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institut présaje
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2013-06-01
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"philippe escande"
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LES NOUVEAUX LUDDITES: INTERNET, MOTEUR DE LA CROISSANCE MAIS PAS CELUI DE L’EMPLOI
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2. Deuxièmement, la croissance de la productivité sur longue période est toujours corrélée positivement à celle de l’emploi. Si d’une année sur l’autre, on peut noter des divergences, celles-ci sont effacées dès que l’on examine les décennies.
3. Enfin, troisièmement, dans un pays développé, on trouve in fine toujours une corrélation entre la « maturité internet » d’un pays (pénétration, usage…) et sa croissance. Dès lors, si l’on pense que l’innovation ne se tarit pas mais repart au contraire sur un rythme très soutenu, on peut être optimiste sur la perspective à long terme de la croissance. Reste que la rapidité de diffusion d’internet est infiniment supérieure à celle du moteur à explosion ou de l’électricité, y compris pour les générations les plus avancées qui ne sont pas nées avec. Et donc la transition, déjà douloureuse à l’époque de la migration des campagnes vers les villes, conséquence directe de la mécanisation, pourrait l’être encore davantage. C’est elle qui encombre l’esprit des politiques, d’Aulnay à Florange, en passant par la presse quotidienne, et qui est porteuse pour eux des plus grandes menaces. Celle du retour sous une forme ou sous une autre des luddites de l’Angleterre profonde...
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institut présaje
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2013-06-01
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"michel volle"
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LE « NUMÉRIQUE » ET LA CRÉATION DE RICHESSE. TROISIÈME RÉVOLUTION INDUSTRIELLE : UNE URGENCE POUR LA FRANCE
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# Le « numérique » et la création de richesse. Troisième révolution industrielle : une urgence pour la France La troisième révolution industrielle est lancée. Elle transforme radicalement l’univers productif : les marchés, les produits, la façon de les produire, les assemblages de biens et services, les formes de la concurrence, l’organisation des entreprises, les règles et outils de la stratégie et de la régulation, etc. Pour Michel Volle, la France prend du retard dans la conversion de son modèle de croissance. Dans les années 1880, elle avait réagi tardivement à la révolution du pétrole et de l’électricité mais elle avait ensuite très bien rebondi. Elle est face au même défi aujourd’hui. Dans certaines usines, on voit des robots partout. Les emplois qui subsistent sont leur supervision et leur maintenance, qui exigent de savoir se débrouiller en cas d'incident : la « main d’œuvre » a été remplacée par un « cerveau d’œuvre ». Jetez un coup d’œil dans les bureaux d'une direction générale : les gens sont soit en réunion, soit devant l'écran-clavier qui leur donne accès à un système d'information. Les tâches répétitives physiques et mentales que demande l'action productive sont ainsi soit automatisées, soit assistées par un automate. Si l'informatisation a ainsi transformé le processus productif, elle transforme aussi les produits : ils deviennent des assemblages de biens et de services. L'automobile, produit emblématique de l'économie mécanisée, ne se conçoit plus sans des services de conseil, financement, location, assurance, garantie, entretien, remplacement, renouvellement, dont la qualité importe autant ou même davantage pour le client que les attributs de la voiture. La cohésion de cet assemblage est assurée par un système d'information.
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institut présaje
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2013-06-01
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"michel volle"
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LE « NUMÉRIQUE » ET LA CRÉATION DE RICHESSE. TROISIÈME RÉVOLUTION INDUSTRIELLE : UNE URGENCE POUR LA FRANCE
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L'organisation s'est, elle aussi, transformée : les produits sont de plus en plus souvent élaborés par un réseau de partenaires entre lesquels une ingénierie d'affaires a défini le partage des responsabilités, dépenses et recettes. Un système d'information, là encore, assure l'inter-opérabilité et la transparence du partenariat. Le coût de production réside presque en entier dans l’investissement que demandent la conception et la programmation des automates, ainsi que le dimensionnement d'un réseau de services. Il en résulte que les rendements d'échelle sont croissants et cela rend la concurrence féroce : pour survivre, les entreprises doivent différencier leur produit afin de conquérir sur le marché mondial un monopole de niche sur un segment des besoins, puis renouveler ce monopole par l'innovation.
## La société transformée dans toutes ses dimensions
Le rapport entre l'informatique et l'informatisation est analogue à celui qui existe entre la construction navale et l'art de la navigation : la première conditionne la seconde, qui lui indique ses exigences. Si l'informatique est une technique et une science, l'informatisation touche dans l'entreprise puis dans la société à toutes les dimensions de l'anthropologie : psychologie des individus, sociologie des organisations et des classes sociales, philosophie des méthodes et démarches de la pensée, et même métaphysique des valeurs, orientations et choix fondamentaux.
Elle a en effet modifié la nature à laquelle l'action humaine est confrontée : l'Internet a supprimé nombre des effets de la distance, chacun peut enrichir sur la Toile une ressource documentaire dont l'accès n'a pas de limite, le corps humain s'équipe d'un réseau de prothèses autour du téléphone « intelligent », l'impression 3D décentralise la production des biens auxquels elle confère une solidité jusqu'alors inconnue. Et nous n'avons encore rien vu : ce qui nous attend dans la suite du XXIe siècle sera plus bouleversant encore.
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institut présaje
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2013-06-01
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"michel volle"
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LE « NUMÉRIQUE » ET LA CRÉATION DE RICHESSE. TROISIÈME RÉVOLUTION INDUSTRIELLE : UNE URGENCE POUR LA FRANCE
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## Une délicate période de transition
Produits, façon de produire, structure du marché, forme de la concurrence, exigences de la stratégie et de la régulation : tout est donc transformé par cette troisième révolution industrielle. Mais cela s'applique-t-il aujourd'hui en France à tous les produits, à toutes les entreprises ? Pas encore. La plupart de nos entreprises peinent à s'affranchir des habitudes et traditions que la mécanisation a gravées dans leur organisation. Celles qui ont délocalisé la production dans des pays à bas salaire continuent à employer une main d’œuvre nombreuse. Les directions générales qui n'ont pas encore compris comment l'on peut diriger un « cerveau d’œuvre » se comportent de façon autoritaire et absurde envers les « gens du terrain ».
Il en a toujours été de même en France. Au début du XIXe siècle, sa mécanisation a été lente, à la fin du même siècle elle n'a pas été parmi les premiers à tirer parti de l'électricité et du pétrole. Aujourd'hui elle est donc à la traîne dans l'informatisation : alors qu'elle est classée cinquième selon le niveau du PIB, les enquêtes comparatives la classent vingtième dans la mise en œuvre des TIC.
Le mot « informatisation » est d'ailleurs jugé « ringard », une dame ministre m'a même dit un jour que le mot « informatique » la « faisait marrer ». Elle préférait « numérique », mais ce mot incite les politiques à se focaliser sur les aspects médiatiques de l'informatisation en ignorant une transformation qui concerne l'ensemble du système productif, et pas seulement le « secteur du numérique ». Mais les entreprises qui n'ont pas compris l'informatisation ne survivront pas longtemps, et les pays qui la méprisent perdront bientôt le droit à la parole dans le concert des nations.
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institut présaje
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2013-06-01
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"michel volle"
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LE « NUMÉRIQUE » ET LA CRÉATION DE RICHESSE. TROISIÈME RÉVOLUTION INDUSTRIELLE : UNE URGENCE POUR LA FRANCE
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## La France va rattraper son retard
L'histoire montre cependant que si la France démarre toujours lentement, elle sait comment rattraper son retard : son économie et sa société étaient en crise en 1889 mais elle a dès 1900 rejoint le premier rang.
Certaines entreprises (Axon', Asteelflash, Lippi, Withings, etc.) ont parfaitement compris les règles du nouveau jeu stratégique : la priorité, aujourd'hui, est de multiplier et développer de telles entreprises. L'enjeu est beaucoup plus important que les « problèmes de société » ou le déficit budgétaire sur lesquels l'énergie du politique se focalise malheureusement : la meilleure façon de résoudre ces « problèmes », c'est d'orienter le système productif en fonction des possibilités comme des risques qu'apporte la troisième révolution industrielle.
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institut présaje
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2013-06-01
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"jacques barraux"
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C’EST QUOI, L’ESPRIT D’ENTREPRISE ? UNE CONVERSATION DANS LA LORRAINE DE 2013
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# C’est quoi, l’esprit d’entreprise ? Une conversation dans la Lorraine de 2013 L’esprit d’entreprise, c’est d’abord une forme particulière de l’esprit de contradiction. Un instinct de l’action à contre-courant. Tout va mal en France ? C’est le bon moment pour se lancer quand la peur de la déglingue générale paralyse le plus grand nombre. L’esprit d’entreprise, c’est ensuite l’art de marier les trois ingrédients de la réussite : une idée, une méthode, une équipe. Au cœur de la France en récession, le témoignage d’un chef d’entreprise modeste, ignoré des médias mais acteur sans complexe de la mondialisation. Mai 2013 dans les environs de Pont-à-Mousson, une région au cœur de la crise européenne. Conversation avec le patron d’une entreprise de mécanique de 150 salariés (110 en France et 40 dans une petite filiale en Allemagne). Il s’appelle Francis Gris. Il a créé son entreprise dans les années 80, à l’ombre de la sidérurgie en faillite. Comment réagit-il à l’avalanche de mauvaises nouvelles sur l’industrie (en général) et l’automobile (en particulier), son principal client ? « Je n’ose pas le dire. Le premier semestre 2013 est pour nous un moment de surchauffe ». L’explication est simple. Elle témoigne de la plasticité d’un monde industriel « made in France » totalement incompris de l’opinion et des médias. Dans les pays d’Europe du Nord, c’est positivement sous l’angle du bien-être au travail, et surtout de la performance économique, que les questions du stress au travail ont été abordées, et il y a fort longtemps déjà. Les premiers accords entre partenaires sociaux ont été signés sur ces sujets en 1977 au Danemark, alors que dans notre pays il aura fallu attendre 2008 pour voir le jour d’un Accord national interprofessionnel sur la question du stress au travail.
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institut présaje
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2013-06-01
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"jacques barraux"
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C’EST QUOI, L’ESPRIT D’ENTREPRISE ? UNE CONVERSATION DANS LA LORRAINE DE 2013
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L’automobile européenne a des problèmes de surcapacités. Pas l’automobile mondiale. Gris Découpage, c’est le nom de l’entreprise lorraine, a des clients mondiaux comme Mercedes et Renault implantés à la fois dans des pays à forte croissance et des pays à faible croissance. Si l’Europe a moins besoin de boîtes de vitesse, le reste du monde lui, soutient la demande, et les composants de haute performance de Gris Découpage sont assurés de leurs débouchés. L’entreprise dépend moins de l’humeur des Européens que de celle des Chinois, des Russes ou des Brésiliens. Petite mais mondiale via des clients globaux.
## Parcours classique d’entrepreneur
Francis Gris est à l’image des milliers de chefs d’entreprises qui ont réussi leur parcours malgré trente années de dérèglement macro-économique de la France. Il est modeste par tempérament mais totalement à l’aise dans l’arène hors-frontières. Il a créé son entreprise dans les années 80. Un pari risqué. Il s’était porté candidat pour reprendre une activité peu glorieuse d’Usinor-Sacilor dans le domaine des produits déclassés, se lançant alors dans la production de rondelles, un produit basique de quincaillerie. Un marché aujourd’hui contrôlé à 100% par l’industrie asiatique. Il a opté rapidement pour une stratégie de sortie par le haut, ce qui lui vaut aujourd’hui de s’accrocher à une niche clairement identifiée dans le monde des équipementiers.
Une idée (la pièce haut de gamme pour un marché universel) ; une méthode (un temps d’avance en performance qualité ; une extension dans la Rhur) ; une équipe (à forte tonalité commerciale pour rentabiliser un lourd investissement machine). Comme des milliers d’entreprises saines ignorées des médias, Gris Découpage est une entreprise familiale. Céline, la fille du patron, âgée de 36 ans, semble vouée à prendre la suite de l’entreprise. L’esprit d’entreprise se transmet aussi par les gènes…
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institut présaje
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2013-06-01
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"albert merlin"
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DU MACHINISME À LA PRODUCTIVITÉ ORGANISATIONNELLE
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# Du machinisme à la productivité organisationnelle Le mot « productivité » a pris une couleur franchement négative dans le débat public. L’opinion le perçoit comme un accélérateur de chômage en temps de crise : « faire autant avec moins de moyens ». Pour Albert Merlin, cette attitude traduit une incompréhension devant les nouveaux mécanismes de la création de richesses. Du machinisme pur et dur, il nous faut passer à la productivité organisationnelle. Evoquant le déclin de la pratique religieuse en France, Hervé Le Bras et Emmanuel Todd parlent (avec un plaisir à peine voilé) de « catholicisme zombie »1. Ne faudrait-il pas en dire autant de la productivité, vu la modeste place qui lui est réservée dans les discours de tout acabit ? On nous parle beaucoup de R&D, de marketing, de benchmarking, de toutes les recettes possibles et de leurs condiments ; mais où trouve-t-on la moindre référence à la notion de productivité, alors que celle-ci était naguère considérée comme la mère nourricière de notre industrie ?
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746
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institut présaje
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2013-06-01
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"albert merlin"
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DU MACHINISME À LA PRODUCTIVITÉ ORGANISATIONNELLE
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Question de mode ? C’est vite dit. Nous sommes, en réalité, face à une véritable incompréhension des mécanismes de la création de richesses. Parce que, à mesure que la croissance a commencé à vaciller, on a fini par brouiller le concept de base de la productivité. Alfred Sauvy – il y a quelque 60 ans ! – expliquait que la productivité pouvait revêtir deux formes : soit faire « plus avec des moyens inchangés », soit faire « autant avec moins de moyens ». De nos jours, sous le poids de la crise et des charges, on ne voit guère que la seconde version. D’où l’idée : productivité égale chômage. On ne va pas jusqu’à suggérer de revenir à la lampe à huile et à la marine à voile, mais l’idée d’un nécessaire ralentissement des progrès de productivité pour augmenter le nombre des emplois (nous en sommes là !...) participe implicitement de cette démarche : à preuve le succès – heureusement remis en question depuis quelque temps – de l’idée du partage du travail ! Comme si le gigantesque bond de notre niveau de vie depuis la révolution industrielle, décennie après décennie, n’était pas directement issu des progrès de productivité accomplis dans notre appareil productif ! Qu’est-ce que la hausse du niveau de vie si ce n’est la baisse du nombre d’heures de travail nécessaires à l’acquisition de tel ou tel produit, ou telle ou telle fourniture de service ? Jacqueline Fourastié, qui, au prix d’un travail statistique obstiné, tient à jour les séries de prix réels (prix de vente/salaire horaire) les plus caractéristiques, nous montre inlassablement comment ces prix baissent au fur et à mesure que se diffuse le progrès technique : cela va du prix réel du beefsteak (divisé par 3 en trente ans) à l’ampoule électrique (divisé par 6) ou à l’automobile bas de gamme (divisé par 2). Sans parler du matériel informatique et de ses satellites.
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institut présaje
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2013-06-01
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"albert merlin"
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DU MACHINISME À LA PRODUCTIVITÉ ORGANISATIONNELLE
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Rappeler aujourd’hui ce mécanisme générateur de pouvoir d’achat, au moment où sévit le chômage, ne va pas de soi. Où est la difficulté, de nos jours ? Simplement dans l’insuffisance du mécanisme de « déversement » : pour qu’une croissance suffisante se développe, il faut que fonctionne le « spill over effect », selon lequel les effectifs dégagés dans les industries traditionnelles passent dans les secteurs neufs : là où naissent de nouveaux besoins. Ce qui est normalement le cas dans les technologies nouvelles et dans la plupart des secteurs tertiaires. Pourquoi cette belle mécanique ne fonctionne-t-elle pas (ou si peu) de nos jours ? D’abord parce que trop souvent on a voulu, dans le monde du tertiaire normalement porteur d’emplois, transposer de façon simpliste les recettes de la productivité manufacturière, de nature principalement quantitative. C’est ce que font trop souvent les grandes surfaces commerciales quand elles s’acharnent à réduire le plus possible le nombre d’employés par rayon. Résultat : le consommateur se sent abandonné, sans l’ombre d’un conseil sur les produits, avec, en outre, un manque total d’aide à la sortie du magasin. Alors que les super-stores américains ont compris depuis longtemps qu’ils devaient porter leurs efforts non sur le « dénominateur » de leur ratio de productivité mais sur le « numérateur » à travers une amélioration constante, patiente et sans faille de la chaîne commandes/stocks/livraisons, appuyée sur un système informatique ultra performant. En témoigne la rotation des stocks : 10 fois dans l’année en France, plus de 20 fois aux Etats-Unis. Et ce gain de productivité organisationnelle permet d’offrir au client un « plus » : le coup de main salvateur au moment de transporter et de décharger son caddy. Rien de tel chez nous2.
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institut présaje
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2013-06-01
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"albert merlin"
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DU MACHINISME À LA PRODUCTIVITÉ ORGANISATIONNELLE
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Une exception, toutefois, dans ce vaste domaine du commerce appelé à affronter mille défis : la métamorphose des grands magasins « haussmanniens », qui jouent de plus en plus la carte de la haute qualité et de l’esthétique : en somme une sorte de productivité « génétiquement modifiée » .
## La productivité « new look » Cela ne se fait pas en un jour. La performance se mesure de moins en moins en tonnes, et l’effort de productivité ne se limite plus à l’usine : c’est toute la chaine de la valeur qui est concernée. Il ne s’agit plus seulement d’une hausse du niveau de vie mais d’une transformation du mode de vie. Quitte à revenir aux joies de la bonne vieille brouette quand on veut retrouver, pour le plaisir, l’odeur du foin et de l’étable. Cette remise en question est évidemment transposable à quantité de secteurs, qu’il s’agisse de conception, de fabrication ou de fourniture de services. C’est la naissance d’un nouveau monde. Pensons aux entreprises sectoriellement et géographiquement diversifiées : naguère obligés de surveiller les lignes de production par des contacts et des voyages incessants, les ingénieurs peuvent maintenant le faire de façon beaucoup plus efficace à partir de leurs bureaux. En témoigne Saint-Gobain, où le directeur du verre plat suit et compare en permanence la marche de ses seize lignes de float glass d’un bout à l’autre de l’Europe, à partir de son cockpit informatique central : fini les déplacements des techniciens, les réunions et les allers-retours gaspilleurs de temps !
