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Comme Jean-Patrick Gille, je considère que cet article n’était pas obligatoire. S’il peut permettre aux parlementaires d’être davantage au contact de leurs concitoyens dans les communes où c’était compliqué, ce n’est pas inutile, mais quitte à le faire, autant le faire pour de bon.
On laisse entendre qu’on va donner une possibilité, mais en fait on la circonscrit non seulement au plan territorial, ce qui est légitime, mais aussi en quantité.
J’imagine qu’on trouve, derrière cette rédaction, la Direction générale des collectivités locales qui s’inquiète de la mise œuvre du dispositif et des contentieux possibles, mais franchement, monsieur le ministre, vous ne nous laissez guère l’espoir d’une application véritable.
Un dernier point : je ne suis pas du tout favorable – mon collègue Philippe Cordery ne m’en voudra pas – au fait que les consulats et les ambassades deviennent des lieux d’exercice de la fonction parlementaire.
M. Arnaud Richard. C’est un avis personnel, mes chers collègues.
On ne voit pas ce que l’article clarifie ; au contraire, il complique les choses de manière extraordinaire.
On ne sait pas, d’ailleurs, si c’est à titre onéreux ou gratuit que les communes mettront les locaux à disposition : c’est un point important.
En outre, laisser à la commune la possibilité de choisir comment elle aidera tel ou tel parlementaire me paraît très inégalitaire. Elle usera de cette faculté en fonction des créneaux horaires, de la présence ou non d’un autre parlementaire, des familles politiques… Tout cela sera source de contentieux.
Je pense donc qu’il est urgent d’attendre, surtout qu’une période électorale s’ouvre dans quelque temps, comme chacun le sait.
M. Patrick Kanner, ministre. Pourquoi cet amendement ? Parce que nous savons bien – et M. Richard l’a sous-entendu – qu’il y a des maires qui ne font aucun effort, pour ne pas dire plus, en faveur de la démocratie territoriale…
M. Patrick Kanner, ministre. …ce qui peut empêcher la rencontre entre un élu du peuple et les citoyens.
L’amendement me paraît suffisamment précis. Aller plus loin limiterait ce droit de rencontre avec les citoyens. Je crois que par rapport à la situation actuelle, nous apportons une amélioration.
Ensuite, nous testerons la volonté de mettre en œuvre cette disposition. Un maire ne pourra plus refuser de mettre des locaux à disposition de ses sénateurs et de son député.
M. le président. Si j’ai bien compris, M. Tian, vous proposez d’ajouter « gratuitement » au texte de l’amendement.
M. Philip Cordery. Je voudrais répondre à M. Richard qui émettait des doutes sur mon sous-amendement. L’égalité de tous les députés devant la loi doit nous conduire à légiférer de la même manière pour ceux qui sont élus en France et ceux qui sont élus à l’étranger.
Le siège du conseil consulaire, qui est l’équivalent du conseil municipal, c’est aujourd’hui le consulat : c’est l’endroit où le député peut tenir une permanence gratuite pour être en contact avec ses électeurs établis hors de France.
Mme Valérie Corre, rapporteure thématique de la commission spéciale. L’amendement précise bien que la mise à disposition est « de droit », ce qui signifie qu’elle est gratuite.
M. le président. Je ne suis pas sûr que cette mise à disposition de droit soit forcément gratuite : elle peut être au « tarif habituel ».
M. Dominique Tian. C’est exactement ce que je voulais dire, monsieur le président. Que cette mise à disposition soit de droit ne veut pas du tout dire qu’elle soit gratuite : il peut y avoir un tarif pour les associations. Si elle doit avoir lieu à titre non onéreux, je crois qu’il faut l’écrire. Sinon, n’importe quel tarif pourra être appliqué. Cette précision n’est pas « superfétatoire » du tout.
(Le sous-amendement no 802, repoussé par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
M. Philip Cordery. Je voudrais que l’égalité soit parfaite : si la mise à disposition est gratuite dans les mairies, elle doit l’être aussi dans les ambassades et les consulats.
