durée légale du travail constitue un outil permettant essentiellement de déterminer la rémunération de ce dernier, il est permis de reconsidérer cette durée sans y voir nécessairement la marque d'une régression. A l'appui de cette révision, on peut avancer que le prix du travail ne doit pas systématiquement être traité à l\'aide du même marqueur quantitatif dans tous les secteurs. Est-il évident qu\'il faille raisonner de la même manière pour un serveur travaillant en discothèque et percevant de nombreux pourboires et pour un travailleur posté en usine ou une caissière de supermarché ? Ce n'est pas certain. L\'idée d\'une durée conventionnelle, fixée par branche ou par entreprise, peut permettre de réguler au plus près les spécificités de chaque marché du travail. Maintenant, il est vrai que la proposition est politiquement maladroite.
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institut présaje
2011-01-01
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[ "xavier lagarde" ]
SUPPRIMER LA DUREE LEGALE DU TRAVAIL : RUPTURE OU PAS RUPTURE ?
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Renégocier la durée légale, c\'est renégocier le prix des heures supplémentaires. En cette période de crise, on imagine sans peine qu\'il s\'agirait plutôt de revoir les prix à la baisse. Nous sommes donc loin des propositions du candidat Sarkozy qui offrait de sortir par le haut des 35 heures. La droite introduit de la sorte une rupture par rapport aux espérances qu\'elle avait fait naître. De manière plus implicite, on voit poindre derrière cette discussion l\'idée que le travail coûte trop cher. D\'où la volonté d\'en passer par la négociation pour la tarification des heures supplémentaires. Il est vrai que, sous cet angle, la France n\'est pas compétitive. Mais peut-elle l\'être beaucoup plus ? Un travailleur français sera pour de nombreuses années encore bien \"plus cher\" qu\'un travailleur chinois. Par ailleurs, du fait des 35 heures, les salaires ont été tassés de sorte que le salaire médian reste très bas. Avec pour conséquence que les individus compensent leur faible pouvoir d\'achat par le recours à l\'endettement. Aussi bien le temps est-il peut-être venu de réfléchir à notre compétitivité en considérant d\'autres variables que le coût du travail.