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institut présaje
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2013-06-01
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"albert merlin"
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DU MACHINISME À LA PRODUCTIVITÉ ORGANISATIONNELLE
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On voit poindre l’objection : tout cela n’est que de la gestion améliorée (ô combien !), mais quand on aborde la productivité créative, génératrice de produits nouveaux – seul moyen, à la longue, d’assurer de façon pérenne la hausse du « numérateur » – c’est tout autre chose : entre les mille chemins de croissance offerts par l’évolution technologique, comment choisir ? La difficulté n’est pas niable, mais c’est parfois une excuse facile pour baisser les bras ! Car grâce à l’informatique, les entreprises ont mille moyens de simuler, de calculer, de chiffrer les paris en termes de coûts/avantages. Dans ce même numéro de Presaje.Com, Michel Volle explique comment cela devient décisif dans le processus de création de richesses. Bien sûr, l’ordinateur ne fait pas tout, même quand il est « intelligent » : pour imaginer l’avenir il faut une vision. Les frères Michelin l’avaient, quand ils s’enflammaient, dans leur tout premier guide, à propos de l’automobile du XXème siècle et de ses conséquences sur les modes de vie : parce qu’ils avaient compris les mille apports de la productivité, même s’ils ne connaissaient pas le mot ! On ne nous fera pas croire que ce qui était possible chez ces industriels de 1900, démunis d’esclaves numériques, ne le serait plus à l’heure du « big data ». Question d’éducation, nous dit-on : les Français ont des neurones aussi performants que ceux de leurs voisins, mais se révèlent plus lents à passer à l’action. Mais nos concurrents ne nous attendront pas. Du machinisme pur et dur, il nous faut passer maintenant à la productivité organisationnelle et « prolifique ». Vite. ^1^ Le mystère français (Seuil). ^2^ Cf Ph. Lemoine, Université de tous les savoirs, Odile Jacob.
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institut présaje
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2013-06-01
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"gérard thoris"
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ET SI ON ESSAYAIT LE LAISSER-FAIRE PLUTÔT QUE LE DIRE ?
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# Et si on essayait le laisser-faire plutôt que le dire ? Un rapport succède à un rapport précédent. Une commission succède à une autre commission. Un engagement présidentiel succède à un autre engagement présidentiel. L’encouragement public aux vocations d’entrepreneurs ne faiblit pas dans notre pays… ponctué de décisions contradictoires et d’annonces sans lendemain. Gérard Thoris s’inquiète de la gestion erratique d’un dossier essentiel pour l’économie française. Il est évident que, sans les multiples talents qui innervent la France, la situation économique actuelle serait grave mais non désespérée. Mais enfin, l’impératif de l’entreprise, cela fait des lustres qu’il est défendu ; les rapports officiels et officieux sur le rôle positif que pourraient jouer les pouvoirs publics sont légion ; les réflexions conjointes entre partenaires sociaux sur l’état de l’industrie ou de tel ou tel secteur pullulent. Cela fait nécessairement partie du processus démocratique. Mais quand un rapport enterre l’autre parce que, entre temps, on a changé de majorité, quand on se limite aux effets d’annonce sans engager même de projet de loi ou signer la moindre directive d’application, quand on sélectionne une mesure symbolique en oubliant tout ce qui engage véritablement en termes de changement, alors oui, c’est désespérant ! Les « Assises de l’entrepreneuriat » sont un exemple prototypique de cet entrelacs d’effets d’annonce, de catalogues où la puissance publique peut puiser pour alimenter son goût hyperbolique de l’action, de promesses très bientôt non tenues mais qui occupent les esprits englués dans l’instant. Elles se tiennent cinq ans après que l’éminence grise de François Mitterrand, qui ne devrait pas effrayer son successeur à l’Elysée, ait proposé «300 décisions pour changer la France»^1^
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institut présaje
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2013-06-01
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"gérard thoris"
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ET SI ON ESSAYAIT LE LAISSER-FAIRE PLUTÔT QUE LE DIRE ?
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Ainsi, par exemple, ce rapport proposait de favoriser l’entrepreneuriat en créant le statut de l’auto-entrepreneur. Déjà, entre la proposition et la réalité, les niveaux d’exemption fiscale avaient fondu. Mais enfin, si l’on en juge par le nombre de créations d’entreprise sous ce statut, il est clair qu’il répond à une demande. Sans doute, ici ou là, fallait-il mieux gérer la coexistence de ce statut avec celui des artisans. Cela pouvait se faire par un allègement de la fiscalité de ces derniers ; cela se fera par un alourdissement de la fiscalité des premiers !
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institut présaje
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2013-06-01
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[
"gérard thoris"
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ET SI ON ESSAYAIT LE LAISSER-FAIRE PLUTÔT QUE LE DIRE ?
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Nous venons de vivre un instant quasi magique d’émerveillement devant la capacité des partenaires sociaux à négocier un accord national interprofessionnel qu’une loi a repris ensuite tel quel. Certes, ce n’était peut-être pas au cœur des débats, mais enfin, pour être « au service de la compétitivité des entreprises »2, il n’était sans doute pas inutile de simplifier l’écheveau de la représentation salariale et syndicale. On aurait pu imaginer un article rédigé de la manière suivante : « dans les PME de moins de 250 salariés est mis en place une représentation sociale unique sous la forme d’un conseil d’entreprise exerçant les fonctions du comité d’entreprise, des délégués du personnel, des délégués syndicaux et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Ce conseil d’entreprise est le lieu privilégié de la négociation ». En fait, le lecteur attentif se souvient immédiatement qu’il s’agit de la « décision » 37 du rapport Attali déjà cité. S’il a disparu de l’agenda, est-ce parce que le problème a été solutionné – mais qu’on nous dise comment ? Est-ce parce que ce n’est pas un problème – mais alors pourquoi l’avoir mentionné comme une mesure phare pour restaurer la croissance en France ? Très candidement, ne serait-ce pas parce que le sujet est tabou – mais s’il faut éliminer les sujets qui fâchent des négociations alors, pourquoi créer de nouvelles commissions pour entériner des désaccords persistants ?
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institut présaje
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2013-06-01
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[
"gérard thoris"
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ET SI ON ESSAYAIT LE LAISSER-FAIRE PLUTÔT QUE LE DIRE ?
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Finalement, on le sait bien, « les Assises de l’entrepreneuriat » ont été décidées pour réparer une décision prise sans concertation dans la Loi de finances 2013, à savoir augmenter la taxation des plus-values de cession de valeurs mobilières. On pourrait croire qu’il n’y a ni coût ni prix pour sauver la face des pouvoirs publics. Peut-être que neuf commissions pour l’oubli ne sont pas un budget pour les ministres en exercice. Mais il y a un coût pour certains entrepreneurs puisque, en passant, la base de la fiscalité sur les plus-values a été élargie. Ce genre de concertation a l’esprit d’un contrôle fiscal à l’échelle de la Nation ! Alors, on se met à rêver, non pas au laisser-faire manchestérien, mais à une simple accalmie dans l’accumulation de mesures incitatives et, ô esprit insensé, à une mise en cale sèche des politiques publiques, un retour en grâce et même un élargissement de la révision générale des politiques publiques. Mais quand on est ministre si peu de temps, peut-on se faire un nom dans le silence du laisser-faire ? ^1^ Jacques Attali (2008), «Rapport de la Commission pour la libération de la croissance française : 300 décisions pour changer la France », Paris, La Documentation Française. ^2^ Sous titre de l’ Accord National Interprofessionnel du 11 janvier 2013 pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation des parcours professionnels et de l’emploi des salariés
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institut présaje
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2013-06-01
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"françois ecalle"
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LA CROISSANCE, L’ETAT ET LES ENTREPRENEURS
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# La croissance, l’Etat et les entrepreneurs
La France n’a plus le choix. L’Etat n’a plus les moyens d’être un moteur de la croissance. Le seul moteur disponible est désormais entre les mains de l’entrepreneur, analyse François Ecalle. Notre pays se caractérise par une très faible croissance de son PIB par habitant, ce qui interdit d’augmenter à la fois le pouvoir d’achat et les dépenses publiques, sauf à choisir la voie insoutenable de l’endettement. La nécessaire augmentation de la productivité des actifs dépend désormais avant tout de l’entreprise.
Dans son Etude économique sur la France de mars 2013, l’OCDE rappelle que le taux de croissance du PIB par habitant au cours des 30 dernières années y est particulièrement faible. Il se situe au 31ème rang parmi les 34 pays pris en compte (avec toutefois deux grands pays derrière nous : Italie et Japon).
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institut présaje
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2013-06-01
| 4
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[
"françois ecalle"
] |
LA CROISSANCE, L’ETAT ET LES ENTREPRENEURS
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## Taux de croissance du PIB par habitant de 1990 à 2011 (%) La croissance du PIB par habitant n’est certes pas le Graal de toute politique économique et le rapport de 2009 de Stiglitz, Sen et Fitoussi a rappelé, une nouvelle fois, les limites de cet indicateur. Il est toutefois essentiel pour comprendre l’évolution des finances publiques, ce qui est trop souvent oublié. Les prélèvements obligatoires ne sont pas assis sur le « bonheur brut » ou la qualité de notre environnement, mais sur des flux monétaires qui constituent les principales composantes du PIB (les salaires versés, les bénéfices des entreprises…) ou ses principaux modes d’utilisation (la consommation des ménages notamment). En moyenne, sur plusieurs années, la croissance des recettes publiques est ainsi égale à celle du PIB (on dit que leur élasticité au PIB est unitaire). Ces prélèvements obligatoires financent le fonctionnement des services publics et assurent des revenus à ceux qui ne travaillent pas (retraités, malades, chômeurs) ou complètent ceux des autres (familles nombreuses…). Or le volume des services publics nécessaires et des revenus de remplacement ou de complément dépend pour une bonne part du nombre d’habitants. La croissance des dépenses publiques, à politique inchangée, est donc assez largement déterminée par les évolutions démographiques.
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institut présaje
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2013-06-01
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"françois ecalle"
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LA CROISSANCE, L’ETAT ET LES ENTREPRENEURS
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La création annuelle de richesse, que constitue le PIB, doit permettre à la fois de rémunérer les facteurs de production de cette richesse, travail et capital, et de financer les dépenses publiques. Si le PIB par habitant n’augmente pas, ou quasiment pas comme en France, il faut soit que les rémunérations par tête ne croissent pas1, soit que les dépenses publiques par habitant soient revues à la baisse. La France n’a jamais choisi entre ces deux solutions et, par défaut, en a retenu de fait une troisième qui est insoutenable à long terme : la rémunération des facteurs de production et les dépenses publiques ont continué, à la fois, à augmenter, mais ces dernières ont été financées par l’endettement. Il existe heureusement une quatrième solution, bien plus satisfaisante que les trois précédentes : augmenter plus fortement la production par habitant. La faiblesse de sa croissance en France ne résulte pas d’une structure démographique spécialement défavorable qui serait, par exemple, caractérisée par une progression particulièrement forte de la population totale rapportée à la population d’âge actif (15 à 64 ans). Le classement de la France est quasiment identique au regard des taux de croissance du PIB par personne d’âge actif ou par habitant. Si le taux d’activité des plus jeunes (15 à 24 ans) et des plus anciens (55 à 64 ans) est plus faible en France que dans les autres pays de l’OCDE, celui de la tranche d’âge intermédiaire (25 à 54 ans) y est en effet plus élevé.
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institut présaje
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"françois ecalle"
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LA CROISSANCE, L’ETAT ET LES ENTREPRENEURS
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## L’enjeu central est donc d’augmenter la productivité de la population d’âge actif.
Les gains de productivité peuvent avoir de multiples sources : la formation initiale et professionnelle, le progrès technique, la réorganisation des modes de production, etc. Les analyses économiques montrent que leur source principale diffère fondamentalement selon le degré de développement d’un pays. Dans les pays en retard de développement, comme l’était l’Europe par rapport aux Etats-Unis pendant les Trente Glorieuses, ils résultent d’un rattrapage technologique des pays avancés, souvent guidé par l’Etat, accompagné par une élévation du niveau de qualification.
Dans les pays avancés, comme la France aujourd’hui, les gains de productivité résultent beaucoup plus de l’innovation et d’un mouvement schumpétérien de destruction créatrice. Ils ne peuvent reposer que sur l’esprit d’entreprise, la liberté d’entreprendre et l’incitation, fiscale en particulier, à la prise de risque.
Le moteur de la croissance n’est plus l’Etat, qui certes gardera toujours de nombreuses fonctions essentielles, mais l’entrepreneur. Si les « trente piteuses » ont suivi les Trente Glorieuses en France, c’est probablement parce que nous n’avons pas su changer de modèle de croissance.
^1^ Entendues en termes « réels », c’est-à-dire de pouvoir d’achat, comme le PIB ou les dépenses publiques dans cet article.
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"michèle debonneuil"
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LES GISEMENTS FABULEUX DE L’ÉCONOMIE « QUATERNAIRE »
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# Les gisements fabuleux de l’économie « quaternaire »
Nous vivons la fin d’un cycle. La croissance ne reviendra pas avec les recettes de l’économie d’hier. Michèle Debonneuil, spécialiste des services à la personne, décrit l’avènement d’une économie « quaternaire » qui ne voit plus de frontières entre le « secondaire » et le « tertiaire », entre l’industrie et les services. Facilité par la révolution du numérique, le passage à l’économie « quaternaire » se traduira par la naissance de marchés de « solutions ». Des solutions qui vont permettre de transformer la vie au quotidien tout en révélant d’immenses gisements d’emplois nouveaux.
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institut présaje
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"michèle debonneuil"
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LES GISEMENTS FABULEUX DE L’ÉCONOMIE « QUATERNAIRE »
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1. La croissance ne reviendra pas avec les recettes de l’économie d’hier
Baisser les salaires pour améliorer la compétitivité des entreprises n’est pas la bonne solution. Il y a quelque chose de diabolique dans les politiques de rigueur qui finissent par étrangler les populations des pays en difficulté. L’Allemagne n’est pas le modèle à suivre pour réveiller la croissance. Elle a pratiqué pendant une dizaine d’années un politique de baisse des coûts qui a réussi parce que les autres pays… n’en faisaient pas autant. Ses succès viennent de l’inaction de ses partenaires et clients.
Il faut se convaincre que nous vivons la fin d’un cycle. Nous allons assister à la relève d’un cycle de croissance tiré par les gains de productivité des biens industriels, lesquels ont pu satisfaire un grand nombre de besoins : se nourrir, se vêtir, se loger, se déplacer, s’équiper. Mais dès le début du cycle de croissance tiré par les gains de productivité des biens industriels, un problème s’est posé pour la satisfaction de besoins essentiels de services comme l’hôpital, l’école ou l’aide aux personnes fragiles, impossibles à soumettre à la même logique des gains de productivité. D’où la mise en place dans les grandes démocraties d’activités non productrices, ce que l’on appele les « services publics et sociaux », financés par une partie des gains de productivité dégagés par l’industrie. Or le système est à bout de souffle. Les gains de productivité de l’industrie ne suffisent plus à financer des besoins qualitatifs de plus en plus massifs en matière de santé, d’éducation ou de gestion de la dépendance (allongement de la durée de la vie).
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"michèle debonneuil"
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LES GISEMENTS FABULEUX DE L’ÉCONOMIE « QUATERNAIRE »
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2. Nous entrons dans le cycle de la nouvelle « économie quaternaire »
Il n’y a plus de distinction entre les activités « secondaires » et les activités « tertiaires », entre l’industrie et les services. Les deux ont fusionné pour assurer la production de « solutions ». C’est l’explosion des technologiques numériques qui permet de construire un modèle de croissance radicalement nouveau, gisement prometteur de l’emploi.
Là où ils se trouvent, que ce soit dans leur domicile ou dans la rue, les consommateurs ont d’ores et déjà l’accès direct à des biens (Velib, voitures, appareils ménagers ou électroniques) ou à des personnes (service après-vente, aides diverses) susceptibles de répondre à de nouveaux besoins. Autre levier : la possibilité de repérer ou de déclencher automatiquement à distance des changements d’état des biens ou de personnes situées à domicile. Exemples pour les biens matériels : la fermeture et l’ouverture de portes, de volets, de lumières ou d’appareils électroniques. Exemples pour les personnes : la détection de la chute d’une personne âgée ou la présence d’un voleur dans un appartement.
En interconnectant toutes ces possibilités à celles déjà offertes par les échanges de « data » (voix, image, texte), en exploitant les ressources infinies de l’internet des objets, il devient possible de concevoir des « solutions » qui satisferont nos besoins d’une façon complètement nouvelle par rapport aux biens matériels achetés ou aux services rendus jusque là dans des lieux dédiés comme l’hôpital ou le magasin.
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"michèle debonneuil"
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LES GISEMENTS FABULEUX DE L’ÉCONOMIE « QUATERNAIRE »
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3. L’aide à la vie à domicile est un chantier-test de l’économie quaternaire
En attendant l’avènement d’un « réseau quaternaire » entre personnes, entre machines ou entre objets, il faut en passer par la création de plates-formes d’échanges de données numérisées projet par projet. Cela passe par un travail commun entre les entreprises, l’Etat, les collectivités territoriales et les associations. Le chantier est immense. Il est d’ores et déjà ouvert chez les acteurs de l’aide aux personnes en pertes d’autonomie.
D’abord, les entreprises qui s’occupent de la vie à domicile (opérateurs d’eau, gaz, électricité, Legrand, Fichet-Bauche, opérateurs téléphoniques etc.) se sont regroupés dans des consortiums qui mettent en place une plate-forme commune pour faciliter les échanges entre objets : mise en marche ou arrêt des appareils à distance, repérage de pannes, télésurveillance etc. De leur côté, les services sociaux des départements se préoccupent des moyens d’aider les personnes en perte d’autonomie. Et surtout, de leur permettre de vivre à leur domicile en profitant des « solutions » ouvertes par les technologies numériques : chemin lumineux au sol, télésurveillance, commandes à distance. Dans plusieurs régions et départements, des projets public-privé sont développés depuis plusieurs mois, premiers maillons de ce qui deviendra plus tard le réseau quaternaire.
Evidemment, les pouvoirs publics ont un rôle essentiel à jouer dans ce processus de transformation économique et sociale. Eux seuls peuvent capitaliser les expériences ponctuelles par la mise au point de véritables nouveaux services de l’économie quaternaire. Des services qui seraient standardisés et disponibles en open source. C’est ce que j’appelle la nouvelle infrastructure numérique du quaternaire.