M. le président. Cela va de soi. En outre, le troisième alinéa de votre sous-amendement est ainsi rectifié : « Pendant la période définie au second alinéa de l’article L. 52-4 du code électoral précédant le renouvellement de chaque série du Sénat et le renouvellement général de l’Assemblée nationale… » Cette rectification a été approuvée par la commission et le Gouvernement.
(Le sous-amendement no 783, tel qu’il vient d’être rectifié, est adopté.)
(L’amendement no 780, sous-amendé, est adopté et l’article 15 undecies est ainsi rédigé.)
M. Jean Lassalle. Je ne me suis pas beaucoup exprimé, monsieur le président, et puis il ne faut pas que je me fasse oublier totalement, même si les télévisions et les instituts de sondage m’ont totalement perdu… (Sourires.)
Je suis favorable à ce que l’État continue de garder un œil vigilant sur les associations, si importantes pour la vitalité des zones les plus défavorisées : je pense aux banlieues et aussi aux territoires ruraux, qui sont aujourd’hui en difficulté.
Confier le rôle de chef de file aux régions n’est pas forcément une bonne idée, parce que les politiques à mener ne sont pas les mêmes d’un lieu à l’autre. Associer l’État au département, et peut-être à la commune, serait plus judicieux.
Le monde associatif est véritablement une spécificité française. Or, je le vois en souffrance.
Je me félicite que, dans cet article 16, soit inscrite la nécessité de dialoguer avec les jeunes sur toutes les grandes orientations les concernant. C’était l’objectif du Conseil national de la jeunesse et des conseils départementaux : il faut considérer que les jeunes sont aptes à participer à l’élaboration des décisions qui les concernent.
Notre objectif est d’avoir une collectivité de référence, en lien avec l’organisation propre des services de l’État qui comporte des directions régionales de la jeunesse et des sports, que vous avez bien connues, madame la ministre.
M. Arnaud Richard. Dans le même esprit que Mme Buffet, je voudrais interroger le Gouvernement avant de voter.
L’alinéa 13, monsieur le ministre, dit que ces politiques publiques font l’objet d’un processus annuel de dialogue, structuré, entre les jeunes, les représentants de la société civile et les pouvoirs publics.
C’est très bien, l’idée est bonne, mais un peu vague. Que voulez-vous dire de la sorte ? Chaque région devra-t-elle se débrouiller en considérant que telle organisation de jeunesse ou tel représentant de la société civile sont représentatifs pour dialoguer chaque année ? Pouvez-vous préciser l’esprit dans lequel vous avez travaillé à cet alinéa 13 ?
Comme je l’ai dit tout à l’heure, monsieur Richard, les régions n’ont pas les mêmes interlocuteurs. Des structures d’éducation populaire existent dans tel département ou dans telle commune mais pas ailleurs. Une vraie logique de subsidiarité permet à chaque région de bâtir sa coordination, l’État – qui, lui, est représenté de la même manière partout – demeurant très vigilant. Tel est l’esprit de cet article.
Il me semble que l’on peut faire confiance aux nouvelles collectivités régionales – notamment à celles dont le territoire a évolué – pour bâtir des politiques cohérentes. Encore une fois, le « chef de filat » ne signifie pas qu’une compétence exclusive est conférée à une collectivité – en l’occurrence, à la région : il s’agit de la coordination et de la mise en œuvre d’une politique publique. La souplesse de ce dispositif rendra cette politique efficace.
Comme je l’ai dit en première lecture, cet article n’a aucune portée normative. Selon le principe de libre administration des collectivités territoriales, celles-ci peuvent tout à fait créer une instance de concertation sur les politiques de jeunesse sans qu’il soit besoin, encore une fois, de l’écrire dans la loi – il s’agit d’une possibilité. Un tel article revient donc à alourdir la loi.
Il s’agit en effet, monsieur le député, d’une possibilité offerte aux collectivités mais l’écrire dans la loi constitue une forte incitation. Comme nous l’avons dit en première lecture, nous voulons montrer ainsi que le dialogue avec les jeunes est nécessaire, qu’ils peuvent être interpellés non seulement sur les sujets qui les concernent mais, aussi, sur la totalité des politiques mises en œuvre sur les territoires.
Nous procédons à une forte incitation sans obligation en raison, précisément, de la libre administration des collectivités.
M. Arnaud Richard. Mes chers collègues, la citoyenneté doit pouvoir s’apprendre et s’expérimenter dès le plus jeune âge. Nous soutenons donc la position du Gouvernement visant à mettre en place des instances consacrées aux questions relatives à la jeunesse.
Néanmoins, nous estimons qu’il est possible d’aller plus loin et d’installer des conseils de jeunes dans chaque collectivité – d’où cet amendement –, ceux-ci constituant autant d’espaces de dialogue entre les jeunes et les élus d’une commune et favorisant le développement de la conscience citoyenne d’une même communauté.
M. Arnaud Richard. Il s’agit de préciser le champ de compétences des conseils de jeunes. En les installant dans les collectivités, l’objectif est de mettre en place une véritable organisation démocratique de proximité afin de favoriser la participation et l’expression des jeunes.
Il nous semble que ce serait une erreur de limiter le champ des compétences aux seules décisions relatives à la politique de la jeunesse. Celle-ci est capable de débattre et d’échanger sur des problématiques différentes de celles qui la concernent.
Mme Valérie Corre, rapporteure thématique de la commission spéciale. La commission a émis un avis défavorable mais en, fait, nous sommes totalement d’accord avec votre objectif. L’article dispose que le conseil de jeunes « peut émettre un avis sur les décisions relevant notamment de la politique de jeunesse ». Il n’y a donc là rien d’exclusif, bien au contraire.
Je l’ai dit en expliquant la raison pour laquelle nous soutenons ce type de structures : il s’agit bien d’associer les jeunes aux politiques menées sur les territoires, notamment en direction de la jeunesse, l’adverbe n’étant certes pas restrictif. Quoi qu’il en soit, en cas de doute, il sera levé par notre échange.
M. Arnaud Richard. Il vise à prévoir une représentation paritaire au sein de l’instance de concertation. La représentation des femmes, en politique, progresse lentement mes chers collègues : on ne compte encore que 27 % de femmes à l’Assemblée nationale et 25 % au Sénat.
Il nous semble important de prévoir, dès les premiers moments d’apprentissage de la citoyenneté, que les hommes et les femmes soient équitablement représentés dans ces instances civiques. Autant cela peut être très compliqué avec des instances de représentation du personnel – nous l’avons vu avec la loi « El Khomri » –, autant cela nous paraît ici de bonne pratique.
Toutes les élections sont aujourd’hui concernées par cette mesure législative permettant d’augmenter la représentation paritaire des hommes et des femmes. Les conseils de jeunes n’ont pas vocation à y échapper.
M. Jean-Luc Laurent. Il s’agit de supprimer cet article organisant les CESER selon les tranches d’âge et en reflétant la population. Ce quota qui ne veut pas dire son nom est très complexe et, à mon avis, très difficilement applicable. Le plus sage serait d’y renoncer parce que l’on se dirige vers des situations me semble-t-il extravagantes au regard de la composition habituelle des collèges des CESER.
C’est un sujet assez lourd dans nos régions, monsieur le président. Aujourd’hui, les membres des CESER se répartissent en quatre collèges. Demain, la représentation s’effectuera de 18 à 20 ans, de 20 à 30 ans, de 30 à 40 ans… On marche sur la tête, dans cette affaire-là ! J’exhorte nos collègues à réfléchir à sa mise en œuvre opérationnelle.
J’ajoute que si l’on observe la population d’une région, cela pourrait avoir des conséquences complètement inverses à votre objectif : les représentants de septuagénaires seront à l’aune de telle population plus nombreux qu’ils ne le seraient aujourd’hui !
M. Arnaud Richard. Je suis désolé, mes chers collègues, mais je ne suis pas certain que cet article réponde à vos préoccupations.
(Les amendements identiques nos 322 et 499 sont adoptés et l’article 16 quater est supprimé.)