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"michel rouger"
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LES MOTS DE L´ENTREPRENEUR ET CEUX DE L’ETAT
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# Les MOTS de l´ENTREPRENEUR et ceux de L’ETAT Il y a d´un côté ceux qui se méfient des patrons et de l´entreprise privée, et de l´autre ceux qui ricanent sur les fonctionnaires et l´appareil d´Etat. Deux mondes qui ne donnent pas le même sens aux mots. Michel Rouger s´amuse à le démontrer à partir de cinq termes-clé qui touchent à l´économie et à la société : le créatif, la liberté, la responsabilité, le risque et l´expérience. Les discours, politiques comme économiques, ne changent pas, décennie après décennie. La France manque d’entrepreneurs, elle a trop d’Etat… Facile et superficiel, car au pays des grandes idées qui doivent rayonner sur le monde, nous n’arrivons pas à nous accorder sur le sens de nos mots. Par exemple, les deux mots qui figurent en titre n’expriment pas du tout le même concept selon l’idéologie et la circonstance, auxquelles s’ajoutent les cultures et les formations propres aux deux grandes fonctions - le politique et l’économique - telles qu’elles jouent leurs rôles, essentiels au bon équilibre de la société. Surtout quand ces cultures inspirent des luttes intestines, en vouant, tour à tour, aux gémonies les PATRONS et leurs ENTREPRISES, l’ETAT et ses FONCTIONNAIRES. Pour aider à comprendre comment se produit cette accumulation d’inepties économiques, il faut s’inspirer de Confucius et de son attachement au sens des mots. Au moins pour tenter de corriger nos défauts, au sens basique du mot, ce qui nous manque. Prenons en cinq, facilement
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institut présaje
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"michel rouger"
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LES MOTS DE L´ENTREPRENEUR ET CEUX DE L’ETAT
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compréhensibles. L’entrepreneur, le vrai, est un créatif qui se projette dans un espace de liberté, qui prend ses responsabilités, ses risques et privilégie l’expérience assumée à la théorie enseignée. Pour lui, c’est clair, pas pour l’Etat. Chacun reste enfermé dans son langage, et la France dans son marasme, faute d’une pédagogie qui lui permette d’en sortir en les conciliant.
## Le créatif.
Comme son nom l’indique, il crée. Il ne se contente ni d’inventer, ni
d’innover, voire de rénover. Il réalise un projet qu’il construira pour
le plus longtemps, le plus grand espace, le plus grand nombre de clients et d’emplois possibles. A ses débuts, même soutenu par des politiques
qui veulent donner à leur action les images successives du novateur,
innovateur, rénovateur, son rôle est aussi méconnu que son
personnage, de la part des administrations de l’Etat. Pourtant, n’en
déplaise à ses contempteurs, l’entreprise dépend avant tout de son
créateur pour apporter, plus tard, la richesse dont la société
bénéficiera.
Les administrations les plus ouvertes à la modernité, parce qu’elle donne
une belle image qui se vend bien dans la quête aux budgets, y voient un
innovant, séduisant. Elles ignorent qu’il ne sert à rien d’innover sans
la volonté de créer, de construire, d’offrir ce qui sera le monde à
venir. Elles ne connaissent du projet que le SOFT, l’idée, pas le HARD,
sa construction, sa mise en pratique. Leur premier réflexe est
scepticisme et méfiance. La règle de précaution veut alors que le
créatif soit traité comme un banal assujetti au guichet de
l’administration d’en bas, voire comme entité statistique dans la
catégorie des partenaires sociaux de l’administration d’en haut.
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institut présaje
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"michel rouger"
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LES MOTS DE L´ENTREPRENEUR ET CEUX DE L’ETAT
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## La liberté.
L’analyse du sens de ce mot, le premier de notre fière devise
républicaine, dans les vocabulaires de l’Etat et de l’entrepreneur, est
passionnante. Il a un vrai sens pour le créatif. Il en a besoin pour
vaincre les résistances au changement des sceptiques et des
conservateurs. Ceux qui partagent le projet avec lui en ont autant
besoin pour investir leur temps, leur argent, leur imagination en se
dispensant des sécurités offertes à ceux qui sont apeurés par les
risques.
Ce concept est naturellement incompréhensible par l’Etat. Construit, comme l’Armée
des guerres impériales du XIXème siècle, puis comme chef de guerre des
armées de l’économie industrielle du XXème siècle, il limite la liberté
d’entreprendre aux exigences de la discipline citoyenne, par la norme et le règlement, au-delà même de la Loi. Le rapport récent sur les 400.000 normes qui constituent la camisole de force infligée au monde des
entrepreneurs explique tout. Y compris le taux de mortalité de ces
fantassins de l’économie, chair à canons des obusiers de la
bureaucratie. 80 % à dix ans. On l’oublie. C’est à la fois le déni de
réalité et le déni de liberté.
De temps en temps, l’entrepreneur trouve un peu de liberté en assumant une vocation de substitution, destinée à pallier la défaillance du politique,
lorsque le choix, historique, du chômage de masse pèse trop lourd sur la communauté. Il devient créatif d’emplois assistés, associé dans le
traitement de la rémission de ce cancer sociétal. Son banquier est
lui-même invité à quitter chapka, moufles et parka pour diffuser la
chaleur bienfaisante du pouvoir de dire oui, le temps d’accumuler les
pertes, avant de retrouver la prudente frilosité qui assure les gains.
On le voit, l’entreprise libre reste victime, en France, de l’image héritée des
années de guerre froide, celle du renard libre dans le poulailler libre.
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"michel rouger"
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LES MOTS DE L´ENTREPRENEUR ET CEUX DE L’ETAT
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## La responsabilité.
L’esprit d’entreprise la revendique comme contrepartie de la liberté,
sans toujours en comprendre les limites, surtout les conséquences.
Montesquieu, en son temps, a défini l’esprit de commerce comme
s’exerçant à mi chemin entre la générosité et le brigandage. Ces deux
mots servent de cadre à l’exercice et à la mise en cause des
responsabilités encourues par l’entrepreneur qui sont à la mesure des
normes que nul n’est censé ignorer, et des risques de défaillance
qu’elles provoquent à un niveau démesuré.
A partir de quoi, chacun s’accroche à ses certitudes. L’administration à sa
suspicion de brigandage, qui sait, comme les bons chiens de garde, que
le contrevenant qui a pénétré en territoire interdit doit être
¨ chopé ¨ lorsqu’il sort. L’entrepreneur à sa manifestation de générosité qui l’a entrainé en zone de chasse interdite, voire à s’y
installer, sans que le moindre barrage ne l’ait empêché, convaincu de
n’avoir enfreint aucune norme face au mutisme du garde qui s’est joué
de sa bonne foi. A ce petit jeu de mots, la pièce que l’entrepreneur a
entre les mains perd aussi bien pile que face. Il subit le poids de la
forme indissociable du couple responsabilité/culpabilité dans lequel la
culpabilité est préjugée pour tout ce qui est initiative individuelle.
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institut présaje
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"michel rouger"
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LES MOTS DE L´ENTREPRENEUR ET CEUX DE L’ETAT
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## Le risque.
Il fait partie du quotidien de l’entrepreneur. Sans lui, pas de vertu
stimulatrice dans l’effort. Avec lui, l’apprentissage des moyens de le
maîtriser, sous toutes les formes qu’il revêt. Le seul outil disponible
pour éviter qu’il se réalise en détruisant le projet reste l’esprit de
prévention. L’Etat préfère l’esprit de précaution face aux risques que
tout assujetti rencontrera et qu’il entend protéger. Il en a fait une
loi constitutionnelle. Ce qui déprécie tout effort de prévention.
Puis, faute pour l’administration de pouvoir ni tout bloquer ni tout interdire,
elle laisse des trous dans les sécurités des systèmes étatiques
construits, de fait, pour une protection illusoire. Le mot de risque
change alors totalement de sens selon qu’il pèse sur l’entrepreneur,
même bénévole, réputé, voire préjugé, à la fois responsable et coupable, et l’Etat, au besoin pour sa propre raison, à la fois non coupable et
irresponsable devant les tribunaux réservés au vulgaire.
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institut présaje
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"michel rouger"
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LES MOTS DE L´ENTREPRENEUR ET CEUX DE L’ETAT
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## L’expérience.
L’entrepreneur ne peut compter que sur elle, la sienne comme celle de
ceux qui l’accompagnent dans son projet, pour affronter les défis qu’il
rencontrera dans sa démarche créative, sa recherche de liberté, sa prise de risques et de responsabilités. Une expérience faite d’une
accumulation d’efforts, de sens pratique, de réalisme, de maîtrise des
réussites comme des échecs, en un mot, de qualités humaines de
générosité que la malignité, tout aussi humaine, peut faire brigandage.
L’Etat, grand organisateur des carrières de ses serviteurs, voit dans
l’expérience individuelle sur laquelle ils pourraient exercer leur
office ou leurs missions, matière à détournement de pouvoir et
d’autorité. La théorie, pièce maîtresse du concours d’accès au statut,
dessine la carrière administrative dans le moule de laquelle le
serviteur sera coulé corps et âme. Avec une différence entre le
guichetier d’en bas, qui gère les assujettis, rivé à son indice et à son échelle, et les grands serviteurs des administrations centrales seuls
autorisés à pantoufler dans le monde des grandes entreprises, donc plus
ouverts aux expériences de ceux qui ont contribué à les créer.
Les maux de l’économie expriment ce que disent les mots de ceux qui la créent et de ceux qui la contrôlent quand ils ne l’administrent pas directement ou
indirectement. On dit le Français peu doué pour les langues. C’est vrai
pour celles de l’économie !
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institut présaje
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"françois lainée"
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DIRIGEANTS D’HYPER-CROISSANCE, DES INCONNUS PORTEURS D’ESPOIR !
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# Dirigeants d’hyper-croissance, des inconnus porteurs d’espoir ! À la source de notre croissance se trouvent une poignée de sociétés, les PME d’hyper-croissance. Des entreprises capables de croître beaucoup et durablement, parce qu’elles maîtrisent la vraie innovation, savent équilibrer exigences et gratification de leur personnel, et surtout ont à leur tête des dirigeants d’exception, explique François Lainée. Portrait robot des entreprises et des équipes qui donnent à espérer dans la relève du pays. La croissance ! Mot magique, fluide perdu, carburant sociétal… Elle semble disparue, on la cherche et l’implore. Et pourtant, avant d’être cette abstraite déesse macroéconomique, elle est le résultat de choix de tous les jours, ceux des consommateurs quand ils passent à l’acte, et ceux de dirigeants qui font grossir leur entreprise et, pour ce faire, produisent, vendent, investissent. Et, au cœur de la croissance, cachés dans le maquis des milliers d’entreprises de notre pays, il y a un petit groupe d’exceptions : les sociétés d’hyper-croissance. Ce sont ces PME, de 50 à 2000 employés qui, malgré leur taille déjà conséquente, voient leurs effectifs continuer de croître, significativement (plus de 15% annuellement), régulièrement (plus de 3 ans sur les 5 dernières années). On en compte en France moins de 2.000, sur un total de 28.000 sociétés de la taille indiquée, soit moins de 7%.
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institut présaje
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"françois lainée"
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DIRIGEANTS D’HYPER-CROISSANCE, DES INCONNUS PORTEURS D’ESPOIR !
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Ont-elles des points communs ? A première vue très peu. On en trouve en effet dans le commerce autant que dans l’industrie (15% chacun), et surtout dans les services, notamment aux entreprises (55%). Des sociétés de haute technologie, certainement, éditeurs de logiciels (Neolane, TraceOne), ingéniéristes (Nexeya), ou conseils (Niji,Oxand) mais pour une faible part. Et par contre, beaucoup de sociétés à l’activité peu glamour, comme le nettoyage (Austral, Lustral) ou la sécurité (Technigarde, GLN, S2curité), industriels, ou divers commerces. Beaucoup n’exportent pas, et croissent malgré tout, montrant que le lien entre emploi et mondialisation est bien moins simple qu’on ne voudrait souvent le croire. A-t-on alors affaire à l’archétype de l’entrepreneur fondateur, parti de rien et toujours aux commandes de sa société ? Eh bien non. Près de la moitié de ces sociétés sont filiales de grands groupes, et conservent pourtant une vitesse de croissance forte dans la durée, et les patrons des sociétés indépendantes, souvent, ne les ont pas fondées.
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institut présaje
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2013-06-01
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"françois lainée"
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DIRIGEANTS D’HYPER-CROISSANCE, DES INCONNUS PORTEURS D’ESPOIR !
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## La clé d’une offre innovante
Pourtant, premier indice, tous les dirigeants d’hyper-croissance que j’ai pu rencontrer sont d’accord sur un point : à la fondation de leur capacité à hyper-croître se trouve… une offre innovante. Mais pas l’innovation dont trop souvent encore on rêve chez nos ministres, avec des brevets et de la science pointue. L’innovation, celle dont le juge de paix est, et n’est que le marché. Ainsi Sogal, un fabricant de placards, sans brevets, a connu une croissance forte et durable en faisant percevoir son offre comme des solutions à agrandir l’espace. Ce concept lui a ouvert toutes grandes les portes de l’Asie, lieu où la place est rare ; ses gammes industrielles ont fait le reste ensuite.
Autre point commun très clair : l’hyper-attention portée aux ressources humaines. Le recrutement, d’abord, exercice difficile car l’hyper-croissance exige des employés une capacité à se remettre en cause en permanence, à savoir décider en univers incertain, à être très autonome tout en jouant en équipe. Un environnement pas fait pour tout le monde. Aussi, en conséquence, ceux qui sont embauchés sont traités avec autant d’attention qu’ils connaissent d’exigence. Dans ces sociétés, l’immense majorité des dirigeants a pour règle la tolérance à l’échec, et le souci de réorienter avec une seconde chance les employés qui n’ont pas trouvé leurs marques dans un premier poste. Ainsi dans une société de voyages personnalisés sur Internet, une hôtesse d’accueil est devenue patronne d’agence locale, et un chef de produit export attaché de presse, tous deux bien à leur place dans leurs nouvelles fonctions.
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institut présaje
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2013-06-01
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"françois lainée"
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DIRIGEANTS D’HYPER-CROISSANCE, DES INCONNUS PORTEURS D’ESPOIR !
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## Une envie de dépassement
Mais ces deux points communs trouvent leur origine dans un troisième, qui est le faisceau de caractéristiques personnelles hors du commun qui se retrouvent chez les dirigeants de ces entreprises.
Des ressemblances qui ne tiennent pas aux études, aux itinéraires qui les ont amenés là, ni même vraiment à l’âge où ils sont devenus dirigeants d’hyper-croissance, mais plutôt à des qualités touchant au caractère. Tout d’abord ils sont animés d’une envie insatiable de dépassement, certains poursuivant la croissance comme le but en soi, d’autres la subissant comme le résultat du désir forcené de satisfaire parfaitement les clients. Conséquence de cette ambition, l’exigence qu’ils imposent à toute activité dans l’entreprise ; pour eux le bien est l’ennemi du mieux, quel que soit le domaine. Troisième caractéristique, contrepoint nécessaire de la seconde, leur culture de l’erreur ; ils reconnaissent les leurs, ce qui leur donne plus de chances de les corriger, et leur permet aussi d’accepter celles des autres. Ensuite ils sont tous tournés vers l’extérieur de l’entreprise, dirigeant eux-mêmes la stratégie, et s’impliquant de manière forte dans le développement commercial, et le recrutement, plutôt que la R&D ou la finance. Enfin, une clé de voûte de leur savoir-croître est la capacité réelle à recruter des adjoints meilleurs qu’eux dans chacun des domaines. Régner par la médiocrité n’est pas à leur menu et ils ne craignent pas qu’un jour on les remplace (même si cela arrive), parce qu’ils ont conscience que leur savoir-faire de chef d’orchestre est en lui-même unique.
Dans les temps difficiles que nous traversons, ces dirigeants inconnus, trop peu nombreux hélas, sont des porteurs d’espoir. Leur nombre, leur santé, leur moral, devraient être les indicateurs avancés que scrutent nos autorités et, peut-être, des modèles pour nos gouvernants.
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institut présaje
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"philippe rouger"
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DE L’AIDE AU DIAGNOSTIC À LA RÉVOLUTION DU BIG DATA INDIVIDUEL
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# De l’aide au diagnostic à la révolution du Big data individuel Volume, variété, vélocité. La règle des trois V appliquée depuis longtemps aux données de la météorologie, de la finance ou du marketing s’impose désormais dans l’univers de la santé, ouvrant des brèches dans l’espace de vie intime des individus. Mais, explique Philippe Rouger, le Big data n’est que l’une des composantes technologiques de la révolution à venir dans la médecine. Lors des multiples conférences qui se tiennent sur le thème de la santé et de la médecine, on entend généralement des médecins expliquer comment ils comptent utiliser les outils du Big data. Essayer de comprendre comment le Big data va lui-même exploiter les techniques de la médecine serait sans doute plus intéressant si l’on veut comprendre quels sont les enjeux et les risques que représentent les évolutions actuelles. Le terme de Big data a été rapidement récupéré par le marketing et appliqué à toutes sortes de produits mettant en œuvre des données, qu’il s’agisse de statistiques, d’analyse de données ou encore d’open data, ce qui a créé une certaine confusion. En réalité, on peut parler de Big data lorsque les trois V suivants sont réunis : un énorme volume de données, une très grande variété dans la nature de ces données, et enfin une extrême vélocité dans leur production. Les données du Big data se renouvellent en effet tous les jours, voire toutes les heures ou même à chaque instant. La première application du Big data s’est faite dans la météorologie, pour laquelle on a créé l’expression de data science. Au fil du temps et de l’amélioration des algorithmes et outils de calculs appliqués à ces données, les prévisions sont devenues de plus en plus justes, d’abord à un jour, deux jours, trois jours, puis à une semaine et davantage.
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institut présaje
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2016-04-01
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"philippe rouger"
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DE L’AIDE AU DIAGNOSTIC À LA RÉVOLUTION DU BIG DATA INDIVIDUEL
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Une autre application spectaculaire est celle de la finance : des serveurs à haute fréquence analysent en temps réel des volumes colossaux de données, identifient des tendances et passent automatiquement des ordres d’achat ou de vente. Aujourd’hui, 60 % des ordres donnés en Bourse sont formulés par des machines.
## Les applications du Big data à la santé
Dans le domaine de la santé, le Big data va tout d’abord permettre d’améliorer le diagnostic des maladies chroniques grâce au recueil et à l’analyse d’un très grand volume de données. Il servira également à compiler l’ensemble des données administratives et à mieux les gérer. Enfin, on commence à voir se dessiner la notion de Big data individuel, qui permettra à chaque personne d’accéder à ses données génétiques mais aussi aux données biologiques résultant de ses interactions avec son environnement et évoluant en permanence, ce qui représentera un volume de données incommensurable. Cette approche est encore émergente et, pour le moment, n’est pas autorisée en France ni dans une partie de l’Europe.
Une révolution pour la médecine À mon sens, le Big data ne suffira pas en lui-même à révolutionner la santé. Il faudra, pour cela, qu’il s’accompagne d’autres révolutions technologiques qui auront également un impact très important sur la santé, comme le développement de la télémédecine, les autoanalyseurs, les nanotechnologies, les objets connectés. Tous ces outils génèreront des données qui pourront être recueillies et traitées dans le cadre du Big data, ce qui permettra, sinon de révolutionner la médecine, du moins de la faire fortement progresser.