M. Jacques Bompard. Je pense, très simplement, qu’il ne faut pas mettre de l’idéologie partout. Mettre en place un système paritaire par pure idéologie est non seulement contre-productif mais totalitaire. Les compétences des individus, à mon sens, doivent primer sur l’appartenance sexuelle. Cet article va à l’encontre du principe de méritocratie selon lequel chaque individu, en fonction de ses capacités, doit pouvoir accéder aux postes qu’il mérite.
Il est proposé de supprimer les mots : « et afin de refléter la population du territoire concerné, telle qu’issue du recensement, dans ses différentes classes d’âge ». Il importe que tous nos dispositifs soient cohérents : je vous invite donc à voter cet amendement, qui supprime une partie de l’article 16 quinquies.
M. le président. La commission a maintenu la suppression par le Sénat de l’article 16 sexies.
Laissons vivre les principes de la loi NOTRe et nous verrons, en fonction des résultats, s’il est nécessaire de l’améliorer. Je sais que cette question vous est chère, et je connais votre sincérité, mais le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission spéciale.
(L’amendement no 428 est adopté et l’article 16 sexies est ainsi rétabli.)
M. Razzy Hammadi, rapporteur général de la commission spéciale. Il s’agit d’un amendement de cohérence. Il vise, comme en première lecture, à compléter l’amendement précédent.
(L’amendement no 427 est adopté et l’article 16 septies est ainsi rétabli.)
M. le président. La commission a maintenu la suppression par le Sénat de l’article 16 octies A.
La parole est à M. Razzy Hammadi, rapporteur général de la commission spéciale, pour soutenir l’amendement no 426, tendant à rétablir cet article.
(L’amendement no 426 est adopté et l’article 16 octies A est ainsi rétabli.)
M. le président. La commission a supprimé l’article 16 octies.
M. Patrick Kanner, ministre. Si cet amendement n’est pas retiré, le Gouvernement y sera défavorable. Un contrat de ville, madame la députée, porte sur de grands principes : développement urbain, rénovation urbaine, développement économique et, depuis un an maintenant, à mon initiative, lutte contre la radicalisation. Il s’agit bien d’une contractualisation sur des objectifs partagés par l’ensemble des partenaires. Je vous rappelle qu’un contrat de ville peut être signé par vingt, trente, parfois même quarante partenaires, selon les territoires.
M. le président. La commission a maintenu la suppression de l’article 16 decies.
Mme Marie-George Buffet. C’est le droit des femmes à maîtriser leur grossesse. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.) Excusez-moi, cher collègue, mais le droit à l’IVG est un droit !
Mme Marie-George Buffet. Il est donc normal que l’État veille à ce que les jeunes soient informés des droits dont ils disposent.
Mme Marie-George Buffet. C’est ce que dit cet article, et c’est très important. J’espère que ces droits demeureront. En tout cas, nous mènerons le combat pour qu’ils demeurent. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
M. Jacques Bompard. Nous sommes, une nouvelle fois, face à un article militant, qui prévoit que les jeunes femmes bénéficient d’une éducation à la sexualité, dont le principal objet est orienté vers la contraception et l’interruption volontaire de grossesse. Doit-on rappeler que l’État doit conserver un rôle d’instruction, et qu’il n’a pas vocation à éduquer les jeunes femmes sur des questions d’ordre intime ?
M. Jacques Bompard. Par ailleurs, la perception militante des organismes gestionnaires des régimes obligatoires d’assurance maladie laisse à craindre qu’il ne soit octroyé aux femmes qu’une vision promotrice de l’avortement, provoqué sans qu’une alternative à celui-ci ne lui soit proposée. C’est pourquoi je demande la suppression de cet article.
M. Jacques Bompard. J’ai déposé plusieurs amendements à cet article pour une raison simple : je veux représenter ici toute une part de la population française, qui a été horrifiée des interventions répétées du Gouvernement en vue d’accentuer le nombre d’avortements dans notre pays (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), alors que la France souffre d’un recul de la natalité, malgré vos nombreux efforts pour amplifier la submersion migratoire.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 771, tendant à le rétablir dans une nouvelle rédaction.
Le présent amendement propose donc de conserver la disposition adoptée en première lecture, dès lors que le recours à la dématérialisation n’y demeure qu’une possibilité et non une obligation, et de l’étendre aux autres procédures de déclaration. Je profite de cette intervention pour demander le retrait de l’amendement du rapporteur, car celui que je présente est plus complet : il vise tous les modes d’acquisition de la nationalité. Devenir Français sera facilité et c’est une bonne chose.
(L’amendement no 771, accepté par la commission, est adopté et l’article 19 bis est ainsi rédigé.)
M. le président. La commission a maintenu la suppression par le Sénat de l’article 19 ter.
Concernant les permis poids lourds et deux roues, les formations certifiantes menant aux métiers de la conduite de marchandise ou de voyageurs comprennent déjà la préparation aux permis spécialisés, car ils sont indispensables à l’exercice de l’activité. Il n’est, de ce fait, pas nécessaire de prendre une disposition qui les détacherait de ces formations, surtout, monsieur le député, sans discussion préalable avec les partenaires sociaux responsables de la composition des listes de formation éligibles au CPF.
En outre, il ne serait pas pertinent de cibler, dans le code du travail, un titre de la formation professionnelle parmi des milliers, alors qu’il figure en bonne place sur la plupart des listes régionales des formations financées par les branches professionnelles. Pour ces raisons très objectives, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. Jean-Patrick Gille. Je me félicite du maintien de cet article, issu d’un amendement défendu par les députés. Il rend le code et les épreuves pratiques du permis de conduire éligibles au CPF, ce qui bénéficiera à beaucoup de monde, notamment aux jeunes. Un an de travail donne droit à vingt-quatre heures de formation, ou à quarante-huit heures s’il ne s’agit pas d’une formation de niveau V. C’est une grande avancée.
M. Xavier Breton. Pour les métiers de l’entretien et de la réparation, le permis poids lourds est requis, notamment pour déplacer les véhicules au sein des garages. Cette formation est donc en lien avec leurs qualifications et avec l’exercice de leur profession. L’objectif n’est pas d’acquérir un permis qui servirait à autre chose.
M. Arnaud Richard. Je retire mon amendement, par souci de cohérence. Pour autant, je reste convaincu qu’utiliser l’argent de la formation professionnelle pour financer les permis de conduire conduit à une forme de dévoiement de la formation professionnelle.
M. Arnaud Richard. C’est pour cela que je l’ai retiré !
M. Jean-Patrick Gille. Je tiens à rappeler que nous avons eu des échanges informels avec les partenaires sociaux avant de proposer cette disposition. Je ne cacherai pas qu’ils ont commencé par s’émouvoir du coût de la mesure. Pour autant, ils ont convenu qu’il était intéressant de disposer des moyens de débloquer la situation d’un salarié qui n’a pas le permis. Tout le monde voit bien l’intérêt de la mesure pour les jeunes.
J’ai eu des échanges avec des OPCA – organismes paritaires collecteurs agréés – parmi les plus importants : ils s’apprêtent d’ores et déjà à présenter des packages permettant de mettre en œuvre cette nouvelle disposition d’un permis financé dans le cadre du compte personnel de formation.
Je suis saisi de cinq amendements, nos 512, 656, 513, 511 et 507, qui, visant à rétablir l’article dans une nouvelle rédaction, peuvent être soumis à une discussion commune.
M. Jean-Noël Carpentier. Nous avons déjà amplement abordé cette question en première lecture comme en commission spéciale et je crois déjà connaître une partie de la réponse de M. le ministre. J’espère toutefois que celle-ci a évolué ces dernières semaines : c’est la raison pour laquelle il convient de revenir sur le sujet.
Chacun sait que la sécurité routière est une question essentielle. Il y a encore trop de morts ou de blessés en France à cause des accidents de voiture, auxquels la jeunesse paie un lourd tribut. Il convient donc d’apprendre le mieux possible le code de la route, qui contient les règles fondamentales.