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institut présaje
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2016-06-01
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BREXIT, QUELLE INCIDENCE SUR LA NORMALISATION COMPTABLE ?
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# Brexit, quelle incidence sur la normalisation comptable ? La normalisation comptable est aussi une affaire de politique. Au sein de l'union européenne, la Grande-Bretagne exprimait jusqu'ici le point de vue de l'école juridique anglo-saxonne face à l'école juridique représentée par l'Allemagne et la France. Elle a joué un rôle actif dans l'adoption des règlements européens en matière d'IFRS. Quelle sera la suite à donner en cas de retrait des instan ces communautaires ? La normalisation comptable internationale des entreprises est, au-delà de sa dimension juridique, une affaire politique. Au sein de l'union européenne, la Grande-Bretagne a joué un rôle déterminant dans l'adoption, par l'Europe, des IFRS, fortement marquées par la culture juridique anglo-saxonne. Dès lors, si la Grande-Bretagne devait sortir de l'union européenne, la question se poserait moins du maintien (à priori évident) des IFRS pour les entreprises anglaises que de l'influence de la Grande-Bretagne dans le processus de normalisation internationale. Si elle demeure confidentielle en raison de sa complexité, la normalisation comptable internationale des entreprises cotées présente un réel enjeu politique tant pour la Grande Bretagne que pour l’Europe qui, depuis un règlement de 2002, a adopté le référentiel international (les IFRS, International Financial Reporting Standards) établi par un normalisateur privé, l’IASB (International Accounting Standards Board) le rendant obligatoire pour les comptes consolidés de toutes les entreprises cotées européennes. Celles-ci disposent, à travers ce référentiel, d’un langage comptable commun non seulement pour l’Europe, mais au-delà puisque les IFRS sont aujourd’hui appliquées par plus de 100 pays dans le monde.
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BREXIT, QUELLE INCIDENCE SUR LA NORMALISATION COMPTABLE ?
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Dès lors, au-delà de la question de son impact sur l’économie britannique, le Brexit pose également celle, financière et politique, de savoir si les normes comptables utilisées par les plus grandes entreprises britanniques sont susceptibles de changer et, par contrecoup, celle de savoir, dans quelle mesure les choix de l’Europe pourraient être modifiés, en ce domaine, par la sortie des britanniques de l’Union européenne.
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BREXIT, QUELLE INCIDENCE SUR LA NORMALISATION COMPTABLE ?
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## Quels impacts pour les britanniques ? Ironie de l’histoire peut-être, la normalisation comptable internationale trouve ses racines en Grande-Bretagne. Initié dès les années 1970 par un anglais, Henry Benson, associé du cabinet Coopers and Lybrand, le processus de normalisation comptable internationale est alors confié à un organisme privé basé à Londres, l’International Accounting Standards Committee (IASC) devenu en 2001 l’IASB. Il vise concrètement à permettre la compatibilité et la comparabilité dans le monde de l’information financière diffusée par les grandes entreprises sur les marchés financiers. Après l’échec, dans les années 1970/1980, d’une harmonisation comptable européenne, la Commission européenne va faire le choix politique, en 2002, d’adopter les normes comptables élaborées par l’IASB, leur application étant fixée au 1er janvier 2005. Pour ce faire, la Commission recourt alors à un outil juridique fort, le règlement, dont l’application est immédiate et directe dans tous les Etats membres Les britanniques ont non seulement mis en œuvre ce règlement, et toutes leurs sociétés cotées s’y conforment, mais ils sont au-delà de cette application. Dans le cadre du transfert des responsabilités de normalisation nationale de l’Accounting Standard Board (ASB) au Financial Reporting Council (FRC) en 2012, ce dernier a émis trois normes importantes (FRS 100 à 102), applicables à compter du 1er janvier 2015 à la fois au Royaume-Uni et en Irlande. Ces normes ouvrent la possibilité pour toutes les sociétés, même non cotées, d’appliquer pour l’établissement de leurs comptes sociaux, les normes IFRS telles qu’adoptées par l’UE, avec certaines simplifications en matière de notes annexes pour les sociétés faisant partie d’un groupe publiant des comptes consolidés selon les normes IFRS telles qu’adoptées par l’UE.
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BREXIT, QUELLE INCIDENCE SUR LA NORMALISATION COMPTABLE ?
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A défaut d’utiliser cette possibilité, les sociétés doivent appliquer FRS 102, ou FRS 105 pour les plus petites entreprises, normes globales directement inspirées de la norme IFRS pour les PME, sous réserve de certaines adaptations à la règlementation européenne et à la loi anglaise sur les sociétés. En outre, et alors que la Commission européenne débat aujourd’hui de l’éventuelle élaboration de normes comptables internationales pour le secteur public, les EPSAS («European Public Sector Accounting Standards»), la Grande-Bretagne a, depuis 2009, adopté, pour les comptes de l’Etat (WGA, Whole of Government Accounts), des normes directement inspirées des IFRS. Dans ce contexte, le Brexit pourrait ne pas avoir, ou très peu, de conséquences sur la réglementation comptable britannique. Plaident en faveur d’une sorte de statu quo : le caractère récent des normes comptables internationales, l’attachement manifesté par la Grande-Bretagne à ces normes qui ont vocation à s’appliquer aux entreprises privées, cotées ou non, mais aussi aux comptes de l’Etat, ainsi que l’intérêt pour les entreprises britanniques, en particulier celles cotées, d’utiliser un référentiel comptable universellement reconnu disposant de l’équivalence avec les normes comptables américaines, les US GAAP, évitant ainsi de coûteux exercices de transposition. La Grande-Bretagne devrait donc continuer à s’appuyer sur les IFRS dont l’élaboration mais aussi l’interprétation sont assurées par des organismes privés au sein desquels l’Union européenne cherche simplement à exercer une réelle influence.
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BREXIT, QUELLE INCIDENCE SUR LA NORMALISATION COMPTABLE ?
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Sans doute la procédure d’adoption des normes pourrait être modifiée, puisque la Grande-Bretagne, qui ne serait plus liée par le Règlement européen de 2002, pourrait soumettre l’application des IFRS à une procédure d’adoption interne se réservant le choix de les refuser et/ou de les interpréter selon ses propres critères. La Grande-Bretagne pourrait donc faire directement référence aux IFRS et non aux IFRS telles qu’adoptées par l’UE ou encore aux IFRS telles qu’adoptées par le Royaume Uni; mais ce dernier cas semble à ce stade improbable les entreprises britanniques ne faisant pas actuellement usage des exceptions autorisées par l’UE. Se posera néanmoins la question de savoir si les normes comptables britanniques continueront pour le futur d’être également celles de l’Irlande, question dont on conviendra qu’elle se pose plus pour l’Irlande que pour la Grande-Bretagne.
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BREXIT, QUELLE INCIDENCE SUR LA NORMALISATION COMPTABLE ?
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## Quels impacts pour l'union européenne ?
Le principal effet d’un Brexit se poserait en terme d’influence : quelle capacité d’influence la Grande Bretagne pourrait-elle garder sur les règlementations européennes et, plus globalement, dans l’élaboration des normes comptables internationales ? Ne dit-on pas que l’échec d’une harmonisation comptable pour l’UE est essentiellement dû à la divergence entre l’école juridique continentale menée par la France et l’Allemagne et l’école juridique anglo-saxonne représentée par la Grande-Bretagne ? Cet échec n’a-t-il pas favorisé l’essor de l’initiative anglaise d’une normalisation comptable internationale, que l’on dit toute imprégnée de l’esprit du capitalisme anglo-américain par opposition au capitalisme rhénan ? Le siège de l’IASB ne se trouve-t-il pas à Londres, à quelques mètres de celui du FRC ? Quelle serait la place des anglais au sein des différents organismes, internationaux et européens (ARC, EFRAG etc.. à supposer que le Royaume-Uni reste membre de l’AELE) qui participent au processus de normalisation comptable ? Peut-on imaginer qu’un anglais assure la présidence ou la vice-présidence, comme par le passé, de l’IASB ?
Finalement c’est rappeler que la normalisation comptable internationale est, au-delà de la technique, une affaire politique, tout comme le BREXIT qui pourrait bien secouer la Grande-Bretagne dans des domaines que l’on pouvait penser épargnés.
Michel Barbet-Massin, Associé Mazars et Yvonne Muller-Lagarde, Maître de conférences en droit privé, Université Paris Ouest Nanterre.
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LES DROITS INDIVIDUELS RECONFIGURÉS PAR LE BIG DATA
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# Les droits individuels reconfigurés par le Big data
Les questions de santé font partie des préoccupations du Défenseur des droits. Le témoignage d’Alain-Michel Ceretti est doublement instructif. A titre professionnel, il dirige une entreprise d’électronique et à titre personnel, son épouse ayant contracté une infection nosocomiale, il a fondé avec elle une association, Le Lien, destinée à défendre le droit des malades. C’est ce qui l’a conduit à occuper des fonctions auprès des médiateurs de la République.
Jusqu’à ce jour, le pôle santé de l’institution du Défenseur des droits n’a eu à traiter qu’un faible nombre de dossiers liés à la question du Big data. En 2014 et 2015 tous portent sur la divulgation d’informations personnelles via Internet, à la suite d’incidents techniques ou de manipulations erronées. Le pôle santé n’a pas constaté de volonté de nuire ni de problème
## L’intérêt des données de santé pour les acteurs publics et privés
Le Big data représente un outil précieux pour de nombreux acteurs publics et privés de la santé. Pour une agence régionale de santé par exemple, connaître le nombre de personnes souffrant du diabète de type 2 et leur profil en termes d’âge facilite la mise en place de moyens correspondant aux besoins. Mais c’est également un outil de décision industrielle et commerciale pour les acteurs fabriquant des dispositifs médicaux et des médicaments liés à cette pathologie. Les données du Big data devraient également permettre aux industriels de mieux gérer les risques liés à leurs produits, grâce au suivi des personnes y ayant eu recours.
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"alain-michel ceretti"
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LES DROITS INDIVIDUELS RECONFIGURÉS PAR LE BIG DATA
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## Le SNIIRAM
En France, il existe d’ores et déjà une grande base de données, le SNIIRAM (Système National d’Information Interrégimes de l’Assurance Maladie), qui collecte les informations sur les soins reçus par les assurés et permet aux territoires de santé de se doter des moyens nécessaires. Cette base présente l’intérêt de couvrir l’ensemble de la population française, alors que dans les pays où les patients doivent recourir à des assurances privées, les données sont fragmentées entre plusieurs entreprises. Le système français bénéficie aussi d’outils très performants de suivi des profils des patients et de la façon dont ils sont pris en charge.
La loi qui est actuellement en préparation va ouvrir la base du SNIIRAM aux industriels en leur imposant un certain nombre de conditions. En particulier, l’exploitation des données ne devra pas revêtir de caractère commercial, formule qui va probablement entraîner énormément de contentieux.
Par ailleurs, le législateur distingue les données qui ne permettent pas d’identifier les personnes et celles qui permettent de le faire par recoupement ou « rechaînage ». L’utilisation des unes sera complètement ouverte et celles des autres soumise à conditions.
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LES DROITS INDIVIDUELS RECONFIGURÉS PAR LE BIG DATA
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## Les données issues des objets connectés
À côté de cette base de données officielle, il existe de très nombreuses autres données, en particulier celles recueillies par les objets connectés, dont on ne sait pas vraiment quelles sont leur qualité ni leur fiabilité, sans parler de leur statut juridique. Combien de fois chacun de nous a-t-il cliqué sur une case pour certifier qu’il avait pris connaissance des conditions générales d’utilisation d’une application, sans même avoir ouvert la page correspondante ?
Certaines de ces applications sont gratuites, d’autres payantes. Dans le premier cas, en l’absence de bannières publicitaires, on peut se demander comment l’éditeur du logiciel gagne de l’argent. Souvent, il propose des services payants ou des dispositifs médicaux à connecter au smartphone, mais on peut supposer aussi qu’il revend les données à des tiers.
C’est ainsi qu’on a vu récemment publier une étude sur l’évolution du poids en fonction des âges dont la source était Withing, célèbre fabricant de balances électroniques. D’aucuns considèreront que ce n’est pas grave : «Quelle importance si Withing utilise gratuitement mes données, dans la mesure où il me fournit en contrepartie un service qui m’intéresse ?» On peut cependant craindre que ce genre d’utilisation ne soit qu’un début.
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"alain-michel ceretti"
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LES DROITS INDIVIDUELS RECONFIGURÉS PAR LE BIG DATA
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## La certification des applications
Il y a quelques années, on trouvait dans les supermarchés des yaourts censés exercer un effet bénéfique sur la santé. Une réglementation a été mise en place et, désormais, aucun fabricant de produits alimentaires ne peut se prévaloir de résultats en matière de santé sans les avoir démontrés. Il devra en être de même en ce qui concerne les applications concernant la santé.
En 2013, on dénombrait aux États-Unis 165 000 objets connectés susceptibles d’avoir impact sur la santé et vendus comme tels. On en est aujourd’hui à plus de 300 000 et de nouveaux objets apparaissent chaque jour. Le secteur connaît actuellement une bulle et comme toujours dans ce cas, de très nombreux acteurs, petits, moyens et grands, se positionnent. Il est nécessaire que les pouvoirs publics instaurant une régulation pour ne pas laisser les consommateurs démunis devant la multiplication des objets et les risques qu’ils peuvent présenter.
Des premières sanctions viennent d’ailleurs de tomber aux États-Unis : la Federal Trade Commission, en charge de ces questions, a infligé une amende de 150 000 $ à la société Carrot Neurotechnology pour avoir indiqué sans preuve scientifique suffisante que son application pouvait améliorer la vision.
En France, le Conseil de l’Ordre demande des mesures similaires, mais je n’ai pas vu de disposition de ce type dans le projet de loi Santé.
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"alain-michel ceretti"
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LES DROITS INDIVIDUELS RECONFIGURÉS PAR LE BIG DATA
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## L’aide au diagnostic
Depuis quelques années, il existe des logiciels d’aide au diagnostic. En France, les sociétés proposant ces applications doivent être agréées par la Haute Autorité de Santé pour que leur produit puisse être installé sur l’ordinateur d’un médecin.
Le logiciel Watson, développé par IBM, est capable de réaliser des calculs à une vitesse extraordinaire, ce qui peut s’avérer extrêmement précieux dans le traitement des cancers, pour lequel on s’oriente vers une approche individuelle sur la base du séquençage ADN des tumeurs. Le nombre des messages chimiques transmis par une tumeur cancéreuse est d’environ trois milliards, ce qui représente dix téraoctets d’informations. Aucun être humain, si compétent soit-il, ne pourrait gérer une telle masse d’information. Le logiciel d’IBM est capable d’établir la cartographie de la tumeur en moins d’une seconde à partir de ces données et de définir le traitement adéquat.
## Le risque de dépendance à des entreprises privées
Le premier séquençage complet d’un génome humain, réalisé en 2003, avait coûté deux milliards d’euros. Aujourd’hui, le prix d’un séquençage n’est plus que de mille dollars, et il va probablement tomber à cent ou même à dix dollars assez rapidement, ce qui va créer un véritable marché.
Google et Apple ont pris une avance considérable dans ce domaine. Si la France ne se dote pas d’une plateforme sécurisée permettant de recueillir ce type de données et de s’en servir pour des traitements, elle risque de se retrouver, vis-à-vis de ces firmes américaines, dans la même situation de dépendance qu’au lendemain de la guerre en matière d’antibiotiques.
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TRANSPARENCE, QUALITÉ DE L’INFORMATION, PROTECTION DES DONNÉES PRIVÉES : L’ACTION DE L’UNION EUROPÉENNE
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# Transparence, qualité de l’information, protection des données privées : l’action de l’Union européenne
En 2012, la Commission européenne a présenté un projet de réforme de la protection des données personnelles. Que s’est-il passé depuis lors ? Pour Bruno Gencarelli, l’un des porteurs du projet et négociateur de l’accord de 2015 conclu avec les Etats-Unis, le droit de la protection des données personnelles et plus largement de la vie privée a désormais atteint sa maturité.
Le droit de la protection des données personnelles,et plus largement de la vie privée, a fait l’objet d’une constitutionnalisation à travers la Charte des droits fondamentaux, dont l’article 8 est désormais contraignant. Il a également trouvé une base juridique spécifique dans le Traité européen, qui permet à l’Union européenne de légiférer en la matière, et du reste un très important paquet législatif est actuellement en cours de négociation. Enfin, le droit de la protection des données personnelles fait l’objet d’une jurisprudence abondante et particulièrement protectrice à la Cour de justice, que ce soit à propos du rôle des autorités de contrôle indépendantes (les CNIL), du droit des individus et en particulier du droit à l’oubli, ou encore de la prise en compte de la protection des données dans les domaines sensibles comme la prévention et la répression des infractions pénales.
## La matière première de l’économie numérique
Ces évolutions juridiques n’ont fait qu’accompagner l’ampleur prise par la collecte, le traitement et le partage des données à caractère personnel, qui sont devenues la véritable matière première de l’économie numérique. Ces données irriguent la recherche et constituent désormais un aspect essentiel de très nombreuses activités.
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TRANSPARENCE, QUALITÉ DE L’INFORMATION, PROTECTION DES DONNÉES PRIVÉES : L’ACTION DE L’UNION EUROPÉENNE
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## Une nouvelle pertinence pour la protection des données personnelles
La question de la protection des données met en évidence un paradoxe.
Alors qu’on parle d’étanchéité pour des données dites sensibles ou ultra-sensibles les données de santé, on s’aperçoit que les données en question peuvent être agrégées et combinées avec d’autres : les frontières tombent. On observe également que des notions comme le principe de finalité sont brouillées : il devient difficile d’anticiper quel usage sera fait des information recueillies.
L’émergence du Big data a ainsi paradoxalement pour effet de conférer une nouvelle pertinence à la notion de protection des données privées, alors que cette notion pouvait paraître dépassée et, si j’ai bien compris, réservée aux «vieux cons»
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"bruno gencarelli"
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TRANSPARENCE, QUALITÉ DE L’INFORMATION, PROTECTION DES DONNÉES PRIVÉES : L’ACTION DE L’UNION EUROPÉENNE
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## Vers de nouvelles avancées législatives ?
La nécessité de protéger la vie privée est déjà prise en compte dans le droit national, depuis la loi Informatique et liberté de 1978, et dans le droit européen, depuis la directive de 1995.
Nous nous efforçons maintenant d’obtenir de nouvelles avancées. Le consentement à la communication des données devrait être explicite. La qualité de l’information fournie pourrait être meilleure, et les pages en petits caractères, que personne ne lit, pourraient être remplacées par des icônes ou par des symboles graphiques. Les finalités du traitement des données devraient être spécifiées. Le droit applicable devrait être clairement déterminé : dès qu’il y a ciblage d’un utilisateur européen et/ou fourniture d’un service, le droit européen devrait s’appliquer, indépendamment de la localisation de la société. La question des transferts internationaux devrait également être clarifiée, sachant que, le plus souvent, les données recueillies traversent l’Atlantique. Nous travaillons aussi sur les questions de discrimination, notamment à propos des profils de santé qui pourraient constituer une barrière à l’embauche.
La réforme du cadre législatif en matière de protection des données est en voie d’adoption. Elle en est actuellement à la phase des trilogues, c’est-à-dire de la négociation finale entre les trois institutions, Parlement, Conseil et Commission. Le nouveau cadre législatif comportera trois grands axes.
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"bruno gencarelli"
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TRANSPARENCE, QUALITÉ DE L’INFORMATION, PROTECTION DES DONNÉES PRIVÉES : L’ACTION DE L’UNION EUROPÉENNE
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## Rationalisation et simplification
Le premier concerne la rationalisation et la simplification du cadre réglementaire en matière de protection des données. L’adoption d’un règlement au lieu d’une directive permettra de mettre fin à la fragmentation des droits nationaux, dans une matière qui est par définition transfrontalière.
La simplification se traduira par la suppression de nombreuses obligations de notification d’autorisations préalables, qui se sont avérées peu efficaces en matière de protection des données. On passera d’un système ex ante à un système ex post, avec des mécanismes internes de contrôle (évaluation d’impact, obligation de documentation…) et des mécanismes externes, comportant notamment la possibilité de sanctions financières crédibles.
Cette démarche de simplification et d’harmonisation, qui traverse l’ensemble du texte, se heurte à certaines limites, notamment dans le domaine qui nous intéresse aujourd’hui, celui de la santé. C’est un effet un domaine où les compétences de l’Union européenne sont limitées et où les États membres sont soucieux de préserver certains particularismes nationaux.
Notre proposition prévoyait, par exemple, l’adoption de mesures communes de réduction des risques, comme le recours à la pseudonymisation, mais les résistances des États membres se sont avérées relativement fortes en la matière.
## Renforcement des droits des individus
Le deuxième axe est le renforcement et la mise à jour des droits des individus. À partir du socle que constituent le droit national, le droit européen de 1995 et les droits tels que l’accès à l’information et à sa rectification, nous proposons d’introduire des droits nouveaux tels que le droit à la portabilité des données. Un individu devrait pouvoir faire déplacer ses données d’un fournisseur de services à un autre, ce qui lui permettrait de choisir celui qui lui apporte davantage de garanties en matière de protection et de sécurité des données. La concurrence serait ainsi renforcée et les barrières à l’entrée abaissées.
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institut présaje
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"bruno gencarelli"
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TRANSPARENCE, QUALITÉ DE L’INFORMATION, PROTECTION DES DONNÉES PRIVÉES : L’ACTION DE L’UNION EUROPÉENNE
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## La mise en œuvre du droit
Le troisième axe est celui de la mise en œuvre du droit. En 2014, on a constaté une augmentation de 50 % des incidents de sécurité. Compte tenu de la valeur des données personnelles, les conséquences de ces incidents sont de plus en plus sérieuses, et ce risque concerne aussi bien le secteur privé que le secteur public.
Or, il ne peut pas y avoir de règle de droit crédible s’il n’existe pas de sanction crédible attachée à sa violation. C’est pourquoi nous proposons de permettre aux CNIL européennes d’imposer des sanctions financières proportionnelles au poids des entreprises en cause, c’est-à-dire calculées par rapport à leur chiffre d’affaires.
Au-delà de ce système de sanction, nous proposons un véritable changement de gouvernance en matière de protection des données. Aujourd’hui, chaque CNIL agit sur son propre territoire, alors que les affaires dont nous parlons sont transfrontalières et ont un impact pour l’ensemble des citoyens européens ou pour une grande partie d’entre nous.
C’est pourquoi nous proposons la création d’un guichet unique pour les recours. L’instruction des dossiers serait assurée par l’une des autorités nationales qui devrait décider des mesures à prendre avec les autres autorités concernées. Il ne s’agirait pas de créer une super autorité européenne mais bien un système reposant sur la mise en réseau des CNIL européennes et sur leur collaboration.
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"pascal durand"
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QUI SERA LE GARDIEN DE NOTRE VIE INTIME ?
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# Qui sera le gardien de notre vie intime ?
Autrefois, le patient venait consulter le médecin quand il se sentait mal. Aujourd’hui, on passe d’une logique de la demande à une logique de l’offre. Il circule sur notre planète autant de données électroniques que d’étoiles dans l’univers. Qui organise, qui contrôle, qui finance le traitement des données de santé ? Pour Pascal Durand, qui plaide pour un retour au droit “dur”, le Big data pose aussi un problème de souveraineté aux Etats et à l’Europe.
Au cours de l’Antiquité, un basculement s’est opéré entre le monde des Grecs, qui terminaient leurs lettres par «Sois heureux», et celui des Romains, qui les concluaient par «Porte-toi bien». On est passé du souhait d’une vie harmonieuse à une préoccupation centrée sur le mens sana in corpore sano. Aujourd’hui, non seulement nos concitoyens continuent à se préoccuper de leur santé, mais ils revendiquent le droit de ne plus être malades, et bientôt peut-être le droit de ne plus mourir. Le corps médical et le monde de la santé tout entier sont désormais confrontés à cette logique du zéro risque.
Face à cette situation, on peut aller soit vers le meilleur, soit vers le pire des mondes. Le rôle de la science, mais aussi des juristes, est de trouver un juste équilibre. À un moment où on n’entend parler que de soft law et où l’on nous explique que les professions peuvent s’autoréguler sans qu’il soit besoin de légiférer, j’apprécie les propos des porteurs du projet de réforme présenté par la Commission européenne sur l’impossibilité d’affirmer un droit sans prévoir les sanctions correspondantes. L’ex avocat que je suis se réjouit de constater que la Commission se met à nouveau à aimer le droit «dur», sans lequel, effectivement, il n’y a pas de vie en société possible.
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"pascal durand"
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QUI SERA LE GARDIEN DE NOTRE VIE INTIME ?
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## Qui financera le traitement des données de santé ?
Il existe d’ores et déjà, sur notre planète, autant de données électroniques que d’étoiles dans l’univers. Le problème n’est plus de collecter les données : elles s’offrent spontanément. Dans le passé, c’était le médecin qui interrogeait le patient venu le consulter : «Comment vous sentez-vous ? Avez-vous mal plutôt ici ou plutôt là ?» Désormais, le patient envoie lui-même ses données au médecin. Parfois même, les informations sont transmises aux médecins sans le consentement du patient, ou avec un consentement fictif. Le vrai problème n’est donc plus celui de la collecte, mais celui du traitement. Qui va traiter toutes ces données ? À quel coût ? Et qui prendra ce coût en charge ?
Qui financera le traitement des données du Big data en matière de santé ? Il est peu probable que ce soit l’État, compte tenu du déficit auquel il est confronté. Sa prise en charge sera vraisemblablement assurée soit par un partenariat public-privé, soit directement par des acteurs privés, comme c’est déjà le cas, pour l’essentiel, aux États-Unis.
## De la documentation à la manipulation ?
Ceci entraînera un autre type d’évolution. Dans le passé, lorsqu’un patient consultait un médecin, c’était généralement parce qu’il se sentait mal, même s’il y a toujours eu des hypocondriaques. Désormais, on passe de la logique de la demande à celle de l’offre : les gens vont être sollicités en permanence par des offres de santé : « Attention à votre pression artérielle ! Faites-vous suffisamment de sport ? Comment va votre cœur ?» On peut craindre alors de passer de la documentation à la manipulation.
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"pascal durand"
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QUI SERA LE GARDIEN DE NOTRE VIE INTIME ?
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## Qui sera le gardien de notre vie intime ?
Jacques Ellul observait que la technique allait toujours plus vite que son environnement socio-économique et juridique et, sur ce point, il avait raison. La captation des données électroniques est une réalité objective et acquise : quoi que nous fassions, les données seront collectées. Nous allons maintenant devoir «courir» derrière ce nouveau phénomène et poser des garde-fous pour éviter les dérives.
Le Conseil d’État a déjà eu à se prononcer à propos des appareils respiratoires utilisés pour lutter contre les apnées du sommeil. Sachant que ces appareils ont un coût, la tentation était grande, pour l’État qui est en déficit, de contrôler si les patients les utilisent ou non et, le cas échéant, de leur imposer des sanctions. De même, on pourrait imaginer que les pouvoirs publics cherchent à vérifier si les patients prennent bien leurs médicaments, ce qui nécessiterait qu’ils pénètrent dans la sphère d’intimité des personnes. Fort heureusement, le Conseil d’État s’est opposé à ce que nous entrions dans une telle logique. Mais il y a de quoi s’inquiéter pour l’avenir, surtout sachant que nous aurons de plus en plus affaire à des acteurs privés. Pour paraphraser une formule d’Antoine Garapon, qui sera le gardien de notre vie intime
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institut présaje
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"pascal durand"
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QUI SERA LE GARDIEN DE NOTRE VIE INTIME ?
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## Préserver la souveraineté des États et de l’Europe
Cela m’amène à une question essentielle, celle de la souveraineté. Nous évoquons l’évolution des textes sur la protection des données personnelles au niveau français et européen. Mais le droit n’existe qu’à travers la souveraineté. Or, le Traité transatlantique qui est en train d’être négocié a vocation à supprimer les juridictions nationales, voire européennes, pour aller vers une juridiction supranationale.
Dans ces conditions, quel sera l’organe juridictionnel chargé de faire en sorte que tous les textes dont nous discutons soient respectés et appliqués ? Allons-nous confier le contrôle des grands groupes industriels qui sont en train de collecter des données personnelles à de simples juridictions arbitrales, qui n’auront de compte à rendre à aucun État ni à aucun parlement ou instance Ne soyons pas naïfs : au moment où le Big data va jouer un impact majeur sur notre vie, nous ne devons surtout pas renoncer à nos systèmes de contrôle, qu’ils soient médicaux ou judiciaires. Il en va de la survie de nos valeurs et même, j’oserais dire, de notre civilisation.
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VERS UNE DICTATURE SCIENTIFIQUE DES DONNÉES PERSONNELLES ?
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# Vers une dictature scientifique des données personnelles ?
Adélaïde a 35 ans... Elle adore les "applis" mobiles dédiées à la santé et au bien-être. Elle utilise une balance digitale, un tensiomètre, une montre connectée et une variété d’autres capteurs reliés à des cabinets médicaux, des entreprises, des laboratoires ou des organisations quelque part en Europe ou dans le monde. Christiane Féral-Schuhl part d’un exemple fictif pour décrire le basculement très concret de nos contemporains "branchés" dans un monde peu soucieux de la protection de la sphère intime des individus.
Il y a trente ans déjà, une petite association, l’AMII (Association médicale d’informatique individuelle), se réunissait au sous-sol du siège de l’Ordre des médecins, dans le 7ème arrondissement. Ses membres, des médecins passionnés d’informatique, réfléchissaient aux questions liées à l’utilisation des technologies dans leur exercice professionnel, notamment avec la mise en place annoncée de la carte vitale.
J’avais été invitée à participer à certains de leurs débats et je me souviens que, dès cette époque, la question centrale était de savoir à qui appartenaient les données de santé. En effet, tous les professionnels intervenant auprès du patient (médecin, infirmière, garde-malade...) n’y avaient pas le même accès. Quid dans ce contexte du secret professionnel ? Plus largement, des règles d'éthique ?
En trente ans, beaucoup de choses se sont passées, en particulier le clonage de la brebis Dolly, et le Meilleur des mondes décrit par Aldous Huxley n’est plus de la science-fiction.
Pour répondre à la question posée « vers une dictature scientifique des données personnelles ? », je vous propose de vous présenter une jeune femme que nous appellerons Adélaïde.
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## L’exemple d’Adélaïde Agée de 35 ans, Adélaïde est cadre supérieur dans une banque, « pacsée » et mère de deux enfants. Elle a pris l’habitude d’utiliser une balance digitale, un tensiomètre, une montre connectée, des lentilles spéciales qui lui permettent de surveiller son taux de glycémie car elle a été alertée sur les risques de diabète, etc. Ces différents objets connectés lui permettent de collecter en continu des informations sur son corps et sur son cerveau : poids, calories absorbées et dépensées, température, pression artérielle, souffle, clignements de paupières, variations d’humeur, bâillements... Vous l’avez compris, elle est totalement fan des appli mobiles dédiées à la santé et au bien-être et elle n’a que l’embarras du choix avec plus de 100 000 applications téléchargeables ! Elle s’est même équipée d’un fauteuil « intelligent » qui lui permet d’évaluer en moins de 10 minutes son état de santé, y compris son acuité visuelle et auditive. Son plateau-repas, après son footing, sera programmé pour tenir compte de toutes ces données. Son coach l’accompagne efficacement à distance car il peut analyser les données et ainsi l’aider à atteindre son objectif : perdre trois kilos. Il peut ajuster son régime et son programme sportif au jour le jour. Ces données sont également télétransmises à une startup américaine, Flatiron Health, qui a pour mission de dépister les éventuels cancers, ainsi qu’à Diabéo, une filiale de Sanofi qui suit l’évolution du taux de glucose dans le sang des patients diabétiques. L’Hôpital américain, également destinataire, est équipé du supercalculateur Watson qui gère son dossier médical, régulièrement mis à jour par les praticiens ayant l’occasion d’examiner Adélaïde. Ce dossier comprend aussi les résultats de toutes les analyses qu’elle a effectuées depuis sa naissance ainsi que les antécédents médicaux familiaux.
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Ces informations sont par ailleurs transmises aux services de l’Assurance maladie, qui peut ainsi vérifier qu’Adélaïde prend bien les traitements qui lui sont prescrits, sans oublier son courtier d’assurance santé, qui est parvenu à lui obtenir des réductions sur ses primes d’assurance car il a démontré qu’elle suit un régime strict et applique des règles d’hygiène irréprochables. Le cabinet d’audit M. est également destinataire de ces données car Adélaïde a été sélectionnée parmi d’autres volontaires pour participer à des essais cliniques qui lui permettront d’obtenir des points de fidélité. Enfin, le médecin d’Adélaïde est au cœur du dispositif. Il peut ainsi contrôler les éventuels effets secondaires des médicaments en suivant à distance, au moyen d’un algorithme, les douleurs qu’elle ressent de manière aléatoire sur le côté droit et qu’elle lui a signalées. Lorsqu’elles se produisent, elles provoquent une alerte graduée, en fonction de l’importance de la douleur, sur son ordinateur. Adélaïde n’a pas besoin de se préoccuper de quoi que ce soit : tous ces capteurs travaillent pour elle et son coach numérique, doublé d’un agenda électronique, lui dit, à la seconde près, quelle conduite elle doit tenir. Son alimentation est automatiquement programmée en tenant compte de ses goûts, de ses allergies et de ses intolérances. Dernier détail : son compte Facebook lui envoie des alertes sur l’état de santé de ses amis, ce qui lui permet d’éviter de rencontrer ceux d’entre eux qui sont enrhumés ou grippés ! Cette description n’est pas futuriste : tous les dispositifs évoqués existent d’ores et déjà, en 2015. Non seulement ils permettent à Adélaïde de conserver une bonne santé, mais celle-ci peut légitimement penser qu’elle participe au bien collectif.
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Elle pourra vous expliquer que l’analyse de ces données, avec celle de millions d’autres, permettront de réduire la mortalité (certaines applications permettent de prévoir la diffusion des épidémies à partir des données ou de dépister des maladies par la génétique), de prévenir un risque de maladie à partir du génome (médecine prédictive), notamment les pathologies chroniques dont les paramètres sont bien identifiés et reliés à des mécanismes physiologiques clairs (par exemple pour suivre l’évolution du taux de glucose dans le sang et partager les données par smartphone vers le médecin). Elle vous dira que cela permet d’adapter les traitements à certains types de patients, en fonction de leur profil génétique (médecine personnalisée) et d’aider les professionnels à poser des diagnostics ou faire un choix de traitement pour les patients, de vérifier les effets secondaires des médicaments pour mieux les prévenir, par exemple en croisant les données enregistrées par l’assurance maladie, on pourrait observer le taux d’hospitalisation des patients prenant tel ou tel médicament (pharmacovigilance)...
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## Des données sensibles
Ces données, recueillies à la fois à l’occasion des diverses activités d’Adélaïde et lors des examens médicaux qu’elle subit, sont toutefois considérées comme sensibles car elles révèlent toutes les fragilités de cette jeune femme, par exemple sa vulnérabilité au stress ou aux épidémies, ou encore ses risques cardio-vasculaires.
En fait, il s’agit de données « ultra » sensibles qui touchent à la sphère s’agit de données que, parfois, l’on ne partage même pas avec ses proches les plus intimes.
Ces données sont d’autant plus sensibles qu’elles ne désignent pas forcément un comportement actif, qui pourrait être contrôlé, mais des caractéristiques propres à une personne.
On touche à ce que le professeur Gérard Cornu appelle, «la sphère d’intimité chacun».
Rappelons ce qu’écrivait le professeur Jean Carbonnier à cet égard : «Il sied d’accorder à l’individu une sphère secrète de vie d’où il aura le pouvoir d’écarter les tiers.»
## Un consentement et une sécurité renforcés pour l’individu
D’où l’importance, dès qu’il s’agit des données de santé de l’individu, de renforcer le principe de l’autodétermination informationnelle, c’est-à-dire la possibilité pour chacun de décider de communiquer ou de ne pas communiquer ses données.
D’où l’importance également de renforcer la sécurité des données de santé. C’est dans cet objectif que le législateur a exigé que l’hébergement informatique des données médicales soit assuré par un hébergeur agréé (Agence des systèmes d'informations partagées de santé - ASIP santé), garantissant de hauts niveaux de sécurité, et a fixé des règles de sécurité et de confidentialité pour tous les établissements de santé : exigence d’anonymat, chiffrement des données, recours au codage des données nominatives, etc.