Certes, cette disposition nouvelle n’est pas simple à organiser, mais je crois que tous les professionnels des auto-écoles pourraient y être associés. Tel est le sens de cet amendement.
M. Jean-Louis Bricout. Cet amendement défend une mesure essentielle, comprise par la jeunesse et indispensable pour son accès à l’emploi. Vous me trouverez insistant, mais qu’importe, je m’accroche à mes convictions.
Monsieur le ministre, j’insiste sur cette mesure, parce qu’elle est très bien perçue par la jeunesse : j’en ai fait le test. Loin de contrecarrer les avancées déjà réalisées, elle les renforce. En faisant franchir une première étape, cette mesure simple serait une vraie avancée sociale. Son adoption enverrait, en matière d’accès à l’emploi, un message à la jeunesse, qui vaut bien une telle expérimentation.
Nous sommes évidemment d’accord pour reconnaître la gravité de la situation en matière de sécurité routière et de ses conséquences en termes d’accidents, notamment mortels, parmi la population, en particulier chez les jeunes. Nous reconnaissons également les possibilités qu’ouvre le permis en matière d’insertion professionnelle : notre analyse rejoint la vôtre sur ces points.
Nous divergeons en revanche sur la possibilité de passer l’épreuve théorique du permis de conduire sur le temps scolaire au sein des établissements. Une telle disposition n’est envisageable ni au collège ni au lycée dans le cadre actuel des programmes des différents cursus.
Je tiens à rappeler ce que j’ai souligné en commission spéciale lors des deux lectures du texte : la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République a confié la gestion des programmes à un organe indépendant, le Conseil supérieur des programmes, et nous devons nous montrer fermes sur ce point. Il convient donc d’interroger cet organisme, avant de réfléchir à toute évolution sur le sujet.
M. Patrick Kanner, ministre. Messieurs Carpentier et Bricout, vous souhaitez organiser le passage de l’examen du code de la route dans les établissements scolaires : la prise en charge, que l’Assemblée vient d’adopter, du permis de conduire dans le cadre du compte personnel de formation représente déjà une très grande avancée – je suis certain que vous en êtes vous-mêmes convaincus.
Une telle expérimentation, qu’elle soit envisagée sur le temps scolaire ou hors temps scolaire, exigerait, comme Mme la rapporteure l’a souligné, une étude d’impact préalable. Elle n’a, de plus, fait l’objet à ce jour d’aucune concertation avec les intéressés, en particulier les auto-écoles et la communauté scolaire.
Je ne remets pas en cause l’esprit dans lequel ces amendements sont présentés, mais leur faisabilité à court terme me paraît inatteignable. C’est pourquoi le Gouvernement a émis, de manière très raisonnable, un avis défavorable.
M. Jean-Louis Bricout. Je tiens à répondre aux arguments de Mme la rapporteure et de M. le ministre, en rappelant tout d’abord que cet amendement propose une simple expérimentation dans le cadre scolaire. Je suis surpris car, depuis le vote de la loi Macron, personne n’a jamais saisi le Conseil supérieur des programmes pour évoquer ce sujet. S’il avait été saisi, nous disposerions aujourd’hui d’un retour.
S’agissant du financement de ce dispositif, qui concerne les lycées et les CFA, il est possible d’imaginer des conventions entre l’État, la région et le secteur assurantiel, qui est très sensibilisé à la question de l’apprentissage de la sécurité.
Je le répète : il s’agit d’une expérimentation. Pour évaluer ce dispositif, il faut voter cet amendement.
M. Jean-Noël Carpentier. Je comprends les arguments de M. le ministre, même si je ne les partage pas. Depuis plusieurs mois, M. Bricout l’a rappelé, nous avions le temps de faire les consultations nécessaires si nous voulions vraiment parvenir à réaliser une telle expérimentation. Je n’ai jamais prétendu qu’il suffisait d’un coup de baguette magique ! Considérant l’importance de ce sujet pour des dizaines de milliers de jeunes, cela vaudrait la peine de travailler vraiment dessus.