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## Un sentiment trompeur de sécurité À la question posée «Allons-nous vers une dictature scientifique des personnelles ?», il est probable qu’Adélaïde répondrait par la négative : «Ce n’est pas une dictature. Je maîtrise la situation, j’améliore mon bien-être, je vais peut-être réussir à me débarrasser de ces trois kilos qui me pourrissent la vie, je suis autonome dans la gestion de ma santé.» Adélaïde ignore probablement que toutes ces données sont collectées à son insu via les historiques de navigation sur les moteurs de recherche, les blogs, les sites, et qu’il est désormais possible d’analyser les conversations sur Facebook : 51 % d’entre elles porteraient sur des questions de santé, permettant d’alerter sur l’état contagieux de ses « amis » ! Elle ne sait sans doute pas que ces données sont croisées, reformatées, optimisées, exploitées également à son insu, vendues à prix d’or. Elle ignore que même les bases de données publiques anonymisées peuvent permettre une identification indirecte des personnes, car celles-ci sont toujours désignées par un même numéro d’anonymat. Elle n’imagine pas que les algorithmes utilisés pour optimiser le fonctionnement d’un certain nombre de services présentent le risque « d’enfermement de l’internaute dans une personnalisation dont il n’est pas maître. »^1^, ni même qu’ils sont faillibles et qu’ils peuvent provoquer une erreur, par exemple à la suite d’un bug dans un logiciel d’aide au diagnostic. Le patient risque de se trouver enfermé dans une situation dont, loin de la maîtriser, il lui sera très difficile de sortir. Enfin, elle ne sait pas que ces données pourraient tomber entre les mains de personnes non autorisées. Par exemple un employeur éventuel qui n’a aucune envie de recruter une personne qui risque d’être malade un jour sur deux. La capacité de travail ou la résistance au stress pourraient devenir des critères de sélection.
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De leur côté, les compagnies d’assurance pourraient envisager de proposer des offres plus onéreuses à des personnes en situation de maladie, de faiblesse ou de vulnérabilité, ou encore présentant des antécédents familiaux. Les banques pourraient sélectionner les dossiers de prêts. Le responsable du service de bioéthique de l’UNESCO m’expliquait il y a déjà quelques années que les maladies génétiques peuvent désormais être anticipées au moins deux générations à l’avance... Adélaïde croit qu’elle reste libre, à tout moment, de collecter et de communiquer ou non ces données. Elle ne se rend pas compte qu’un jour, peut-être, ceux qui refuseront de le faire seront considérés comme ayant quelque chose à cacher.
## « La vie privée, un problème de vieux cons ? »
D’ores et déjà, 7 millions de Français ont été séduits par la santé connectée et, d’après Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, on assiste à l’émergence d’une nouvelle norme sociale à ce sujet : «Les gens sont désormais très à l’aise avec l’idée de partager davantage d’informations, de manière plus ouverte et avec davantage d’internautes.» Certains considèrent même que le débat sur la vie privée est complètement dépassé, à l’instar de son ouvrage «La vie privée, un problème de vieux cons ?».
Je reste également convaincue que c’est à l’individu et à nul autre de choisir ce qu’il rend public ou non. A lui et à lui seul de décider si, comme le suggère Stefan Zweig « seule l’illusion rend heureux, non le savoir », ou si, selon la vision de Rousseau, « le monde de l’illusion vaut mieux que la réalité car nous y trouvons plus de plaisir ».
S’il est parfois préférable de ne pas savoir, à tout le moins, posons en règle que c’est toujours à l’individu de choisir !
^1^ Rapport Conseil d’Etat 2014
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L’ACCÈS AUX DONNÉES PERSONNELLES, L’EXEMPLE DU DOSSIER MÉDICAL NUMÉRIQUE
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# L’accès aux données personnelles, l’exemple du dossier médical numérique
La France dispose d’un solide arsenal de protection des données de santé à caractère personnel explique Marjorie Obadia qui a eu l’occasion d’aborder la question des droits des patients et des professionnels de santé à la direction des affaires juridiques de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris.
D’après l’article 2 de la loi Informatique et liberté de 1978, texte particulièrement protecteur, une «donnée à caractère personnel» se définit comme «toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée, par un référence à un numéro d’identification ou à un ou plusieurs éléments qui lui sont propres».
Quant aux «données de santé à caractère personnel», elles recouvrent bien plus données liées à la personne physique elle-même. Selon le projet de Règlement européen relatif aux données personnelles, il s’agit de «toute information relative à la santé physique ou mentale d’une personne, ou à la prestation de services de santé à cette personne».
La loi Informatique et liberté interdit la collecte et le traitement des données personnelles concernant les origines raciale ou ethnique, les opinions politiques, syndicales, philosophiques et religieuses des personnes, mais également les données concernant la santé et tout particulièrement la vie sexuelle, à l’exception «des traitements nécessaires aux fins de la médecine préventive, de la recherche médicale, des diagnostics médicaux, de l’administration de soins ou de traitements, ou à la gestion des services de santé, et mis en œuvre par un membre d’une profession de santé».
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L’ACCÈS AUX DONNÉES PERSONNELLES, L’EXEMPLE DU DOSSIER MÉDICAL NUMÉRIQUE
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## Les droits du patient Depuis la loi Kouchner de 2002, le patient a un droit d’accès aux données le concernant, et en particulier au dossier médical constitué par les établissements publics de santé comme ceux de l’AP-HP. Il s’agit aussi bien du dossier médical papier, comprenant les comptes-rendus d’hospitalisation et de consultation, les examens de laboratoire, ou encore l’imagerie médicale, que du dossier informatique ou informatisé. L’établissement de santé est le gardien et non le propriétaire de ces données. Il doit en assurer la bonne tenue et la communication au patient, ce qui pose souvent des problèmes très concrets d’extraction de données issues de systèmes d’information et de répertoires très divers en fonction des services et des spécialités présents au sein d’un même hôpital. Le dossier en question doit être exhaustif et la jurisprudence de la CNIL en excepte uniquement les notes personnelles du médecin. Le dossier médical étant considéré comme un document administratif, il existe une jurisprudence parallèle, celle de la CADA (Commission d’accès aux documents administratifs). L’approche de la CADA est sans doute moins protectrice du patient que celle de la CNIL, qui s’efforce souvent de prémunir le patient contre lui-même. À un établissement de santé qui se demandait s’il avait le droit de communiquer à un patient son dossier médical à travers une simple adresse mail, comme celui-ci l’exigeait, la CADA a répondu que le patient était un adulte censé mesurer les risques qu’il prenait pour lui-même ou pour autrui et en assumer la responsabilité.
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En ce qui concerne le dossier médical informatisé, l’article 39 de la loi de 1978, rappelé à l’article 43 du même texte, prévoit que le patient a le droit de demander la rectification, le complément ou l’effacement de certaines mentions «pour un motif légitime». La jurisprudence est toutefois assez restrictive sur cette notion de «motif légitime ». Le patient a également le droit de s’opposer à ce que les données à caractère personnel le concernant fassent l’objet d’une collecte ou d’un traitement, sauf si ce traitement répond à une obligation légale ou si ce droit est expressément écarté par la disposition spéciale de la CNIL qui a autorisé le traitement en question. En vertu des articles 25 et 26 de la loi de 1978, la CNIL jouit ainsi d’une prérogative que ses détracteurs jugent abusive sur le traitement et la conservation des données dites sensibles, en particulier toutes les données qui pourraient être visées par l’interdiction concernant la vie privée, les origines raciales ou les mœurs figurant à l’article 8. Enfin, le patient a droit à une information a priori et systématique sur son droit d’accès aux données le concernant et de rectification de ces données, ainsi que sur les droits généraux liés à la personne.
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L’ACCÈS AUX DONNÉES PERSONNELLES, L’EXEMPLE DU DOSSIER MÉDICAL NUMÉRIQUE
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## Les droits des professionnels de santé
La loi Informatique et liberté pose que l’ensemble des données médicales liées au parcours de santé du patient dans l’établissement doivent être accessibles, dans son intérêt, à tous les professionnels de santé qui le prennent en charge.
Le Code de la Santé publique définit l’équipe de soin de façon très restrictive : il s’agit des professionnels de santé directement concernés par la prise en charge médicale du patient. L’article 25 du projet de loi Santé marque à cet égard une ouverture, puisque l’équipe médicale serait élargie à l’ensemble des professionnels participant directement ou indirectement aux actes de diagnostic et aux actes thérapeutiques, de compensation du handicap ou de prévention de la perte d’autonomie, c’est-à-dire à la sphère non seulement médicale mais médico-sociale et sociale.
Le consentement du patient ne serait requis que pour des personnes extérieures à cette équipe de soin entendue au sens large.
## Les droits des chercheurs
Je n’ai pas le temps de développer beaucoup le dernier point, sur l’accès aux données personnelles au titre de la recherche et des études sur les politiques de santé publique.
Nous devrons être attentifs à l’article 43 du projet de loi de Marisol Touraine qui prévoit que les chercheurs puissent avoir accès non seulement à la base de données SNIIRAM mais à la base PMSI (Programme de médicalisation des systèmes d’information) et à d’autres bases nationales.
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LES FINANCES PUBLIQUES DU ROYAUME-UNI : LE BREXIT POURRAIT FAIRE RECHUTER UN MALADE EN CONVALESCENCE
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# Les finances publiques du Royaume-Uni : le Brexit pourrait faire rechuter un malade en convalescence Le panache et le romantisme insulaire des prosélytes du Brexit ne doit pas faire oublier qu’en dépit des communiqués triomphants sur la croissance et l’emploi, la situation des finances publiques du Royaume-Uni est encore très fragile. Une sortie de l’Union européenne se traduirait par des pertes de recettes qui la dégraderait fortement. Il s’y ajouterait une période d’attentisme préjudiciable à l’activité. Rapportées au PIB, les dépenses publiques du Royaume-Uni ont augmenté de 5 points de 2000 à 2007 alors que la hausse des recettes a été inférieure à 1 point. La situation de ses finances publiques était ainsi très fragile en 2007, avec un déficit public de 3,0 % du PIB et un déficit structurel (corrigé des fluctuations du PIB) de 4,3 % du PIB selon la Commission européenne. Elle s’est fortement dégradée avec la crise de 2008-2009 et les mesures de relance qui ont été prises : en 2009, le déficit public était de 10,8 % du PIB, le déficit structurel de 8,0 % du PIB et la dette publique a atteint 86,2 % du PIB (contre 40,2 % en 2000). Les années 2009 à 2015 ont été marquées par une forte baisse des dépenses publiques, de plus de 6 points de PIB (de 49,6 à 43,2 %), et une légère hausse des recettes (moins de 1,5 point). Le déficit public a donc été nettement réduit, de même que le déficit structurel.
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LES FINANCES PUBLIQUES DU ROYAUME-UNI : LE BREXIT POURRAIT FAIRE RECHUTER UN MALADE EN CONVALESCENCE
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Le déficit public reste néanmoins très important en 2015 (4,4 % du PIB) et la dette a frôlé le seuil de 90 % du PIB. En outre, si les dépenses publiques ont bien diminué en euros constants, la baisse du ratio dépenses / PIB résulte aussi pour partie de la forte croissance de son dénominateur (le PIB a augmenté de 2,0 % en moyenne annuelle en volume), qui n’est probablement pas durable. Cela se traduit par le maintien du déficit structurel à un niveau également très élevé (4,5 % du PIB). La situation des finances publiques du Royaume-Uni reste donc très fragile et une sortie de l’Union européenne pourrait la dégrader de nouveau très fortement. Les conséquences d’un tel événement sont largement imprévisibles. D’un strict point de vue économique, les études publiées sur ce sujet (cf. notamment l’analyse de l’OCDE et le rapport du HM Treasury) mettent en avant deux types d’effet, comme le note le « office of budget responsability » (l’homologue du Haut Conseil des finances publiques) dans son dernier rapport. A long terme, la réduction des échanges commerciaux avec l’Union européenne aurait un effet négatif sur la productivité du Royaume-Uni, surtout du fait d’une moindre concurrence, et donc sur le PIB, le pouvoir d’achat et finalement le produit des prélèvements obligatoires. Les estimations de cet effet divergent fortement d’une étude à l’autre, et il serait positif selon certaines, notamment parce que les auteurs prennent des hypothèses plus ou moins favorables au Royaume-Uni sur les nouvelles relations qu’il entretiendrait avec l’Union européenne et les autres pays développés. L’Europe commettrait toutefois une très lourde erreur si elle acceptait de renégocier ses relations avec un pays qui la quitte dans des conditions favorables à celui-ci.
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"françois ecalle"
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LES FINANCES PUBLIQUES DU ROYAUME-UNI : LE BREXIT POURRAIT FAIRE RECHUTER UN MALADE EN CONVALESCENCE
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Il est donc plutôt probable que l’impact sur le PIB et les recettes publiques du Royaume-Uni serait fortement négatif. Comme ses dépenses publiques sont déjà à un bas niveau par rapport aux autres pays, il serait difficile de les réduire plus. Il existe des marges de hausse des prélèvements obligatoires, mais au détriment du niveau de vie des ménages et de l’attractivité du pays, qui sera déjà affectée par l’éloignement de l’Europe. Une nouvelle aggravation du déficit et de l’endettement public est donc prévisible. A plus court terme, les études économiques mettent surtout en avant l’incertitude pour les décideurs économiques qui résultera de la mise en place de nouvelles relations avec l’Union européenne. Il est certain que l’incertitude a un impact négatif sur les décisions d’investissement et de recrutement des entreprises, au moins un effet d’attente, et la seule certitude est que la définition de nouvelles relations avec l’Union européenne sera longue et difficile. Il n’est pas possible d’exclure de violents mouvements de capitaux avec des effets déstabilisateurs si l’échec de ces négociations est anticipé. Il convient enfin de noter que la contribution du Royaume-Uni au budget de l’Union européenne n’est pas un véritable enjeu de finances publiques. Nette des rabais obtenus et des transferts de l’Union en faveur du Royaume, elle ne représente que 0,3 % du PIB.
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POURQUOI LES BRITANNIQUES SONT TENTÉS PAR LE BREXIT
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# Pourquoi les Britanniques sont tentés par le Brexit “Brexit” ou “Remain” ? Au lendemain du référendum du 23 juin, l’Europe ouvrira une nouvelle page de son histoire. Qu’elle le veuille ou non, la Grande-Bretagne y sera associée. Bruxelles l’exaspère mais elle est déjà affranchie d’une bonne part de ses contraintes. La jeune génération sera-t-elle plus à l’aise que ses aînés pour réconcilier le coeur et la raison ? Il est parfaitement possible que le 23 juin les Britanniques votent pour quitter l’Union Européenne. Les élites du pays – le monde des affaires et de l’éducation, les professions libérales – sont pour la grande majorité dans le camp “Remain”. Le gouvernement conservateur est déchiré, depuis le conseil de ministres jusqu’aux députés. Ses militants, souvent âgés, soutiennent le camp du “Brexit”. Le Labour Party s’est prononcé officiellement pour le maintien dans l’Union (“pro-Remain”), mais le parti - profondément divisé – pèse peu dans la campagne. La classe ouvrière, soutien traditionnel du Labour Party, s’est laissée séduire par l’United Kingdom Independence Party (UKIP). Ce dernier a recueilli 14 % des votes lors de l’élection de 2015, mais le double dans certaines circonscriptions traditionellement Labour dans le nord de l’Angleterre. En Ecosse, le Labour historiquement majoritaire, s’est fait battre sèchement aux élections de 2015 par le parti national (Scottish National Party -SNPégalement pro Remain), ne conservant qu’un seul siège de député au parlement. La défaite du Labour aux élections l’a fait réagir en portant à sa tête un leader plus marqué à gauche, Jeremy Corbyn, qui s’engage peu dans la campagne pour le maintien dans l’Union Européenne.
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"david curry"
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POURQUOI LES BRITANNIQUES SONT TENTÉS PAR LE BREXIT
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La presse populaire la plus lue en Grande Bretagne fait campagne agressivement pour le “Brexit”. Avec les sondages 50/50 (mais 30% de l’électorat est toujours indécis) la grande question est de savoir s’il y aura une réaction populiste contre l’establishment - un moment Trump! Pourquoi ce scepticisme manifeste à l’égard de ce que les britanniques ne cessent d’appeler “l’Europe” ? En réalité les relations du Royaume Uni avec le reste de l’Europe ont été biaisées dès le départ, bien qu’il y ait également des raisons plus récentes à cette réticence. Le Royaume Uni a boudé la création de ce qui est maintenant l’Union Européenne. C’était le seul pays européen à ne pas avoir été battu lors de la seconde guerre mondiale et, avec encore un empire considérable, se considérait toujours comme une grande puissance. Pour les pays continentaux, la création de “l’Europe” était une façon d’imposer la paix. Mais c’était également un moyen de retrouver une identité, de l’influence, et en quelque sorte une integrité politique et nationale. Quand la Grande Bretagne a finalement demandé à adhérer à la CEE c’était parce que sa vision de l’après-guerre s’était révélée être une illusion. C’était un symbole de la perte de sa position de grande puissance, de son déclin économique et de ce que l’on pourrait décrire comme un manque de confiance nationale. Le double veto du Général de Gaulle ne fit que souligner ce déclin en position et en influence.
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"david curry"
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POURQUOI LES BRITANNIQUES SONT TENTÉS PAR LE BREXIT
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Quand la Grande Bretagne est devenue membre de l’Union Européenne, il a été annoncé à la population britannique que l’objectif était économique, et non politique. L’Union Européenne était censée apporter à “l’homme malade de l’Europe” un traitement de choc. Le Royaume Uni a toujours été plus à l’aise avec la notion du développement du Marché commun et a toujours défendu la position d’une économie ouverte au monde. Il a toujours été mal à l’aise avec un programme d’engagement politique mais favorable à l’élargissement, en partie parce que cet élargissement rend plus difficile la réalisation d’une Europe politiquement intégrée. Le Royaume Uni a réussi à formaliser une semi-indépendance au sein de l’Union: il n’appartient pas à l’union monétaire; il n’a pas signé l’accord de Schengen; et en matière de droit et de justice s’est réservé le droit de choisir les éléments qui lui conviennent. Conformément aux négociations de David Cameron en début d’année, le Royaume Uni ne participera pas à la construction d’une “union sans cesse plus étroite entre les peuples européens”, pour reprendre les termes du préambule du Traité de Rome. Des événements plus récents ont renforcé les réticences britanniques. Sa position économique s’est inversée du fait de la révolution Thatcher. Le Royaume Uni figure maintenant en tête de file des économies européennes tandis que le reste de l’Europe connaît des problèmes de chômage persistants. L’échec quasi total des grands pays continentaux, en particulier la France, à réformer un marché du travail sclérosé et à créer une économie plus compétitive est un mystère absolu pour les Britanniques. Thatcher’s children (les héritiers de Madame Thatcher) décrivent maintenant l’Union Européenne comme une organisation du passé et non du futur.
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institut présaje
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"david curry"
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POURQUOI LES BRITANNIQUES SONT TENTÉS PAR LE BREXIT
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La situation ne s’est pas améliorée avec l’introduction d’une monnaie unique sans la mise en place du système de contrôle économique et politique qui aurait été nécessaire à son succès. Tandis que le camp “Remain” ne cesse d'insister sur l'économie, le camp “Brexit” brandit l'argument de l'immigration. L'économie relativement saine de la Grande Bretagne et sa croissance du marché de l'emploi (avec un taux de chômage deux fois moins important qu’en France) se sont révélés être très attractifs pour les candidats à l'immigration. Les derniers chiffres montrent qu'en 2015 l'immigration nette (après déduction de l'émigration hors du pays) était de 333.000 dont 184.000 venant de l'UE (58.000 de la Roumanie et de la Bulgarie). Selon l'Office of National Statistics la population de l'Angleterre seule devrait avoir augmenté de 4 millions de personnes d’ici 2024. Le camp Brexit évoque la pression que de tels chiffres exercent sur le logement, l'éducation, les services de santé et souligne son effet négatif sur les salaires. Il soutient que l'immigration est hors de contrôle et que ce contrôle ne peut s'exercer qu'en sortant de l'Union Européenne. Le gros problème pour David Cameron est que lors des élections générales de 2010 il s'était engagé à réduire l'immigration nette à moins de 100.000 par an. Mission impossible !!! Quand David Cameron est arrivé au pouvoir il a cherché à faire face aux divisions obsessionnelles de son parti sur l’Europe en promettant un référendum IN/OUT. Mais il est clair que même si le camp du oui l’emportait largement, cela ne rapprocherait pas pour autant le Royaume Uni de la vision de l’Europe qu’ont les “continentaux”.
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institut présaje
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2016-06-01
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"david curry"
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POURQUOI LES BRITANNIQUES SONT TENTÉS PAR LE BREXIT
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Un vote britannique pour le “Brexit” aurait des conséquences dramatiques, car il renforcerait les mouvements populistes anti-européens sur le continent. Cela donnerait également à l’Allemagne une position encore plus dominante dans l’Union. Les alliés du Royaume Uni seraient désorientés et le Président Poutine assisterait, sans doute avec grande satisfaction, au spectacle d’une alliance occidentale à la dérive. Le camp “Remain” met en garde les Britanniques de ne pas s’aventurer dans l’inconnu. Le problème est que beaucoup n’aiment pas ce qu’ils connaissent - l’Europe - bien plus qu’ils ne craignent l’aventure à laquelle les invite un vote pour le “Brexit” !
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institut présaje
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"michel rouger"
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EDITORIAL : NOUVEAU CYCLE
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# Editorial : Nouveau cycle En terminant mon hommage à l'équipe de rédaction de nos 80 lettres publiées entre 2002 et 2015 53 sous forme papier, 27 sous forme électronique j'ai annoncé dans notre dernière édition de Presaje.Com un nouveau cycle de publications pour 2016. Il se met en place avec la lettre numéro 28, réalisée par une nouvelle équipe issue de notre conseil d'administration. Jacques BARRAUX assure la continuité de la rédaction avec Isabelle PROUST et Philippe ROUGER, président des Editions PREMICES en charge de la diffusion de nos publications. Xavier LAGARDE, vice président de PRESAJE, devient président de ses publications. Sur le fond, les contenus publiés respecteront les spécialités reconnues comme étant la marque de notre Institut, la Justice, le Droit, l'Economie, la Finance et le Sport. Cette lettre, comme la précédente, traite d'un autre sujet, majeur dans la période que nous vivons, celui de la Santé. Si l'explosion des banques de données gérées par des sociétés américaines vient bouleverser les activités des êtres humains, dans la Santé elles attaquent leurs personnes physiologiques, psychologiques et leur identité génétique. Pour comprendre ces bouleversements il suffit de faire référence au décryptage du fonctionnement d'une cellule cancéreuse qui ouvrirait la voie à un traitement de ce fléau. Les bases de données actuelles, les moyens de calcul qu'elles offrent, permettront rapidement de traiter les centaines de milliards d'informations utiles pour comprendre les dérèglements d'une seule cellule cancéreuse. À quel prix ? Pour qui ? Le débat est ouvert dans la communauté scientifique médicale, laquelle, faute de disposer aujourd’hui des moyens de stockage de données et de calculs, reste dépendante des traitements médicamenteux ou chirurgicaux qui ont permis de sérieuses avancées sur cette horrible maladie. A nouveau, à quel prix et pour qui ?
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institut présaje
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"michel rouger"
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EDITORIAL : NOUVEAU CYCLE
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La compétition sera vite ouverte entre deux modes de traitement, qui pourrait en révéler un troisième qui s’écarterait aussi bien des Big data que des Big pharma. Il faudra du temps. C’est pourquoi PRESAJE veut sensibiliser son lectorat sur un sujet qui occupera les prochaines décennies. C’est aussi pourquoi, à raison du poids des images dans la pédagogie de notre époque vous retrouverez l’esprit de nos lettres sous la forme d'images vidéo diffusées sur le site TV duquel PRESAJE a choisi d'être partenaire.
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institut présaje
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"thomas cassuto"
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SANTÉ ET VIE PRIVÉE À L’HEURE DE L’INVASION DU NUMÉRIQUE PLANÉTAIRE
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# Santé et vie privée à l’heure de l’invasion du numérique planétaire
Comment trouver le bon équilibre entre la recherche du progrès pour tous – que facilite le numérique - et la protection de notre vie privée ? L’Institut Presaje avait organisé en septembre 2015 un colloque avec France Amérique et l’Association française des docteurs en droit sur les conséquences du basculement général des données personnelles dans la fournaise mondiale. Ce numéro de Presaje.Com est consacré aux temps forts des débats animés par Thomas Cassuto.
Mon smartphone est doté d’une application grâce à laquelle il me suffit de poser mon pouce sur l’écran pour connaître ma pression artérielle. Je constate que celle-ci est actuellement de 115 sur 73 et ce résultat vient probablement d’être envoyé aux quatre coins du monde. Sans doute vais-je recevoir prochainement des incitations à adopter un nouveau régime alimentaire ou à acheter des produits susceptibles d’améliorer mon fonctionnement cardio-vasculaire.
Lorsque j’ai téléchargé ce logiciel, j’ai vraisemblablement accepté des conditions générales dont je n’ai compris ni le sens ni la portée. En particulier, je n’ai pas de certitude sur la juridiction à laquelle je devrais faire appel si cette application me donnait des informations erronées et si, par exemple, elle me laissait penser que je suis en bonne santé alors que je suis malade.
Autre exemple de l’arrivée du Big data dans le domaine de la santé : depuis 2008, moteur de recherche Google se dit capable de prévoir l’apparition des épidémies de grippe avec dix à quinze jours d’avance sur les organismes de veille sanitaire, simplement en dénombrant les requêtes formulées sur ce thème. Des données personnelles peuvent donc être recueillies même sans passer par une application telle que celle que j’ai installée sur mon smartphone.
Ne peut-on craindre que toutes ces données parviennent un jour chez nos assureurs et que ceux-ci, lorsqu’ils constateront que nous ne sommes pas en bonne santé, s’opposent à nos demandes de crédit ou nous imposent des surprimes ?
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institut présaje
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"thomas cassuto"
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BREXIT, UN MOMENT DE VÉRITÉ POUR L’EUROPE JUDICIAIRE. IMPROBABLES PERSPECTIVES JUDICIAIRES D'UNE HYPOTHÈSE
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# Brexit, un moment de vérité pour l’Europe judiciaire. Improbables perspectives judiciaires d'une hypothèse
Depuis son entrée dans la Communauté, le Royaume-Uni a constamment revendiqué un statut à part. Une attitude qui a pu contribuer aux lenteurs de la construction d’une Europe judiciaire. Concrètement, le dénouement des liens en cas de Brexit aurait plus de conséquences négatives outre-Manche que dans le reste de l’Union. En s’enfermant dans une indépendance confinant à l’isolement, le Royaume-Uni prendrait même le risque de rendre le droit continental plus attractif.
Le 13 octobre 2014, l'Institut PRESAJE organisait à Paris un colloque sur le thème « quel avenir pour la coopération judiciaire en Europe ? ». Le sujet était vaste, mais il n'occultait pas la question de la coopération judiciaire avec le Royaume-Uni. Sylvie Petit-Leclair, Procureure générale évoquait notamment que cette coopération était possible... et que les différences entre les systèmes ne pouvaient être un obstacle en soi. En effet, si la coopération judiciaire n'apparaît pas être un élément central du marché commun instauré en 1957, elle peut à certains égards illustrer la difficulté de la relation entre les îles britanniques et le continent. Car, naturellement, en créant un ordre juridique supranational, l'UE se devait de se doter des moyens de le faire respecter et de protéger ses citoyens.
Pourtant, la construction d'une Europe judiciaire constitue l'un des chantiers les moins aboutis l'Union. En effet, alors que le marché commun a connu un développement accéléré, la conception et la mise en œuvre d'une politique pénale destinée à protéger ce marché commun a fait défaut. Dans ce contexte, de manière quasi paradoxale, la perspective d'un Brexit laisse entrevoir peu de conséquences pour les continentaux et de bien plus négatives, y compris sur le terrain de la souveraineté, pour les sujets de sa Majesté.
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institut présaje
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"thomas cassuto"
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BREXIT, UN MOMENT DE VÉRITÉ POUR L’EUROPE JUDICIAIRE. IMPROBABLES PERSPECTIVES JUDICIAIRES D'UNE HYPOTHÈSE
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1. Un Brexit sans grande conséquences judiciaires en Europe continentale La mise en œuvre des Traités de Maastricht puis de Lisbonne a instillé l'idée que le Royaume-Uni n'était pas véritablement dans l'UE. Dans le cadre du troisième pilier, les décisions cadres, devaient être adoptées à l'unanimité, la Commission ne disposait pas de pouvoir de constatation de manquement. Ainsi, les dispositions de ces instruments étaient rédigées dans un langage peu contraignant et leur transposition par les États membres ne pouvait guère être critiquée. S'agissant de la libre circulation des personnes, la position du Royaume-Uni devait conduire à la création d'un Espace Schengen excluant les Iles Britanniques et conduisant à un contrôle aux frontières, sans grande plus-value sur le plan de la sécurité.
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institut présaje
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"thomas cassuto"
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BREXIT, UN MOMENT DE VÉRITÉ POUR L’EUROPE JUDICIAIRE. IMPROBABLES PERSPECTIVES JUDICIAIRES D'UNE HYPOTHÈSE
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L'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne devait confirmer cette tendance. En effet, à l'issue d'une période transitoire de 5 ans, le troisième pilier était communautarisé, la Commission retrouvant de jure une plénitude de juridiction pour sanctionner sa parfaite transposition. Mais, le Royaume-Uni se voyait octroyer un double mécanisme d'option, d'une part sur le paquet du troisième pilier et d'autre part sur les mesures adoptées consécutivement. Ainsi, le Royaume-Uni, dispose du droit discrétionnaire de choisir d'appliquer ou non une législation qu'il a négocié au Conseil et au Parlement. L'option exercée ces dernières années de ne pas participer à certains instruments est apparue comme une régression pour les droits des citoyens de ce pays. Le paradoxe ultime réside dans l'instauration d'un parquet européen par décision à l'unanimité des États membres ou dans le cadre d'une coopération renforcée. Autrement dit, la garantie d'un projet ambitieux, premier transfert de souveraineté en matière de poursuites judiciaires dépend d'une décision à l'unanimité. Le Royaume-Uni étant opposé à un transfert de souveraineté, le Brexit pourrait permettre de relancer une nouvelle orientation à ce dossier afin de mieux protéger les intérêts financiers de l'UE et ses contribuables.
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institut présaje
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"thomas cassuto"
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BREXIT, UN MOMENT DE VÉRITÉ POUR L’EUROPE JUDICIAIRE. IMPROBABLES PERSPECTIVES JUDICIAIRES D'UNE HYPOTHÈSE
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Plus généralement, la formulation lors du sommet de Tempere en 1999 de faire de la reconnaissance mutuelle la pierre angulaire de la coopération judiciaire a relancé la coopération judiciaire. Ce principe, inspiré de la pratique au Royaume-Uni, a également permis au système de common law de revendiquer ses spécificités. Du fait du Brexit, la coopération judiciaire trouverait encore dans les instruments du Conseil de l'Europe des outils mais avec un degré d'efficacité singulièrement réduit, là où la coopération trouve déjà des limites. Les anglais feraient ainsi objectivement choix de traverser le Channel en 2CV, délaissant ainsi la Rolls aux continentaux. La situation dans le domaine de la coopération judiciaire civile est globalement la même. Le Brexit devra nécessairement être compensé pour éviter que la cause des citoyens britanniques ne devienne stérile. La reconnaissance au Royaume-Uni des décisions continentales ne sera sans doute pas pire. Par ailleurs, ce pays devra trouver des solutions pour s'assurer que les décisions rendues par les juridictions insulaires bénéficient d'un minimum d'autorité de la chose jugée sur le continent. Ainsi, les conventions de La Haye en matière de contrat, de droit de la famille etc. assureraient un service minimum. En revanche, plus douloureuse pourrait être la situation du Royaume-Uni.
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BREXIT, UN MOMENT DE VÉRITÉ POUR L’EUROPE JUDICIAIRE. IMPROBABLES PERSPECTIVES JUDICIAIRES D'UNE HYPOTHÈSE
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2. Un Brexit douloureux pour le Royaume-Uni ? Si les contrôles aux frontières ne peuvent protéger le Royaume-Uni de la pression migratoire, qui s'exerce notamment depuis Calais ou Ostende, comment la sortie du Royaume-Uni, qui perdrait ainsi son influence dans l'UE pour débattre et tenter de résoudre le plus en amont possible, notamment d'un point de vue géographique, pourrait-elle améliorer sa situation. Le Brexit, pourrait conduire à l'instauration d'un régime d'association dans le cadre de l'Espace Economique Européen, placerait le Royaume-Uni vis-à-vis de l'UE avec la possibilité de choisir d'appliquer des règles qu'il n'aurait pas négocié dans le cadre du Conseil. L'indépendance idéologique y gagnerait au prix d'une servitude technocratique, l'accord d'association ne pouvant être négocié que sur une base acquise. Dans le cadre d'EUROJUST et d'EUROPOL, le Royaume-Uni se verrait sans doute admis comme observateur et pourrait participer à la marge mais sans pouvoir y peser. Globalement, il s'exclurait du train de la modernité.
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"thomas cassuto"
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BREXIT, UN MOMENT DE VÉRITÉ POUR L’EUROPE JUDICIAIRE. IMPROBABLES PERSPECTIVES JUDICIAIRES D'UNE HYPOTHÈSE
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L'idée qui tend à se développer d'un ordre public européen auquel peuvent se consacrer et se coordonner en toute confiance les autorités des États membres prospérerait à l'insu du Royaume-Uni enfermé dans une indépendance confinant à l'isolement pur et simple. Outre que le Royaume-Uni pourrait apparaître un havre d'autant plus propice à l'investissement criminel qu'il s'est exclu de l'UE, il se trouverait relayé au second rang dans la lutte contre la criminalité organisée. Ceux qui vitupèrent contre Bruxelles se conforteraient dans l'idée que le crime vient du continent en omettant pudiquement de relever qu'il trouverait au Royaume-Uni un terreau fertile à sa prospérité. L'objectivité commanderait alors la pudeur compatissante vis-à-vis d'un choix démocratique et souverain, quand bien même celui-ci serait à contre-courant de l'Histoire et contraire aux intérêts de ses promoteurs. Enfin, dans le domaine du droit civil, la sortie du Royaume-Uni pourrait redonner vigueur à l'attrait du droit continental. L'UE pourrait continuer à harmoniser les droits nationaux afin de renforcer l'attractivité et la compétitivité du marché commun en réduisant, indépendamment du Royaume-Uni, les obstacles à la concurrence et en renforçant la sécurité juridique dans cet espace.
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"thomas cassuto"
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BREXIT, UN MOMENT DE VÉRITÉ POUR L’EUROPE JUDICIAIRE. IMPROBABLES PERSPECTIVES JUDICIAIRES D'UNE HYPOTHÈSE
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## Anti-conclusion La relation entre le Royaume-Uni et l'UE ne s'achèvera pas le 23 juin 2016. Nul ne peut ignorer le rôle déterminant de ce pays dans la défense de la liberté en Europe. Ainsi, son destin est intimement lié au continent. A cet égard, l'héritage de Churchill est double. La démocratie britannique, au prix d'immenses sacrifices, s'est constituée en rempart contre la tyrannie et la barbarie. Ces sacrifices étaient légitimes au nom des principes défendus et de l'ancrage vital du Royaume-Uni en Europe. Au XXIème siècle, face aux superpuissances économiques et militaires, avenues ou émergentes, seule une Europe politiquement unie sur ses fondements peut faire face aux défis futurs. La perspective d'un Brexit apparaîtrait comme une victoire purement dialectique des souverainistes. La prétendue préservation de l'indépendance d'une fonction éminemment régalienne telle que la Justice pourrait laisser entendre que les droits des citoyens, l'ordre public national et l'intérêt d'une Nation seraient mieux protégés. C'est sans conteste une affirmation fausse, qui, si elle devenait contagieuse, précipiterait l'Europe dans la décadence néo-moyenâgeuse d'une collection de sociétés-Etats repliées sur elles-mêmes.
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institut présaje
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"thomas cassuto"
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BREXIT, UN MOMENT DE VÉRITÉ POUR L’EUROPE JUDICIAIRE. IMPROBABLES PERSPECTIVES JUDICIAIRES D'UNE HYPOTHÈSE
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Après avoir forcé l'entrée dans la CEE, le Royaume-Uni a constamment revendiqué un statut à part. En consacrant cette singularité, les Traités ont ouvert la voie à un marchandage permanent dont l'une des issues ne pouvait être que la rupture, c'est à dire, la confrontation intime du peuple anglais avec lui-même sur son avenir dans l'UE. S'il est difficile de retenir un partenaire même lorsque cela va à l'encontre de son propre intérêt, le débat outre-Manche ne peut nous laisser indifférents. Même si le Brexit offrait à l'UE l'opportunité de reprendre sa marche en avant, dans un sursaut existentiel vital, notamment dans le domaine d'une intégration judiciaire. Sur le plan judiciaire, laissons la parole un brin optimiste à Michael Hopmeier, juge londonien (Circuit judge, Kingston-on-Thames, au moment de son intervention.) et intervenant lors du colloque du 13 octobre 2014: « but [...] we still share the same end goal, namely that we all want to see an effective result which is fair, with proper orders and judgments enforced quickly with proper reciprocal recognition and enforcement of orders in the EU. ». Cet idéal que les praticiens du droit partagent serait incontestablement et dramatiquement remis en cause par un Brexit. ^1^ http://presaje.com/media/uploads/verbatim_coop%C3%A9ration_judiciaire_13_10_14_-_vd.pdf ^2^ Circuit judge, Kingston-onThames, au moment de son intervention.
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institut présaje
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"pierre-alexandre petit"
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BREXIT ET INDUSTRIE FINANCIÈRE : LA CITY ANTICIPE DES CONSÉQUENCES LIMITÉES
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# Brexit et Industrie financière : la City anticipe des conséquences limitées L’industrie financière britannique a largement bénéficié de l’appartenance à l’Union Européenne, le Marché Unique permettant de pérenniser une prééminence de longue date alors que la mondialisation s’accélérait. Les professionnels devraient-ils pour autant s’inquiéter d’un brexit ? Les changements réglementaires ne remettraient probablement pas en cause la suprématie de la City qui anticipe une légère perte de compétitivité-coûts et une diminution d’activité pendant les longues négociations de sortie de l’Union. La position dominante à l’échelle mondiale dont jouit aujourd’hui le Royaume-Uni dans de nombreux secteurs de l’industrie financière tient en partie du principe de passeport Européen, permettant à toute filiale britannique d’une banque internationale de vendre ses produits ou services à travers l’Espace Economique Européen. Depuis l’instauration du marché unique, Londres a ainsi attiré les investissements étrangers pour renforcer un leadership établi et s’imposer comme portail des transactions financières entre l’Europe et le reste du monde. Quelques chiffres peuvent témoigner du statut unique du Royaume-Uni pour la Finance européenne: alors que le pays ne représente qu’environ 13% de la population et 15% du PIB de l’UE, il pèse 24% des services financiers de l’union. Londres représente aussi 30% de la capitalisation boursière européenne ou 32% des actifs bancaires. Et pour rentrer dans le détail de la suprématie britannique, le pays représente 50% des services de gestion de fonds européens, 64% des levées de fonds en private equity, 74% des ventes de produits dérivés de taux, 78% du trading de devises ou encore 85% des actifs de hedge funds(1).
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institut présaje
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"pierre-alexandre petit"
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BREXIT ET INDUSTRIE FINANCIÈRE : LA CITY ANTICIPE DES CONSÉQUENCES LIMITÉES
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Le secteur représente plus d’un million d’emplois de l’autre cote de la Manche et près de 7% du PIB ; £65 milliards de recettes fiscales. Un écosystème complexe s’articule autour d’une main d’œuvre très qualifiée qui afflue du monde entier - un quart d’étrangers dans la City dont 50% provenant d’autres pays de l’UE -, de réseaux très denses d’intermédiaires, de conseils et de lobbyistes en tous genres et repose sur des infrastructures inégalées en Europe. Cela constitue un avantage compétitif si significatif qu’il semble très peu probable de voir d’autres villes européennes venir déloger Londres de sa position dominante en cas de brexit. Pour autant, une sortie de l’UE ne serait pas indolore pour la City et ses investisseurs. En premier lieu, une perte de compétitivité relative du Royaume-Uni peut être attendue en raison de l’augmentation des coûts pour servir les marchés européens et internationaux. Hors de l’Union, les accords de libre-échange négociés par l’UE pour accéder à ces marchés pourraient être remis en cause. La question des échanges intra-européens est plus complexe en l’absence d’alternative équivalente à Londres pour fournir aux clients européens des services financiers. Des coûts supplémentaires semblent donc inévitables, soit pour recréer un pôle financier compétitif en Europe continentale, soit pour que les institutions financières britanniques obtiennent et maintiennent les agréments ou les équivalences avec les réglementations en vigueur dans l’UE.
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institut présaje
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"pierre-alexandre petit"
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BREXIT ET INDUSTRIE FINANCIÈRE : LA CITY ANTICIPE DES CONSÉQUENCES LIMITÉES
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Parmi les contraintes réglementaires essentielles figurent celles qui régissent la façon dont les produits financiers peuvent être commercialisés sous forme de parts de fonds: UCITS pour la vente de détail et AIFMD pour la vente aux investisseurs professionnels. Dans les deux cas, la réglementation européenne impose que les fonds et leurs sociétés de gestion soient domiciliés dans un pays membre, même si les décisions d’investissement sont déléguées par la société de gestion à un prestataire hors de l’UE. Le maintien du statut UCITS ou AIFMD est un réel enjeu car ces dénominations sont désormais essentielles au-delà des frontières européennes, notamment en Asie et en Amérique du Sud. Néanmoins, la plupart des fonds gérés depuis le Royaume Uni et commercialisés en Europe continentale sont d’ores et déjà structurés ainsi et les impacts du brexit pourraient ne se limiter qu’à la minorité des fonds ou de leurs sociétés de gestion qui sont domiciliés au Royaume Uni :
- AIFMD: L’obtention d’une équivalence de la part de l’UE serait probablement privilégiée si c’est envisageable dans le cadre du nouveau modèle de relations commerciales (c’est le cas de la Suisse par exemple). L’alternative serait de transférer le fonds et sa société de gestion dans un pays membre tout en déléguant les décisions d’investissement à la société basée au Royaume-Uni. Dans le cas du fonds, le transfert pourra toutefois être un fait générateur d’imposition ;
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institut présaje
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"pierre-alexandre petit"
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BREXIT ET INDUSTRIE FINANCIÈRE : LA CITY ANTICIPE DES CONSÉQUENCES LIMITÉES
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- UCITS: il n’existe pas d’équivalence donc le fonds et la société de gestion devront être transférés avec les mêmes conséquences pour l’AIFMD.
Ce fonctionnement limiterait l’impact négatif de la perte du passeport européen pour les institutions basées au Royaume-Uni qui vendent des produits financiers à des investisseurs européens. Mais les banques intermédiaires de la City, qui passent des ordres ou agissent comme chambres de compensation, resteraient incapables de traiter avec des gérants européens sans équivalence MiFID (directive sur les marches d’instruments financiers) ou EMIR (produits dérivés OTC). Ce qui pourrait obliger ces banques à ouvrir des succursales en Europe continentale. Toutes choses égales par ailleurs, une décentralisation imposée par la réglementation Européenne devrait donc contribuer à l’augmentation des coûts moyens en réduisant les économies d’échelles réalisées aujourd’hui par un seul acteur.
Le brexit aurait donc des conséquences plus probablement défavorables pour l’industrie financière européenne et plus particulièrement pour l’industrie financière britannique. Il ne faut pas tant redouter les conséquences réglementaires qu’une diminution significative des volumes d’activité liée à l’incertitude concernant la durée et le résultat des négociations de sortie et leurs implications macro-économiques.
(1) Blacrock Investment Institute, BoE, MSCI et theCityUK (février 2016)
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institut présaje
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"jean-marc daniel"
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BREXIT OR NOT BREXIT, A LOT OF QUESTIONS...
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# Brexit or not Brexit, a lot of questions... La campagne pour le référendum britannique a réveillé le souvenir exalté des Vikings, un peuple épris de liberté, toujours prêt à se projeter sur l’ensemble de la planète. Les partisans du Brexit comptent sur les solidarités mondiales de “l’Anglosphère” pour compenser un éventuel passage à vide dans les relations du pays avec le Vieux Continent. Des relations qui pourraient reprendre ensuite dans un climat de clarification inédit jusqu’à aujourd’hui... D’inenvisageable il y a peu, le Brexit est devenu possible voire probable. Pour le Royaume-Uni, cela constituerait évidemment un repli. Mais gageons que ce repli ne se ferait pas sur le pré-carré de l’Angleterre historique. En effet, le Royaume-Uni a des liens multiples. Sur le plan commercial, l’Union européenne occupe la première place, mais ce fut lent au point qu’elle n’a dépassé dans le commerce extérieur britannique les 50% que depuis 5 ans. Le Royaume-Uni garde, en outre, des liens significatifs avec l’Amérique si bien que son cycle conjoncturel a un déroulé plus proche de celui des Etats-Unis que de celui de l’Allemagne ou de la France. C’est en partant de ce constat que Tony Blair avait plaidé à la fin des années 90 le maintien du Royaume-Uni hors de l’Union monétaire. Il avait eu néanmoins l’habileté de faire voter par son parlement l’indépendance de la Banque d’Angleterre, selon la logique du traité de Maastricht, de façon à maintenir l’illusion d’une Grande Bretagne dans l’antichambre de la monnaie unique et à garantir, de ce fait, à la finance anglaise, la possibilité de s’affirmer comme un des principaux acteurs de la vie de l’euro.
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institut présaje
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"jean-marc daniel"
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BREXIT OR NOT BREXIT, A LOT OF QUESTIONS...
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Il y a un troisième ensemble qui joue un rôle important dans la vie anglaise, ce que certains proches de David Cameron appellent « l’anglosphère ». Pour eux, il convient de repartir de la vision du monde qui fut celle de Benjamin Disraëli et que décrivit l’essayiste allemand Oswald Spengler, l’auteur du Déclin de l’Occident, dans un autre de ses livres intitulé Prussianité et Socialisme.
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institut présaje
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2016-06-01
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"jean-marc daniel"
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BREXIT OR NOT BREXIT, A LOT OF QUESTIONS...
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A l’en croire, l’Angleterre n’aurait pas été structurée par les Angles et les Saxons mais par les Vikings, venus d’abord du Danemark puis de la Normandie française. L’âme anglaise serait l’héritière d’un esprit viking combinant une quête sans limite géographique de la richesse et un attachement indéfectible à la petite communauté du drakkar. Policé avec le temps, cet esprit nourrirait l’attachement à la liberté notamment économique et la volonté de projeter à la surface de la planète son « drakkar ». L’« anglosphère » en résulterait sous forme de réseau associant des pays démocratiques et commerçants. On y trouverait la Nouvelle Zélande qui a refusé d’abandonner son actuel drapeau incorporant l’Union Jack et l’Inde et le Pakistan devenus des maîtres au cricket et qui viennent de fournir à Londres un nouveau maire, mais ni les Etats-Unis ni une Ecosse aux nostalgies celtiques et cherchant des alliances continentales. Pour le Royaume-Uni, ou plus exactement l’Angleterre, le Brexit signifierait une réorientation de ses priorités vers Singapour, Hong Kong, Abuja ou Sydney. George Osborne, le chancelier de l’échiquier, a annoncé une apocalypse économique en cas de Brexit. Il n’en serait rien. Dans un premier temps, la livre accuserait le coup, avant qu’une politique monétaire restrictive ne stabilise la situation. Puis, le Royaume-Uni se tournerait vers l’anglosphère, continuant à commercer mais sans converser avec l’Europe continentale. Quant à celle-ci, elle découvrirait qu’elle a oublié le Royaume-Uni depuis longtemps. Aujourd’hui elle se construit sans lui autour de la zone euro, pour laquelle le départ anglais conduirait à une clarification avec le rapatriement des opérations de compensation qui se font encore à Londres sur Paris ou Francfort.
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institut présaje
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"jean-marc daniel"
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BREXIT OR NOT BREXIT, A LOT OF QUESTIONS...
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Il faudrait ensuite entamer des négociations sur la sortie de la République tchèque ou du Danemark, un membre à bien des égards proches de l’anglosphère. Pour l’Union européenne, ce serait le début d’une nouvelle crise, avant tout politique, une de ces crises qui lui ont jusqu’à présent permis d’avancer. Il s’agirait alors d’aller vers une identification toujours plus forte entre elle et la zone euro, selon une logique que décrivait récemment le président Giscard d’Estaing dans son livre sur le projet « Europa ». Car l’autre choix serait la disparition, dont il serait facile mais vain de rendre coupable la « perfide Albion ».
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institut présaje
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"yves montenay"
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LA MACHINE EST… UN HOMME COMME LES AUTRES
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# La machine est… un homme comme les autres
La machine ? C’est tout à la fois le diable et le Bon Dieu. Pour les uns, c’est l'ennemi. L’instrument de nouvelles formes d’esclavage. Pour les autres au contraire, c’est le Bon Dieu. L'allié, le protecteur de nos fragilités physiques, l’outil de la délivrance. Yves Montenay pense au contraire que le robot, la machine, ne méritent pas d’aussi extrêmes appréciations. Il remarque malicieusement que nous les humains, nous sommes souvent routiniers et machinaux. En somme la machine est un homme comme les autres…
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institut présaje
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"yves montenay"
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LA MACHINE EST… UN HOMME COMME LES AUTRES
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## La machine, un diable impuissant ? La machine, c’est le diable : elle détruit l’emploi des « travailleurs », elle génère un monde mécanique, machinal, qui sera sans pensée ni culture et qui fait du livre un objet dépassé¹. Parallèlement (incohérence !), ce serait un diable impuissant : la productivité stagne, voyez Stiglitz, ou encore Pollin qui écrit : « La croissance de la productivité est revenue à des niveaux très faibles… épuisement du progrès technique » ². C'est un raisonnement bien rapide ! La productivité globale d'un pays ne dépend pas que des machines. Elle dépend à long terme de l'efficacité de l'enseignement (qui semble en baisse en Occident). Dans l'immédiat, la productivité pâtit d'abord des réglementations foisonnantes notamment en matière de droit du travail, de fiscalité, de sécurité ou d'environnement. Malgré cela, notre niveau de vie ne s'écroule pas. Donc les innovations (au sens large) ont continué à apporter d'importants progrès, et c’est ce qui nous permet de supporter le surcoût des fantaisies dogmatiques ou clientélistes (règlementations ci-dessus, multiples impôts et cotisations, devenues « usines à gaz » au fil des compromis). Dans le seul domaine de la gestion du personnel, ce sont les comptables, avec leurs machines et leurs logiciels, qui permettent aux entreprises de faire face au délire réglementaire.
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institut présaje
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"yves montenay"
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LA MACHINE EST… UN HOMME COMME LES AUTRES
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Remarquons par ailleurs que, comme Stiglitz, Pollin classe les nouveaux usages en « bons » et en « mauvais » : le premier fustige l'innovation en marketing et publicité, le second les jeux pour smartphones. Bref, ils jugent pour les autres ! Or la liberté et la créativité de notre monde s'appuient sur des individus libres qui choisissent eux-mêmes l'usage de ce que le marché leur offre. Faut-il un guide suprême comme en URSS, en Allemagne nazie ou en Iran ? Ayant parcouru les pays de l'Est à la belle époque du communisme, j'ai vu que le Gosplan avait jugé bon d’ignorer l'électroménager et les produits d'hygiène de base, et que les ménagères trimaient dans de multiples bricolages sordides.
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institut présaje
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"yves montenay"
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LA MACHINE EST… UN HOMME COMME LES AUTRES
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## Le Bon Dieu et notre ingratitude
A l'opposé, pour d'autres, la machine, c'est le Bon Dieu ! Car il s'agit de miracles : des petits robots permettent au chirurgien d'atteindre sa "cible" avec moins de saignements, de douleurs et de risques infectieux. Ou, miracle trivial, mais important par sa fréquence : je trouve en 30 secondes un dossier très ancien dont je ne me souviens ni du nom ni de la date.
Et il y a les miracles que l'on ne remarque plus : le Bon Dieu a donné aux ménagères leurs aspirateurs et machines à laver, leur épargnant la serpillière et le lavoir. Il leur a donné l'industrie textile leur épargnant le ravaudage et le tricot. Le Bon Dieu, toujours lui, nous a donné l’espace par la voiture, l'avion et la fusée. Il nous a libéré des douleurs et des maladies par les médicaments de masse. Il nous a libéré intellectuellement par l’accès quasi gratuit à l'information, littérature comprise. Nous verrons bientôt le paysan ivoirien être à égalité d’accès avec l'intellectuel parisien.
Mais nous sommes ingrats. Instruits et en bonne santé, nous pouvons critiquer « la société de consommation ».
Le Bon Dieu toutefois, ne se décourage pas : The Economist du 29 mars nous donne 16 pages enthousiastes sur les robots, ces « immigrants du futur » qui viendront travailler et jouer avec nous, et explorent déjà l’espace pour notre compte. « La révolution cognitive » serait en marche, et cet excellent journal nous dit que la machine dépassera le cerveau humain dans les 20 prochaines années³.
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institut présaje
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"yves montenay"
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LA MACHINE EST… UN HOMME COMME LES AUTRES
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## « Un homme comme les autres »
Restons sur terre. Aujourd'hui les technologies les plus folles ne sont rien sans le cerveau de la ménagère ou du chirurgien. Le robot indépendant de l'humain imaginé par Asimov, et que l'on doit brider par « Les trois lois de la robotique » pour qu'il ne nous domine pas, n'est pas le problème d'aujourd'hui. Et Toyota rend aux hommes ce qu’il avait confié aux robots^4^.
Bref, la machine n’existe pas sans l'homme, et comme par ailleurs beaucoup d'hommes sont routiniers voire machinaux, je conclus, peut-être provisoirement, que la machine est un homme comme les autres.
^1^ Christian Bobin La grande vie, Gallimard 2014
^2^ Les Echos du 2 avril 2014
^3^ Citant Ray Kurzweil, directeur de recherche chez Google, spécialiste du « transhumanisme » qui multiplie les interventions sur ce sujet.
^4^ Bloomberg, chaine économique, 8 avril 2014
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institut présaje
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"michel rouger"
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EDITORIAL : EUROP STORY. LUCIDE OU PERFIDE ALBION
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# Editorial : EUROP STORY. LUCIDE ou PERFIDE ALBION Les Britanniques ont senti le vent mauvais qui souffle sur le Vieux Continent. Au rêve de la génération Jean Monnet, ils opposaient naguère celui d’un grand marché libéral élargi à une Europe Centrale libérée du joug communiste. Aujourd’hui tout les indispose dans les prémisses d’une Europe à direction allemande, fruit d’un impressionnant décrochage de la France. Prenons la peine de les écouter. Un bon millénaire d’antagonismes et de conflits entre l’Angleterre et la France, étendus, au fil des temps, au Royaume-Uni, ont établi, entre les deux peuples, une relation troublée par la défiance. La perfidie fut le grief plus souvent évoqué par les Français contre leurs voisins, entre deux courtes périodes de cordialités organisées par les diplomates. En 1904, l’entente cordiale s’est installée entre eux, jusqu’à la proposition britannique faite en 1940 de fusionner les deux pays à la veille de l’effondrement de la France. Cette cordialité, vigilante, a résisté aux horreurs de la guerre. Puis, la France a oublié la perfidie, Albion étant devenue, après mûre réflexion, en 1973, membre de l’Europe institutionnelle. Comment ces relations vont-elles évoluer quelle que soit la réponse britannique au référendum sur le Brexit ? Perfidie réactivée face à l’égoïsme de leur éloignement, ou lucidité reconnue à nos voisins, face à nos propres échecs communautaires. That’s the question ? Pour éclairer votre réponse, je vous propose ce texte commentant les élections européennes.
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